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La nouvelle de Adila Katia zahia…

6 mai 2012

Adila Katia, EXTRAITS

 

Par : Adila KATIALa nouvelle de Adila Katia     zahia… dans Adila Katia 334_200_150

On ira cette fois du côté de Guelma, dans les années cinquante. En pleine guerre de libération. Kadour, la vingtaine, rejoint le FLN. En décidant de lutter aux côtés de ses frères, il devra laisser sa femme Aïcha et sa fille Zahia, née du premier mariage.

1iére partie

Qui sait s’il en reviendra ? Le jeune homme ne peut s’empêcher de demander à sa vieille mère  d’en prendre soin. Surtout de Zahia. Elle n’a que neuf ans et elle a déjà perdu sa mère. S’il lui arrivait de tomber au champ d’honneur, il tenait à ce qu’elle ne manque pas d’affection.
Il sait qu’entre elle et Aïcha, le courant ne passait pas. Alors, en son absence, il ignore comment elles feront. Si elles enterreront la hache de guerre ou si elles reprendraient de plus belle. Sa famille pleure le jour de son départ. Zahia refuse de déjeuner ni même de dîner ce soir-là. Elle dormira avec sa grand-mère.  Aïcha est soulagée. Elle n’aura pas à la supporter.
Zahia a un sommeil agité. Elle donne des coups de pieds, parfois  se débat.
Sa grand-mère Kheïra la garde serrée contre elle, pour prévenir tout coup. Elle lui aurait bien installé une peau de mouton, près de sa couche, mais elle n’a qu’une couverture de laine. Il fait froid. Le feu dans la cheminée s’est éteint.
- Du calme !
- Tu crois qu’il reviendra ?
- Inch’Allah. Dors, sois tranquille ! Il nous reviendra, dit la vieille mère, pleurant en silence son départ.
On a Dieu et lui…
Kadour est son unique fils et elle l’a eu à un âge avancé. Son père était mort suite à une longue maladie. Il n’était alors qu’un adolescent. Les responsabilités lui étaient tombées sur les épaules. Il avait fait tous les métiers pour subvenir aux besoins de sa mère puis de sa petite famille. Kheïra, impatiente d’avoir des petits-enfants, l’avait vite marié  à sa cousine maternelle Saâdia. Zahia naîtra peu de temps après, mais sa mère ne s’était jamais réellement remise de son accouchement.
Pendant près de trois ans, elle n’avait pas quitté le lit. Kheïra s’était occupée d’elle et de la petite. Lorsque Saâdia mourut, Zahia s’accrocha à elle comme si elle était sa mère.
La grand-mère qui craignait de mourir et de les laisser seuls avait poussé son fils à refaire sa vie.
Cette fois, c’était lui qui avait choisi. Aïcha, une fille de leur proche voisinage, lui avait paru la femme idéale. Elle se remettait aussi d’un veuvage, et comme elle n’avait pas eu d’enfante, il avait espéré qu’elle aurait de l’affection pour sa fille.
Mais le courant ne passait pas entre elles. Zahia prenait un malin plaisir à lui désobéir. À la critiquer…
Toute la famille avait compris  qu’elles étaient jalouses l’une de l’autre et de l’amour de Kadour. Ce dernier cédait aux caprices de sa fille, comprenant qu’elle le veuille uniquement à elle. Il demandait plus de tolérance et de compréhension de la part de sa femme. Zahia est une enfant. L’unique enfant…
Aïcha espérait lui donner un fils mais, après trois années de mariage, elle désespérait. En partant à la guerre, elle le pleurait lui et cet enfant qu’elle n’a pas pu avoir…

 

À propos de Artisan de l'ombre

Natif de Sougueur ex Trézel ,du département de Tiaret Algérie Il a suivi ses études dans la même ville et devint instit par contrainte .C’est en voyant des candides dans des classes trop exiguës que sa vocation est née en se vouant pleinement à cette noble fonction corps et âme . Très reconnaissant à ceux qui ont contribué à son épanouissement et qui ne cessera jamais de remémorer :ses parents ,Chikhaoui Fatima Zohra Belasgaa Lakhdar,Benmokhtar Aomar ,Ait Said Yahia ,Ait Mouloud Mouloud ,Ait Rached Larbi ,Mokhtari Aoued Bouasba Djilali … Créa blog sur blog afin de s’échapper à un monde qui désormais ne lui appartient pas où il ne se retrouve guère . Il retrouva vite sa passion dans son monde en miniature apportant tout son savoir pour en faire profiter ses prochains. Tenace ,il continuera à honorer ses amis ,sa ville et toutes les personnes qui ont agi positivement sur lui

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87 Réponses à “La nouvelle de Adila Katia zahia…”

