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Est-il possible de s’adosser à l’histoire avec Benjamin Stora ? (3/3)

31 mars 2012

Abdelhakim Meziani

Est-il possible de s’adosser à l’histoire avec Benjamin Stora ? (3/3) dans Abdelhakim Meziani 405901_benjamin-stora-historien_-300x212Culture

Samedi, 31 Mars 2012 10:00

La chronique de Abdelhakim Meziani

Contrairement à ce que pensent certains esprits chagrins, j’ai beaucoup de respect pour Benjamin Stora. C’est le cousin d’abord, même s’il a opté pour la France au lendemain de l’indépendance contrairement à l’écrasante majorité de la communauté juive restée en force dans son pays de toujours pour contribuer à sa reconstruction. C’est l’historien ensuite qui aura tenté avec détermination de briser le silence opaque imposé par l’impérialisme français à la question algérienne. Mais non sans maladresse, je l’avoue, car son rapport à l’histoire du mouvement national n’est pas sans ambiguïté. S’agissant des fondements de la révolution algérienne comme de son parti pris équivoque au profit du messalisme, son péché mignon consiste à privilégier les contradictions secondaires au sein de la société algérienne (FLN/MNA) au détriment de celle principale opposant pourtant un peuple aspirant à l’indépendance nationale à la caste coloniale. J’ai déjà cité quelques malheureux raccourcis empruntés allègrement par son film. Celui, par exemple, qui consiste à dire que si la résolution sur le droit à l’autodétermination du peuple algérien a été votée, cela est dû essentiellement à quelques pays africains et à la Chine communiste. Une grande nation où les responsables du GPRA – et le film le montre avec insistance -  ont été royalement reçus par le Président Mao Tsé-toung et Chou En-Laï, son Premier ministre. Alors que le mérite singulier en revient à l’Abbé Bérenguer, un curé algérien dévoué à la cause nationale, et au vote décisif de pays latino-américains qu’il a sensibilisés autour de la question algérienne. Cela, nonobstant les déboires et les obstacles que les services français dresseront devant lui afin de l’empêcher d’accomplir sa mission. Le général de Gaulle ira même jusqu’à désigner André Malraux, fort de son aura d’intellectuel, pour endiguer l’audience de ses activités en faveur de la lutte pour la libération du peuple algérien. Les innombrables pérégrinations en Amérique latine de cet ambassadeur de la Révolution algérienne, grand ami de Fidel Castro et de Che Guevara, finiront par porter leurs fruits et seront, avec la manifestation populaire du 11 décembre 1960 à Alger, derrière le vote de l’essentiel des pays de la région en faveur du droit à l’autodétermination du peuple algérien aux Nations unies. Juste au moment où la lutte armée commençait à afficher son essoufflement à l’instigation d’une répression aveugle que le film, en mettant savamment en scène à travers les prouesses des généraux Massu et Challe, donne l’impression de glorifier. Dans son ouvrage intitulé Histoire du cinéma le Refus d’une mise en images, le réalisateur et écrivain Abderrezak Hellal met particulièrement l’accent sur le fait que les images des actualités françaises privilégient outrageusement la représentation du soldat : “Si dans un premier temps, le soldat apparaît comme accomplissant son devoir, son rôle est nettement politisé durant la seconde période. Il est représenté dans ses différentes dimensions. Il remporte des victoires, sa machine guerrière est mise en valeur ; il remplace l’homme politique.” La même source estime que cela n’est pas le fait du hasard, le militaire étant présenté comme le garant de la France qui lutte : “Ce qui explique la rareté des images des populations algériennes, l’absence de l’Algérien en armes qui n’apparaît que sur le terrain de la défaite.” Sont-ce pour ces raisons que les ultras de “l’Algérie française” apparaissent comme “les dindons” d’une farce concoctée par la société politique de l’Hexagone ? Est-ce pour les mêmes raisons que le sinistre Jean-Jacques Susini continue à soutenir avec une radicalité intacte, l’entretien qu’il a accordé à Bertrand Le Gendre en est une parfaite illustration, le paradoxe de son engagement jusqu’au-boutiste en faveur d’une cause désespérée et à jamais révolue ? Enfin, inutile de poser la question de savoir pourquoi le film de Benjamin Stora ne relaie nullement les révélations du N°2 de l’OAS sur la large complicité dont jouissait l’organisation criminelle au sein même de l’establishment et des services de contre-espionnage français…


