Cette navigation qui semblait se faire, en apparence dans la brume, allait encore alimenter le secteur privé par ce qui est appelé le temps complémentaire qui autorise les médecins spécialistes du secteur public à assurer deux vacations hebdomadaires rémunérées dans ce même secteur. Allez séparer le bon grain de l’ivraie. Que dire encore quand deux béliers, conventionnement et temps complémentaire, partent à l’assaut de la citadelle hospitalière ? Il n’en restera, dans le meilleur des cas que les fondements les moins exposés : l’acte préventif qui demeure encore non lucratif. Votre serviteur, fonctionnaire à la retraite de ce même secteur, n’arrive plus à comprendre cette descente aux enfers qu’aucune docte circonlocution ne peut justifier. Les capacités humaines et matérielles qui ont souvent était multipliées par 10 et parfois plus, ne parviennent encore pas à juguler cette déchéance encore moins, de tenter d’en atténuer les effets dévastateurs par une ébauche de redressement. Le navire semble prendre l’eau de toute part. S’il faut étayer la situation de l’acte de soin dans notre pays par quelques exemples illustratifs, en voici deux qui résument à eux seuls cette déperdition.
Il a eu, donc, de part son ancien statut à connaître des deux cas, sans pouvoir régler ni l’un ni l’autre. Le premier cas, signalé par un groupe de jeunes humanitaires sur un réseau social connu, concernait un bébé né en octobre 2011 et sur lequel a été constatée, une malformation cardiaque congénitale. Le plus surprenant, c’est que cette malformation soit passée sans que le médecin accoucheur ou le pédiatre ne la dépiste. Faut-il aussi que l’acte d’accoucher soit médicalisé comme on le prétend. Enfin, passons ! Donc, se faufilant à travers ce filet à larges mailles qu’est le service de maternité, le petit Omar El Farouk atterri chez un médecin généraliste début janvier qui suspecte la «chose» et l’oriente vers un cardiologue privé à une centaine de kilomètres de son lieu de résidence. Ce dernier, après un examen sophistiqué par écho angiographie Doppler, conclu à une malformation cardiaque. Retour chez le médecin traitant avec un traitement d’entretien. A la mi-février, le petit patient est réorienté chez un cardiologue privé encore, mais cette fois ci à soixante kilomètres seulement de chez lui ; même diagnostic, même conclusion. L’examen radiographique, pratiqué dans une clinique privée conclu à une cardiomégalie globale?! Là, nous avons la nette impression qu’il s’agit d’une curée qui ne dit pas son nom. Les parents désemparés de cet innocent enfant, sont contraints de payer à chaque fois pour s’entendre dire la même chose. Ce n’est que le 29 février que l’enfant malade sera orienté vers la clinique médico chirurgicale infantile de Bou Ismail. La galère semblait prendre fin en ce 22 février, pour cette victime expiatoire de l’inconséquence. Royalement reçu la veille du rendez-vous à la maison d’hôtes du CMCI pour la modique somme de 150 da la nuitée, le couple présente l’enfant dès le lendemain à la consultation. L’indication chirurgicale est posée, mais l’enfant ne peut être pris en charge dans des délais raisonnables. Tel a été le verdict et sans appel, du praticien consulté pour cause de surpeuplement du service. Les assurés sociaux sont dans ce cas orientés vers le secteur privé dont plusieurs cliniques, pratiquent ce genre de pathologie. Les «sans papiers» n’auront que leurs yeux pour pleurer. L’on est en droit de se poser, non pas par un tas de question ; mais une seule : comment se peut-il qu’aucun de nos bastions de la médecine que sont les CHU, ne dispose d’un service spécialisé comme celui de Bou Ismail ? Est-ce à dire que la Caisse nationale d’assurances sociales (CNAS) soit à l’avant-garde de la chirurgie cardiaque infantile et de radio diagnostic ? Et c’est tant mieux, sauf que le secteur en charge de la santé doit faire l’effort pour supporter la charge exercée sur la CMCI de Bou Ismail.
Quant au deuxième cas dont nous avons suivi le cheminement et qui n’a pas encore connu de dénouement, il s’agit d’une jeune mère de famille victime d’un accident domestique. S’étant chahutée le genou par un faux mouvement, elle subit depuis près de deux mois, l’invalidité douloureuse et l’abattement psychologie. Examinée par un premier spécialiste en chirurgie traumatologique chez laquelle il subodore une atteinte méniscale, il demande une imagerie par résonance magnétique (IRM). Le diagnostic et l’examen d’imagerie sont confirmés par un professeur chef de service dans la spécialité. Dans le privé, l’examen peut se faire presque à la demande mais à pas moins de 15.000 DA. Forte de sa prescription professorale et traînant la «patte», elle se présente au service de radiologie du plus grand CHU du pays. Elle est orientée sur le service de traumatologie pour «confirmer» le diagnostic ; parce que «on» ne croit pas à la prescription d’un confrère d’un CHU de province. Après plus de trois ou quatre navettes entre le service et son lieu de résidence situé à 70 kilomètres de la capitale et la recherche d’un cachet humide à apposer sur la nouvelle prescription, on consent à lui remettre le précieux sésame ouvrant les portes du service de radiodiagnostic avec toutefois, une précaution légale peut être, mais excessivement bureaucratique : Une déclaration reconnaissant les risques induits par les produits de contrastes utilisés lors de l’examen et dont la signature du déclarant doit être estampillée par les services communaux chargés de la légalisation documentaire. Ouf ! Et ce n’est malheureusement pas fini le rendez n’est pas encore acquis, il faut d’abord se référer à la liste d’attente qui croyons-nous savoir, est déjà interminable.
Cette voie est déjà rapide, pour la simple et bonne raison que le narrateur a fait intervenir, un ou deux de ses anciens collègues de travail. Nous avons appris, que la wilaya de résidence de la patiente a acquis un bloc technique d’IRM, mais le local devant abriter cet équipement est encore en voie de réalisation
15 mars 2012
Farouk Zahi