  1. Artisans de l'ombre Dit :

    2eme partie

    Elle aurait voulu lui donner un descendant. Un fils qui aurait fait le bonheur de toute la famille. Avec un petit frère avec qui jouer, qui aurait été la fierté de la famille, même Zahia aurait eu de meilleurs sentiments envers elle.
    Mais il n’en est rien. Elle n’a rien eu. Pas même une fille.
    Tout comme sa belle-mère, elle ne s’endort qu’au petit matin. Toutes ont pleuré Kadour. Elles savent qu’il faudra un miracle pour qu’il leur revienne sain et sauf.
    Le lendemain, Zahia et sa grand-mère gardent les chèvres non loin de leur maison. Elles passent leurs journées ainsi. À les garder, à discuter de tout et de rien. Elles regardent le village à leurs pieds. De la fumée s’échappe des cheminées des maisons.
    Toutes deux ramassent du bois et le portent en fin de journée. En rentrant, elles le mettent à brûler. Elles pourront se chauffer une partie de la nuit.
    Aïcha a préparé du couscous et du petit-lait. Kheïra trait ses chèvres, au petit matin et après être rentrées. Elles possèdent quelques légumes dans le jardin et ce lait. Pas de café, pas de sucre.
    Kheïra échange le lait avec l’épicier du village. Ainsi, elle peut en avoir et du savon. Aidée de sa belle-fille, parfois, elle tisse des couvertures de laine pour l’épouse de ce dernier. Celle-ci sait être généreuse. Elle donne des robes à Zahia et de l’argent à Kheïra. Un argent qu’elle ne dépense qu’en cas de maladie.
    Elle veut qu’au retour de son fils, elle ne perd pas espoir, qu’elle ait de quoi acheter une poule ou un lapin. De quoi accompagner le couscous. Elle sait qu’il reviendra un jour. Elle ne cesse de prier pour. La guerre finira un jour.
    Quelques mois après, un ami de Kadour vient les voir. Il leur donne une photo de lui en compagnie d’autres moudjahidine.
    Kheïra pleure en le voyant maigri, une barbe de plusieurs jours. Mais son regard est si vif. La photo passe entre les mains de Zahia et d’Aïcha. Elles sont toutes émues de le voir.
    Il leur donne des nouvelles. Il jure qu’il va bien et qu’il viendra les voir prochainement.
    - Que Dieu vous garde !
    - Priez pour !
    Kheïra voudrait lui envoyer un burnous mais le frère de guerre a encore du chemin à faire. Il ignore quand il reverra Kadour.
    - Même là-bas, il ne cesse de penser à vous !
    - Mon fils, portes-le ! En souvenir de ta visite ! Grâce à toi, on pourra le voir…
    Il ne refuse pas. Il fait si froid dans les montagnes. Il promet de revenir lorsqu’ils seront enfin libres.

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  2. Artisans de l'ombre Dit :

    3eme partie

    -Tu n’y touches pas ! C’est mon père. La photo me revient. Il l’a envoyée pour moi !
    - Elle est destinée à toute sa famille, réplique Aïcha. Quand grandiras-tu ?
    - Je suis grande, réplique l’enfant. Tu n’as aucun droit sur moi… Tu n’es pas ma mère ! Ma mère est morte et enterrée !
    La grand-mère se vois forcée de l’interrompre. Elle n’apprécie pas quand Zahia parle ainsi à sa belle-mère. Malgré tout, elle lui doit le respect. Elle est vieille. Elle sait que ses jours sans comptés et elle craint que le jour où elles se retrouveront seules, elles n’en viennent aux mains.
    Aïcha n’a jamais levé la main, sur elle mais ses regards sont si durs parfois. Peut-être que sa présence l’empêche de lui donner une correction dont elle se souviendra toute sa vie ?
    -Zahia, ma fille… La photo si je l’ai mise, dans ce coin, de la glace, c’est pour qu’on la voie toutes trois, lui dit-elle. Ton père est à toi, à moi, à Aïcha…
    -Non, rien qu’à toi et à moi ! Elle, non !
    - Cesses de répondre !
    - Papa n’aime que moi !
    - Non, il aime toute sa famille ! Même sa femme !
    -Non, grand-mère !
    -Tais-toi !
    -Non ! crie Zahia en se mettant à la frapper. Non!
    La grand-mère se couvre. Sans Aicha venue maitrisée Zahia, celle-ci l’aurait blessée. Aïcha ne se retient pas. Elle la gifle et la pousse vers le coin de la pièce principale.
    -Si tu recommences, je te donne une fessée et je t’interdirais de sortir !
    - J’irais jouer quand je veux ! Et si tu le touches, je le dirai à papa !
    - Quand il reviendra, ta grand-mère se chargera de tout lui raconter ! réplique Aicha tout en aidant sa belle-mère à se lever. N’est ce pas que tu le feras ?
    - Si elle recommence, dit la grand-mère en se rappelant que son fils avait le même caractère, à son âge.
    Elle a encore mémoire des fois où il se bagarrait et rentrait à la maison avec des bleus et des égratignures. À chaque fois, les parents étaient venus se plaindre. Kadour promettait de ne plus recommencer mais il ne résistait pas à la provocation. Avec les garçons de son âge, toute discussion finissait avec les poings.
    Si Zahia avait été un garçon…
    - Si tu recommences, je lui dirais tout, répète-t-elle d’une voix plus douce et sans rancune. Promets-moi !
    L’enfant se jette dans ses bras et le promet tout en pleurant.
    - Pourquoi tu lui donnes raison ? La photo est pour moi et toi !
    - Tu n’en démords pas ! Ma petite, ton sale caractère compliquera ta vie ! Vois comme tes cousines, comme les filles des voisins sont obéissantes et polies! Pourquoi tu ne prends pas exemple sur elle ?
    L’enfant se redresse et affirme pouvoir le faire. – Avec toi, avec tout le monde, dit elle. Sauf Elle!
    Elle porte la main, à sa joue encore marquée par la gifle.
    - Tu le regretteras un jour ! la menace-t-elle. Tu entends ? Tu le regretteras !

