Que de chemins nous sont offerts chaque jour, chaque heure, chaque instant. Quelle serait notre vie si, à un moment donné, nous avions seulement décidé d’attendre le prochain bus plutôt que de prendre ce bus bondé de monde, obligé de s’arrêter à chaque nid-de-poule. Ce bus qui m’a déposé en retard à mon boulot, ce qui m’a coûté un savon de la part de mes chefs.
Imaginez un instant le nombre incalculable de routes, de choix, de décisions que nous avons eu à prendre depuis que nous sommes : ça donne le tournis.
Je me rends compte, chaque jour, que le moindre de mes gestes, le moindre de mes actes aura une incidence sur mon avenir, sur ce qu’on appelle le destin. Loukène, au lieu d’user mes pantalons sur les bancs du savoir, j’avais été orienté vers la bijouterie, ou l’import… Loukène… Combien de personnes auraient pu être de mes amis, quelles auraient été mes rencontres ? J’aurais peut-être été député. Car il paraît qu’aujourd’hui il faut payer pour le devenir.
Pourtant, je crois, je reste persuadé que rien n’est vraiment dû au hasard de la vie, que rien n’est dû à nos choix. Il reste une part de mystère, de mystique qui donne cette impression de route tracée, comme si nous devions nous rencontrer à un moment ou à un autre.
On a pour beaucoup cette mauvaise habitude, lorsque nous nous lançons dans une histoire, de nous projeter dans l’avenir et de nous créer des barrières parce que nous savons à l’avance les moments qui vont être essentiels. Y penser est une chose, l’intégrer est normal. Faire de ces moments, de ces déceptions dues au métier ou autre une barrière pour vivre au présent est dommage.
Il n’est pas évident de ne pas penser à l’avenir ; je ne dis pas qu’il ne faut pas le faire, l’avenir bien préparé est notre ami. Cependant, trop y penser, trop vouloir le préparer en fait notre ennemi car il nous empêche de vivre le présent dans les meilleures conditions.
Moi, je ne connais pas mon avenir. J’ai un avenir professionnel, certes, mais je n’ai pas d’avenir personnel. Rien qui me permette de m’accrocher. Pourquoi cette situation ? Parce qu’à un moment donné, j’ai pris la décision de choisir un ruisseau qui m’a conduit à un océan. Je sais bien qu’un rien pourrait couler mon navire. Et pourtant, à bien y regarder, dans cet océan d’incertitudes, j’y trouve un nombre incalculable de choix. C’est toujours mieux qu’une simple route toute tracée. A moi de savoir rebondir si la brise venait à s’arrêter. Mais pour le moment, je hisse ma voile, je montre au vent ce que je cherche. Et même si la brise est faible, je sais qu’elle me transporte vers le rivage. Non, je ne regrette rien.
15 mars 2012
El Guellil