A. M.
zianide2@gmail.com

À propos de Artisan de l'ombre

Natif de Sougueur ex Trézel ,du département de Tiaret Algérie Il a suivi ses études dans la même ville et devint instit par contrainte .C’est en voyant des candides dans des classes trop exiguës que sa vocation est née en se vouant pleinement à cette noble fonction corps et âme . Très reconnaissant à ceux qui ont contribué à son épanouissement et qui ne cessera jamais de remémorer :ses parents ,Chikhaoui Fatima Zohra Belasgaa Lakhdar,Benmokhtar Aomar ,Ait Said Yahia ,Ait Mouloud Mouloud ,Ait Rached Larbi ,Mokhtari Aoued Bouasba Djilali … Créa blog sur blog afin de s’échapper à un monde qui désormais ne lui appartient pas où il ne se retrouve guère . Il retrouva vite sa passion dans son monde en miniature apportant tout son savoir pour en faire profiter ses prochains. Tenace ,il continuera à honorer ses amis ,sa ville et toutes les personnes qui ont agi positivement sur lui

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Une réponse à “Est-il possible de s’adosser à l’histoire avec Benjamin Stora ? (3/3)”

  1. Artisans de l'ombre Dit :

    Benjamin Stora, né le 2 décembre 1950 à Constantine en Algérie, est un historien et professeur des universités. Ses recherches portent sur l’histoire du Maghreb contemporain, l’Algérie coloniale et l’immigration en France.

    Biographie

    Benjamin Stora grandit dans la communauté juive de Constantine, où il assiste au drame de la guerre d’Algérie et au terme de laquelle ses parents s’exilent vers la France 1. Il fait ses études au lycée Janson-de-Sailly à Paris, puis au lycée Marcel Roby de Saint-Germain-en-Laye et à l’université Paris-X Nanterre.
    Docteur en histoire en 1978 à l’EHESS, puis en sociologie en 1984 à Paris 7, et docteur d’État ès lettres en 1991 à Paris 12, il enseigne l’histoire du Maghreb et de la colonisation française (Indochine-Afrique) et co-dirige l’Institut Maghreb-Europe à Paris VIII-St Denis depuis 1990. Il a également enseigné à l’INALCO et, actuellement, est en poste à l’université Paris XIII. Il a poursuivi ses recherches à Hanoi, (1996-1997), New York (1998), à Rabat au Centre Jacques Berque (1998-2002), et à l’université libre de Berlin en 2011. Il s’est intéressé, notamment, à Messali Hadj, aux luttes entre indépendantistes algériens (Front de libération nationale contre Mouvement national algérien), à l’histoire des Juifs d’Algérie, et à la mémoire de la guerre d’Algérie. Chercheur internationalement reconnu, il a su faire avancer la recherche sur la guerre d’Algérie en utilisant les sources orales et visuelles, là ou les archives écrites n’étaient pas toujours accessibles.
    Benjamin Stora a publié une trentaine d’ouvrages et a dirigé plusieurs publications d’ouvrages. Il a également été conseiller historique du film Indochine de Régis Wargnier, de Là-bas… mon pays d’Alexandre Arcady en 2000, du Premier homme, de Gianni Amelio (2010), adaptation pour le cinéma du roman d’Albert Camus, et du film « Les Hommes libres » d’Ismaël Ferroukhi, présenté au Festival de Cannes en 2011. Il est l’auteur de plusieurs documentaires : Les années algériennes (France 2, 1991) ; Algérie, années de cendres, (France 3, 1995) ; L’indépendance aux deux visages (France 5, 2002) et Conversations avec les hommes de la révolution algérienne (Chaine Histoire, 2003) ; François Mitterrand et la guerre d’Algérie (France 2, 2010) ; La Loi de mon pays (France 3, 2011). Le 11 mars 2012, le documentaire Guerre d’Algérie, la déchirure (co-réalisé avec Gabriel Le Bomin) est diffusé en prime-time sur France 2.
    Benjamin Stora a été le commissaire général des Expositions, La France en guerre d’Algérie, avec Jean-Pierre Rioux et Laurent Gervereau (Hôtel des Invalides, 1992), et Photographier la guerre d’Algérie, avec Laurent Gervreau (Hôtel de Sully, 2004).
    Il est membre du jury du Prix du livre d’Histoire décerné par le Sénat.
    Benjamin Stora a reçu le Grand Prix des lectrices de ELLE, 2011, pour son livre-objet publié aux éditions Les Arènes, Algérie 1954-1962 : lettres, carnets et récits des Français et des Algériens dans la guerre. Il est officier des Arts et des Lettres.
    Activisme politique[modifier]

    En 1968, Benjamin Stora rejoint le groupe trotskiste, Alliance des jeunes pour le socialisme – Organisation communiste internationaliste (AJS-OCI)2 En 1978, Stora consacre une biographie au nationaliste algérien et leader indépendantiste Messali Hadj (Mouvement national algérien)2. Benjamin Stora est l’un des principaux fondateurs du syndicat UNEF ID, lors du congrès de Nanterre en 1980. Il rejoint le Parti socialiste en 1985 mais quitte définitivement tout engagement politique organisé en 1988 à la suite d’un drame personnel. Certains de ses écrits sont publiés dans le journal L’Humanité mais aussi dans Le Figaro (15 octobre 2007), Jeune Afrique (1er mars 2010) ou Télérama (22 septembre 2008)3.