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  3. Artisans de l'ombre Dit :

    4eme partie

    Aïcha savait que la petite lui en voudrait. Ses menaces, elle ne les prend pas au sérieux. Que pourrait-elle faire contre elle ?
    Elle est habituée à ses cris et à sa jalousie. Elle la comprend mais il y a des jours où elle est insupportable. Elle l’enfermerait bien avec les chèvres, pendant des heures, mais elle n’en a pas le cœur. Elle espère qu’un jour, elle se calmera. Les filles de son âge sont si douces, si obéissantes. Elle se doute bien que la perte de sa mère l’a traumatisée et qu’elle veuille son père rien qu’à elle.
    Elle pourrait être adorable si elle faisait un effort. Elle est belle. Elle a la peau claire et elle a les mêmes yeux bleus que sa grand-mère. Elle sera une belle jeune fille. En ce moment, elle est maigre. Toutes sont maigres.
    Les temps sont durs et elles ne mangent pas à leur faim. Les chèvres ne donnent plus assez de lait pour pouvoir l’échanger contre de la nourriture. L’épouse de l’épicier n’avait plus besoin de couverture de laine ou avait trouvé quelqu’un d’autre pour les lui tisser.
    Heureusement pour elles, la guerre prend fin et chaque jour, Kheïra se rend au village pour avoir des nouvelles. Elles sont sans nouvelle de Kadour et elles prient pour que la mort l’ait épargné.
    Les retours des moujahidine auprès de leur famille sont fêtés, et à chaque fois, elle se rend chez eux. En les voyant, elle en profite pour leur demander s’ils ont vu ou pas son fils. Elle est heureuse pour leur mère, leur femme. Ceux qui ont des enfants ne les reconnaissent pas. Mais ils sont si heureux de se retrouver qu’elle pleure. Elle voudrait connaître le même soulagement que leur famille, la même joie.
    Elle se sent faible, prête à partir. Elle voudrait partir le cœur tranquille. Après avoir revu son fils et l’avoir serré dans ses bras.
    Si Dieu lui prête longue vie, elle espère tenir ses enfants. Ceux qu’il aura…
    -Non, on ne le connaît pas !
    Elle leur montre la photo de son fils et de ces compagnons de guerre. Ils ne le reconnaissent pas.
    -Ce n’est pas possible ! Quelqu’un doit bien le connaître ! Il était au maquis comme vous…
    - Le pays est grand et peut-être qu’il activait dans une région lointaine, lui dit l’un des revenants. Peut-être que c’est ce qui explique pourquoi il tarde à rentrer ?
    - Peut-être qu’il est blessé ? émet elle.
    - Non, non, tentent-ils de la rassurer.
    - Il est certainement mort, en martyr, murmure Kheïra. Je voudrais seulement savoir s’il est en vie ou pas ! Aidez-moi à le retrouver ! Ya-t-il un endroit où je puis me renseigner ?
    Quelqu’un, pris de compassion, propose de faire la tournée des hôpitaux, même lointains. Dès le lendemain, il prend la route. Kheïra voudrait l’accompagner mais il refuse. Elle est vieille et faible. Elle ne supportera pas le voyage.
    - Mais je vous promets de vite revenir ! dit-il. si je le trouve à l’hôpital, je reviens vous chercher !
    - Inch Allah…
    Kheïra espère qu’il soit en vie. Il a servi le pays. S’il est mort en martyr, elle mourra fière de lui. S’il est en vie, il fera le bonheur de sa petite famille. Cela se comprend. Avant tout, elle est une mère…

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  4. Artisans de l'ombre Dit :

