Maintenant, c’est un peuple ravagé par l’idée qu’il n’est pas un peuple mais une bousculade darwinienne. On se bouscule et on frappe : après l’histoire nationale, c’est donc la conviction d’une préhistoire alimentaire générale. Du coup, on a des émeutes pour le logement, pour des fauteuils dans un avion, pour les listes des élections, pour le sucre et le cartable. Quand tout est gratuit, c’est le peuple qui devient inutile et c’est ce que les Algériens ne veulent pas comprendre. Avant-hier, c’est l’un des sièges du RND au sud qui a été cerné par les demandeurs d’emploi à la prochaine assemblée. Du coup, on comprend cette idée de fond : personne ne croit à personne ni en rien. L’évidence est là : c’est un immense repas avec un moment 62 qui dure encore et un bruit de cuillères aux meilleurs moments de la civilisation ou un bruit de piétinements, quand tombent la nuit et la raison. Image monstrueuse du bon peuple qui a pris une photo avec les martyrs avant de les envoyer mourir pour lui ? Oui. Possible, mais voyez : un seul mois de jeûne par année fait remonter tout le monde de dix millénaires vers la préhistoire. L’histoire nationale est donc celle d’une vitesse entre un repas à peine cuit et une dévoration toujours plus creuse. C’est la théorie de Malthus contre la reproduction. Plus il y a de logements, de sièges à l’APN, de repas gratuits, de galons et de lots de terrain, plus le peuple se multiplie, se reproduit, devient plus nombreux et moins travailleur et plus exigeant et violent. Ceux qui possèdent ce pays l’ont compris intuitivement : on a chassé le colon mais il faut que l’autochtone garde son esprit de colonisé, avec l’effort en moins. Du coup, la colonisation sera plus durable.
Accords déviants par Kamel Daoud Accords déviants par Kamel Daoud Accords déviants par Kamel Daoud Accords déviants par Kamel Daoud
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1 mars 2012
Kamel Daoud