    Bibliographie

    Dictionnaire biographique de militants nationalistes algériens, 1926-1954, L’Harmattan, 1985, 404 p.
    Messali Hadj : pionnier du nationalisme algérien, L’Harmattan, 1987, Hachette, Paris 2004, (ISBN 2-0127-9190-5).
    Nationalistes algériens et révolutionnaires français au temps du Front populaire, L’Harmattan, 1987, 140 p.
    Les sources du nationalisme algérien : parcours idéologiques, origine des acteurs, L’Harmattan, 1989, 195 p.
    Histoire de l’Algérie coloniale (1830-1954), La Découverte, Paris, 1991 et 2004, 126 p., (ISBN 2-7071-4466-5).
    La gangrène et l’oubli : la mémoire de la guerre d’Algérie, La Découverte, 1998 et 2005
    Ils venaient d’Algérie : l’immigration algérienne en France (1912-1992), Arthème Fayard, 1992, 492 p.
    Aide-mémoire de l’immigration algérienne : chronologie (1922-1962). Bibliographie, C.I.E.M.I., 1992, 136 p.
    Histoire de la guerre d’Algérie, La Découverte, Paris, 1993 et 2004 (ISBN 2-7071-4293-X).
    La Guerre d’Algérie, 1934-2004 : la fin de l’amnésie (avec Mohammed Harbi), Robert Laffont, Paris 2004 (ISBN 2-2211-0024-7)
    Histoire de l’Algérie depuis l’indépendance. Tome 1, 1962-1988, éditions La Découverte Paris, 1994, 120 p., (ISBN 2-7071-4405-3)
    Ferhat Abbas, une utopie algérienne (avec Zakia Daoud), Ed Denoël, 1994
    L’Algérie en 1995, Éditions Michalon, 1995 (ISBN 2-84186-013-2)
    Les mots de la guerre d’Algérie (avec Sophie Dlucq et Jean-François Klein), Presses Universitaires du Mirail, Toulouse, 2005 (ISBN 2-8581-6777-X)
    Imaginaires de guerre, Algérie-Viêt Nam en France et aux États-Unis, Paris, La Découverte 1997 (ISBN 2-7071-4308-1)
    Appelés en guerre d’Algérie, Gallimard, 1997
    Algérie, formation d’une nation, suivi de Impressions dans l’est algérien, Éditions Atlantica, 1998
    Le transfert d’une mémoire : de l’« Algérie française » au racisme anti-arabe, La Découverte, 1999
    Les 100 portes du Maghreb, avec Akram Ellyas, Éditions de l’Atelier, 1999
    La dernière génération d’octobre, Ed. Stock, 2003. (ISBN 2-2340-5620-6)
    La guerre invisible – Algérie années 90, Ed Presses de Sciences Po, 2000
    Les trois exils, Juifs d’Algérie, Stock, Paris 2006 (ISBN 2-2340-5863-5)
    Immigrances : l’immigration en France au xxe siècle (avec Emile Temine), Hachette Littératures, Paris 2007 (ISBN 2-0123-7261-9)
    La guerre des mémoires : la France face à son passé colonial (entretiens avec T. Leclère), Éditions de l’Aube, 2007
    Les guerres sans fin, un historien entre la France et l’Algérie, Ed. Stock, Paris 2008. (ISBN 978-2-23450-6051-7)
    Les immigrés algériens en France : une histoire politique, 1912-1962, Hachette Littératures, 2009
    Le mystère De Gaulle : son choix pour l’Algérie, Robert Laffont, 2009
    Mitterrand et la guerre d’Algérie, avec François Malye, Calmann-Lévy, 2010
    Algérie 1954-1962 : lettres, carnets et récits des Français et des Algériens dans la guerre, éditions Les Arènes, 2010
    Le nationalisme algérien avant 1954, CNRS éditions, 2010.
    Bibliographie de l’Algérie indépendante, 1962-2010, avec Christian Boyer, Ed CNRS, 2011.
    Le 89 arabe, réflexions sur les révolutions en cours, dialogue avec Edwy Plenel, Ed. Stock, 2011.(ISBN 978-2-2340-7112-.4)
    La guerre d’Algérie vue par les Algériens, avec Renaud de Rochebrune, Ed Denoël, 2011.
    Histoire de l’Algérie : XIXe-XXe siècles, La Découverte, mars 2012

    Références

    ↑ Une enfance à Constantine [archive], Benjamin Stora, http://etudescoloniales.canalblog.com [archive], 27 février 2007
    ↑ a et b Claude Askolovitch, « Benjamin Stora, Historien de l’intérieur, no 2134 [archive] », Nouvel Obs, SEMAINE DU JEUDI 30 Octobre 2003. Consulté le 2010.01.03
    ↑ Benjamin Stora, « Benjamin Stora on French Colonialism and Algeria Today! [archive] », L’Humanité, Article paru le 26 juillet 2006. Consulté le 2010.01.03

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