    5eme partie

    -Je ne voudrais pas mourir sans l’avoir revu…
    Kheïra espère de toutes ses forces que son vœu le plus cher se réalise. Les jours passent et elle ignore toujours si son fils est vivant ou mort en martyr. Amar, le moudjahid, n’est pas revenu et il lui arrive parfois de penser que s’il ne le trouve pas, c’est parce qu’il est mort.
    Tout comme elle, Zahia et Aïcha attendent le retour d’Amar. Zahia ne tient plus en place. Sans raison, elle se met à pleurer. Un rien l’énerve. Elle s’en prend alors à sa belle-mère.
    Celle-ci a beau être tendue, elle s’efforce de ne pas en tenir compte. Elle comprend la peur inavouée de la petite. Si elle se montre aussi agressive, c’est pour cacher sa sensibilité.
    - S’il est mort, il sera l’unique martyr de la famille ! Tu pourras être fière de lui !
    - Non, je ne veux pas qu’il soit martyr, dit Zahia. Je veux qu’il revienne ! Je veux mon papa ! Je veux mon papa !
    Elle ne se rend pas compte que sa grand-mère est en train de soupirer bruyamment.
    Aïcha accourt vers elle et la redresse sur sa couche. Elle ne comprend pas ce qui lui arrive.
    - Khalti ! Khalti…
    Mais Kheïra ne parvient pas à retrouver une respiration régulière. Sa main s’accroche à la sienne.
    -Prends-en soin, murmure-t-elle. N’entres pas dans son jeu. Ce n’est qu’une enfant…
    -Tu es là, pour prendre soin d’elle ! Avec toi, il ne peut rien lui arriver ! Moi, je suis sa belle-maman et je suis loin d’être la personne qu’elle adore ! Alors reste ! Pour elle…
    - Je me sens partir, murmure la grand-mère en jetant un coup d’œil circulaire dans la pièce principale. Donnes-là moi !
    Du regard, elle désigne la photo. Aïcha va la décrocher du miroir. Des larmes brillent dans ses yeux.
    -Mon fils…
    Les larmes coulent sur ses joues creuses.
    - Lorsqu’il reviendra, dis-lui combien je l’aime…
    Aïcha pleure, tremblante à l’idée qu’elle puisse mourir. Elle regarde Zahia et tend la main vers elle.
    - Approches-toi ! Ta grand-mère voudrait…
    La fille la regarde, aussi apeurée qu’elle. Elle tombe près d’elle et prend sa main. De l’autre, elle tient la photo contre son cœur.
    - Promets-moi, lui murmure-t-elle, d’écouter Aïcha. Même si elle se fâche après toi, elle t’aime. Ne l’oublie jamais…
    - Qu’est-ce qui t’arrive ? Pourquoi tu me dis ces choses-là ? Je sais que tu es la seule à m’aimer !
    - C’est vrai, je t’aime ! Mais moi, je vais partir ! Sois forte ma fille…
    - Non ! Non…
    Aïcha prend un pichet d’eau et l’aide à boire une gorgée. Le doigt levé, elle prie une dernière fois avant de fermer les yeux. Aïcha se penche au dessus d’elle, voulant vérifier si elle a rendu son dernier souffle quand la porte de la cour est ouverte bruyamment. Quelqu’un vient de la pousser…
    Zahia se lève d’un bond, pour voir qui c’est. Elle pousse un cri de surprise avant de s’élancer en criant :
    - Papa ! Papa !

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  5. Artisans de l'ombre Dit :

