Paru le :19/04/2007
Editeur ifference
Collection :Minos
ISBN :272911677X
EAN :9782729116774
Nb. de pages :
Quatrième de couverture
Une grande ville musulmane, des personnages patients, hébétés, toute une figuration mystérieuse, ensorcelée : une image apocalyptique de la guerre d’Algérie. Le monde des profondeurs s’y réveille, la cité soumise aux forces imprévisibles et démoniaques, aux terreurs insurmontables, aux émerveillements cruels. Les visages sont de pierre et de lichen et, au milieu des explosions, des cérémonies inexplicables, des hommes continuent à vivre, s’enfonçant de plus en plus dans la terre pour y retrouver une racine ou un sommeil. Il n’y a plus de loi ni d’interdit, il n’y a plus de temps ni d’espace. Tout peut arriver. Et le héros luimême le sait, déjà averti par certains signes, par le visage mouvant et bénéfique de sa femme Nafissa. Ainsi Mohammed Dib a-t-il fixé et ordonné les cauchemars tout au long de ces pages qui constituent désormais l’un des grands classiques de la littérature algérienne.
Extrait du livre
Un lot d’hommes avait d’abord été enlevé. les épouses des enfants allèrent quémander la vérité sur le sort des leurs à toutes les portes. En même temps, une petite chanson, un babil errait sur les lèvres du vent. Ils s’en furent voir l’Hospodar, ils pleurèrent tandis que la chanson s’enroulait ingénument autour de leurs jambes, supplièrent, et les femmes tombèrent à genoux devant les Minotaures placés en sentinelles. Leur baisèrent la main. Leur tendirent les mioches qu’elles avaient au bras. Un air de flûte donnait des cornes contre les jambes, contre les ventres, frêle mais têtu. Les Minotaures les repoussèrent sans comprendre un traître mot à leur baragouin. Alors l’air capricant de flûte s’en alla bondir au loin parmi des odeurs de thym et de lentisques, et dans toutes les maisons, tous les magasins, sous les paroles un silence de basalte se forma. Il était partout le même, sans fissure. D’un simple mot, on le sentait, on le touchait. Ensuite les murs se déplacèrent puis se replacèrent autour de nous sans tenir compte de l’alignement ancien, mais non sans observer ce que je suis bien obligé d’appeler un dessein général, lequel consistait en une volonté très nette d’enveloppement de l’intérieur comme de l’extérieur. Cela provenait du fait que la ville s’était noyée dans le basalte ou plus exactement que le basalte l’avait recouverte.
2 mars 2012
Mohammed Dib