    6eme partie

    -Khalti ! Khalti ! Il est vivant ! Il est revenu…
    Kadour vient d’entrer, suivi de Zahia.
    - Qu’est-ce qui se passe ?
    -Ta mère est mal… On ne croyait plus à ton retour !
    Kadour tombe à genoux, près de sa couche. Kheïra a les yeux fermés et elle ne respire pas.
    -Je suis là ! Je suis vivant… ouvres les yeux !
    Il caresse son visage puis prend sa main. Il saisit son pouls mais il ne sent aucun battement. La peine le saisit. Il n’aura pas eu la chance de la revoir vivante.
    Il s’appuie contre son épaule. Il veut respirer son odeur, sentir le peu de chaleur qui lui reste. Il est là, contre elle quand il voit Aïcha et Zahia reculer, les yeux écarquillés.
    Il se redresse et il peut voir sa mère, les yeux ouverts. Deux larmes coulent lentement sur ses joues.
    Kadour se met à pleurer. Il ferme les yeux de sa mère et il sort de la maison. Kheïra et Zahia pleurent. Elles n’ont pas le temps d’apprécier son retour parmi elles.
    La mort de Kheïra fait vite le tour du village. Lors de la veillée funèbre, on raconte à Kadour combien elle était impatience de le revoir. Tous se rappellent sa visite. À chaque fois qu’elle apprenait qu’il y avait un revenant, elle n’hésitait pas à leur demander des nouvelles. Elle s’étonnait qu’ils ne le connaissent pas.
    Quand Aïcha raconte qu’elle a versé des larmes alors qu’elle était morte, tous comprennent sa joie, son soulagement.
    - Elle t’adorait…
    - Elle pensait à ta fille. Comment va-t-elle ?
    - Malheureuse, répond-il. Elle était tout pour elle. Sa grand-mère, sa mère, son amie…
    -Il faudra être patients avec elle, conseille un cousin. Elle l’a gâtée. Allez-y doucement avec elle !
    Kadour promet de prendre soin d’elle. Quand il le pourra. Quelques jours après, il part en ville, à la recherche d’un travail. Il ne peut pas rester à la maison à se morfondre. Si elles ont pu supporter leur vie misérable, lui ne le peut pas. Il est là pour la chasser de leur vie. Il veut de jolies robes pour Zahia et sa femme. Il veut pouvoir remplir le couffin.
    Il va d’un café à un autre, d’un chantier à un autre. Il ne trouve pas tout de suite de travail.
    - Si vous avez besoin d’aide, n’hésitez pas à m’appeler !
    En proposant son aide, il ne s’attend pas à trouver du travail. Le collège recherchait un surveillant. Le fait qu’il sache écrire et lire le tire de l’embarras. Il remplit le formulaire d’embauche et le voilà surveillant.
    Fou de joie, il passe par l’épicerie et achète de quoi faire un bon dîner. Aïcha et Zahia partagent sa joie. Son seul souci est qu’il ne pourra pas arriver à l’heure. Le village est loin de la ville et il doit être à sept heures au collège.
    - Si je reste là-bas, toute la semaine je n’aurais aucun problème à mon travail vu que je n’arriverai jamais en retard… Si je rentre chaque soir, pour être avec vous, je prends le risque de ne pas trouver de transport et d’être en retard !
    - On pourrait s’installer en ville, dit Zahia. Comme ça, on ne sera plus jamais séparés ! Qu’en dis-tu ?
    Kadour hoche la tête. Il y a bien pensé, mais où habiter en ville ? Il soupire, espérant trouver une solution à leur problème car il ne tiendrait pas longtemps avec ces allers-retours quotidiens au village…

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  6. Artisans de l'ombre Dit :

    7eme partie

    Kadour n’aura pas cherché longtemps où vivre. Le directeur de l’établissement à qui il s’est confié lui propose d’aller en pension avec sa famille.
    - Mes parents vivent dans une grande maison… Ils n’ont personne pour s’occuper d’eux et de l’intérieur. Tout ce que votre femme aura à faire, c’est de s’occuper d’eux…
    - Aucun problème. Elle saura prendre soin d’eux, affirme Kadour. Quand parlerez-vous à vos parents ?
    - Dès ce soir, répond le directeur Amari. Quand veux-tu emménager ?
    -Je ne sais pas. Quand vos parents voudront !
    -Mes parents ne sont pas un problème. En fait, en acceptant, vous leur rendez service, insiste le directeur. Demain matin, je vous attendrais chez mes parents.
    Kadour n’en revient pas. Tout allait vite. Il n’aurait pas le temps d’emménager en une nuit.
    - Vous êtes libre de rentrer chez vous pour préparer vos affaires. Je vous attendrais devant la maison !
    Il lui donne quelques repères et explique comment trouver la maison.
    Kadour le remercie et rentre au village l’heure qui suit. Aïcha est surprise de le voir rentrer si tôt. Elle s’inquiète.
    - Qu’y a-t-il ? Ils t’ont remplacé par quelqu’un d’autre ?
    - Non. On part vivre en ville…
    - Je n’ai pas compris !
    Kadour encore tout excité lui rapporte tout. Aïcha crie de joie. Zahia ne tient pas en place.
    - On va vivre en ville ? Est-ce que j’irai à l’école ?
    - On verra ce que tu pourras faire ! promet-il. Allez ! Aides-nous à tout ranger !
    Aïcha étend un grand haïk et y met ses vêtements et ceux de Zahia. Dans un vieux coffre en bois, elle range les couvertures en laine. Kadour refuse de prendre la vieille vaisselle.
    Comme ils n’ont ni lit ni meuble, il loue une camionnette bâchée. Le lendemain matin, ils partent de très bonne heure.
    Le chauffeur situe vite le quartier et il s’arrête devant une grande maison dont le portail est grand ouvert. Kadour n’est pas encore descendu qu’Amari vient à eux. Il les accueille chaleureusement.
    Il les emmène à ses vieux parents, déjà débout. Ils les mettent vite à l’aise.
    Aïcha et Zahia sont emmenées à leur chambre. Elle est située au fond du couloir. La villa est spacieuse. Elle appartenait à un vieux colon. Avant…
    - Je n’ai jamais vu d’aussi beaux meubles ! s’écrie Aïcha. On a aussi un lit…
    - Où vais-je dormir ? demande Zahia.
    - On va t’installer un petit lit, dans le coin.
    Kadour entre, dépose leurs affaires. Amari lui donne un coup de main.
    - S’il vous manque quoi que ce soit, leur dit-il. Servez-vous !
    - Je n’ai pas de lit, se plaint Zahia.
    -Tu auras ta propre chambre, lui dit Amari. Viens…
    Il précède Zahia dans une autre pièce. Aïcha n’en revient pas.
    -Qu’est-ce que je dois faire ?
    Kadour répond simplement.
    - Prends soin des vieux. Il ne te manquera rien… Elle perd son sourire, pensant qu’il lui manque l’essentiel. Elle prie au fond de son cœur pour que ce changement dans leur vie lui apporte ce qu’elle a toujours souhaité. Un fils…

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  7. Artisans de l'ombre Dit :

    8eme partie

    Le fait de travailler pour ces vieux qui ne sont pas ses beaux-parents et de prendre soin d’eux ne la dérange pas. Aïcha fait tout avec plaisir. Elle passe son temps entre les corvées et la cuisine. Elle tient compagnie aux vieux quand elle a le temps.
    Elle est heureuse dans leur nouvelle demeure. Elle vit en ville et bon nombre de cousines l’envierait presque. Kadour s’occupe d’elle, lui offre de jolies tenues. Il l’a emmenée en promenade plus d’une fois. Bien entendu, en compagnie de Zahia. Elle trouve celle-ci comme prétexte pour l’inciter à les emmener. Pour lui choisir une robe, des chaussures. Kadour a demandé à une dame enseignant la couture, chez elle, de prendre Zahia. Elle n’est pas en âge d’aller au primaire mais elle peut encore apprendre à se servir de ses dix doigts.
    Grâce à une relation de son responsable Amari, elle se rend aussi à l’école primaire où sa présence est tolérée. Elle peut encore apprendre à lire et à écrire.
    - Dommage qu’elle ne soit plus en âge de poursuivre une scolarité comme les enfants ! Je pense qu’elle aurait été une bonne élève ! De quoi faire la fierté de la famille !
    - J’espère te donner un fils beau et brillant ! Mais Dieu tarde à concrétiser mon rêve…
    - Un jour, on aura des enfants !
    - Peut-être que si tu m’emmenais voir un médecin ? Ce jour se rapprocherait, émet Aïcha. Je t’en prie, emmène-moi en voir un ! Si j’ai besoin d’être soignée, c’est maintenant !
    - D’accord ! D’accord…
    Quelques jours après, ils se rendent chez un médecin qui lui prescrit un traitement de trois mois. Il les reverra après.
    Un temps suffisant pour qu’elle tombe enceinte. Elle est folle de joie. Elle n’en revient pas. Toutes ces années de perdues, pense-t-elle. Elle allait enfin avoir un enfant. Si Dieu écoute ses prières, elle aura un fils. Mais même une fille fera son bonheur.
    Zahia ne saute pas de joie. Aïcha commence à se plaindre de douleurs dorsales. Elle lui demande de rester à la maison. Elle a besoin d’elle.
    - Il faut bien que quelqu’un fasse le ménage, dit-elle à son mari. Je peux toujours m’occuper de la cuisine !
    - Et mes cours, à l’école ? s’inquiète Zahia. Je commence à peine à me débrouiller seule en lecture !
    - Et il y a les vieux, lui rappelle Aïcha. Si l’on ne prend pas soin d’eux, ton directeur t’en voudra !
    - Je sais.
    Zahia n’apprécie pas qu’il prenne le parti de sa femme. Si entre elles, les choses s’étaient calmées, c’est tout simplement dû au fait qu’elles ne se voyaient qu’en fin de journée. Tout est prétexte à la querelle et en voulant la garder à la maison uniquement pour qu’elle s’occupe de la maison, Aïcha est loin de se douter que cela recommencerait de plus belle.
    Zahia ne tient pas en place. Elle est énervée. Elle n’en revient pas que son père n’ait pas pris sa défense.
    - Je ne deviendrais pas une bonne ! Je continuerais de me rendre chez la couturière !
    Kadour lève un doigt menaçant vers elle.
    - Ne t’avise pas à le faire ! Tu ne reprendras les cours que lorsque je l’aurais décidé !
    - Parce qu’un jour, je les reprendrais ?
    - Lorsqu’Aïcha ira mieux…
    - Mais si elle ne va pas mieux ! Et si elle se met à simuler juste pour pouvoir se reposer sur moi, émet Zahia. Qu’est-ce que tu décideras ?
    - Tu le sauras, ce jour-là ! promet-il. Mais avant, je dois compter sur toi, pour que tout se passe bien ici !
    Zahia secoue la tête. Elle n’est pas prête de les écouter et encore moins de laisser sa belle-maman couler des jours tranquilles. Elle refuse de devenir sa bonne…

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  8. Artisans de l'ombre Dit :

    9eme partie

    Zahia a beau se rebeller, trouvant la décision de son père injuste. Elle ne comprend pas qu’il puisse accepter de la priver de ses cours. Elle se rappelle le temps où il la défendait bec et ongles. Il lui avait toujours donné raison. Pourquoi ce revirement maintenant ? Elle aura quatorze ans et alors qu’elle n’aspire qu’à la liberté, la voilà forcée de rester à la maison.
    La première journée est terrible. Et les suivantes encore plus. Elle ne supporte pas les remarques de sa belle-maman qu’elle a toujours derrière le dos. Pour la ramener sur terre, pour lui ordonner de faire ceci ou cela.
    - Ne me parle pas comme ça !
    - Si tu faisais ce que je te dis, je n’aurais pas à te surveiller !
    - Et comment ? Tu n’as pas mal au dos pour me trouver et crier après moi mais pour le faire toi-même, c’est une autre histoire ! Tu te sers de ce prétexte pour te rouler les pouces !
    - Ce n’est pas toi qui cuisines !
    Zahia a un sourire ironique.
    - Je t’épluche les légumes. Je prépare la pâte à lever… Qu’est-ce que tu fais réellement depuis que je suis coincée ici ?
    - Je garde un œil sur toi, sur ce que tu fais, réplique Aïcha. Et je tiens un peu compagnie aux vieux… Tu oublies que c’est grâce à eux qu’on vit en ville !
    - C’est grâce à nous s’ils ne meurent pas de faim ! Si la poussière et l’humidité…
    - Chut ! Parles moins fort ! ordonne la belle-maman. Chacun y trouve son compte ! ajoute-t-elle doucement. On vit dans une villa bien meublée. On ne manque de rien…
    -Oui, toi… Mais moi, je suis là, à trimer pour rien ! Ces gens ne sont pas notre famille ! On ne sera jamais chez nous, crie Zahia. Lorsqu’ils ne seront plus satisfaits, ils nous mettront à la porte ! En fait, tu as tellement peur de retourner au village que tu préfères me sacrifier !
    Aïcha s’emporte.
    - Arrêtes de crier !
    - J’en ai marre ! Je crierais si je veux !
    La belle-maman lui donne deux gifles. Zahia ne se laisse pas faire. Elle la pousse et Aïcha tombe en arrière. Elle crie de douleur. Elle voudrait se lever mais n’y parvient pas.
    - Aides-moi à me relever !
    - Non !
    - Aides-moi, je t’en prie ! Je n’y parviendrais jamais seule, soupire Aïcha, en se mordant la lèvre, pour ne pas crier. J’ai mal. J’ai mal…
    Zahia prend peur. Elle voudrait l’aider. Elle voit bien sa souffrance, sur son visage. Lorsque son père saura, il ne sautera pas de joie. D’ailleurs, leurs cris ont attiré l’attention des vieux, dans le salon. Elle entend quelqu’un marcher vers la cuisine.
    - Tu sais de quoi je suis capable. Jures-moi de ne rien dire à mon père !
    - Oui, oui ! Je te le jure…
    - Je suis capable de recommencer si tu oses le lui dire, un jour, la menace Zahia en l’aidant à se relever.
    À la vieille qui s’est trainée jusqu’à la cuisine, Aïcha ment.
    - J’ai eu un malaise, dit-elle en peinant à se redresser. Ma grossesse s’annonce difficile !
    - La jeune aussi ! Vous vous êtes querellées !
    Aïcha s’empresse de la contredire. Juste une discussion où elles se sont lâchées. Parce qu’elles se sentent si bien ici comme si elles étaient chez elles…

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  9. Artisans de l'ombre Dit :

    10eme partie

    À la maison, cela se passe mal. Au bout de quelques jours, Zahia ne se calme pas lorsque sa belle-maman lui ordonne de ne pas crier. Aïcha la gifle et Zahia la pousse si violemment qu’elle tombe. Elle ne parvient pas à se relever seule. Zahia menace de s’en prendre à elle si elle dit un mot de ce qui s’est passé…
    Les vieux parents d’Amari ne parlent pas de cette matinée agitée. Aicha garde plusieurs jours le lit avant de faire une fausse couche où elle a failli y laisser la vie. Zahia n’a pas conscience d’en être la cause.Leurs familles viennent leur rendre visite et elle peut entendre les femmes commenter.
    -Elle n’est plus jeune. C’était prévisible!
    -Elle passe son temps, à trimer, dans la villa et les vieux ne lui donnent jamais de repos, dit une autre.
    -J’ai arrêté les cours de couture, pour l’aider, confie Zahia. C’est vrai, je ne voulais pas mais je n’avais pas le choix. Il le fallait…Papa tenait à ce que je la soulage des corvées!
    Les femmes échangent un regard. Leur animosité est légendaire.
    -Dis, ici, tout se passait bien?
    -Oui, répond Zahia. Très bien même…
    Aicha sans sourire, confirme. Elle ne peut s’empêcher de pleurer.
    -Je voulais tant l’avoir. Pensez-vous que je puisse en avoir un autre?
    -Oui. Maintenant que tu as eu cette première grossesse, tu as plus de chance d’en avoir d’autre! Seulement, il faudra te reposer…Suivre nos conseils…
    -Oui.
    Zahia s’en va préparer du café et en n’en trouvant plus dans la boîte, elle retourne à la chambre afin de leur proposer du thé. Les brides de leur conversation qui lui parviennent, la glacent.
    -Vous vous êtes réellement calmées au point d’avoir une vie tranquille toutes les deux?
    -Il le faut bien, répond Aicha, en reniflant.
    -On connait son mauvais caractère et le fait d’avoir été gâtée, pour ne pas dire « pourrie », dit sa parente. On a encore en mémoire la guerre qu’elle te menait et j’ai dû mal à croire qu’elle ait changé au point de s’adoucir!
    -Si! Si!
    Mais il n’y a aucune conviction dans sa voix. Aicha est lasse. Ce qui lui est arrivé après tant d’années d’attente, la peine profondément. Elle a perdu son sourire et elle ne cesse de soupirer.
    Elle ne sera plus comme avant.
    -Ecoute, si elle est pour quelque chose, dans ton malheur, tu dois le dire !la presse une cousine. Son père doit savoir qu’il a eu un monstre! Une égoïste sans scrupule, sans cœur!
    Zahia a la chaire de poule. De la porte entre ouverte, elle regarde sa belle maman comme pour lui rappeler sa promesse. Ou sa menace…
    Elle ne veut pas contrarier son père.
    -Non, elle a vraiment changé…quand elle reviendra, demandez lui de vous montrer ses broderies et les tenues pour bébé qu’elle a cousues à la main, leur dit elle. Elle est appliquée…Elle fait de belles choses!
    -Cela n’empêche pas qu’elle ait un mauvais caractère!
    Aicha hausse les épaules. Elle ferme les yeux. Elle a envie d’oublier, de ne pas parler, d’être seule, pour pouvoir pleurer sans avoir à susciter la peine de ses proches…

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  10. Artisans de l'ombre Dit :

    11eme partie

    -Ouf ! Zahia est soulagée. Sa belle-maman n’a rien dit à personne, pas même à sa mère, de ce qui s’est passé. Les conversations qu’elle a entendues durant les visites finissent par la culpabiliser. Elle réalise qu’elle en est la cause. Elle n’en dort plus.
    Plusieurs fois, elle rêve que son père la bat. Il est si furieux après elle qu’il ne veut plus lui adresser la parole. Elle n’en supporte pas l’idée même. Elle ne veut pas que cela arrive. Elle n’a que lui, et s’il se détourne d’elle, elle en tombera malade.
    Le cœur rongé par les remords, un matin où Aïcha s’est levée pour préparer le petit-déjeuner, elle la rejoint à la cuisine.
    -Pourquoi te lever de si tôt ? lui reproche Zahia. J’étais prête à le faire !
    - Je me sens mieux.
    - Tu sais… Je regrette ce qui est arrivé !
    - Les regrets ne changent rien à la situation, murmure Aïcha. Je l’ai perdu… Tes regrets…
    -Non, non. Je te jure que je regrette, insiste Zahia. Si tu retombes enceinte, je te jure de prendre soin de toi !
    - En me stressant, en me bousculant sous prétexte que ce que je te dis ne te plaît pas ! réplique Aïcha. Je me passerai volontiers de tes soins !
    - Je te jure que les regrets et les remords me rongent ! Je voudrais te le prouver !
    - Laisses-moi en paix ! C’est tout ce que je te demande, répond la belle- maman. Je ne veux plus de querelle entre nous ! J’ai conscience que tu ne m’aimeras jamais, mais je ne te demanderai qu’une chose : me laisser tranquille !
    - Jamais plus ! Je te jure que jamais plus cela n’arrivera !
    Aïcha la regarde dans les yeux, prise au dépourvu par son sérieux. Elle réalise que Zahia tient vraiment à ce que tout se passe mieux entre elles. Elle sent qu’elle est sincère.
    - Vraiment ? Tu as grandi en une nuit ?
    - Oui. Il était temps, murmure Zahia. Tu aurais pu te briser le dos ! Ou même en mourir !
    - Oui, cela aurait pu être plus grave, en convint Aïcha. Je suis heureuse que tu en ai pris conscience ! À partir de maintenant, plus rien ne sera comme avant !
    Elle ne se trompe pas. Zahia s’est calmée, et soucieuse de se rattraper, elle n’attend plus les ordres. Elle fait tout d’elle-même.
    Pour se faire un peu d’argent, elle accepte de broder des robes pour bébés. Elle fait aussi du crochet. Elle passe son temps entre les corvées qu’elle s’arrange de vite finir afin de se consacrer à ce qui est devenu son travail.
    Au bout de quelques mois, elle a une petite somme qui lui permet de s’offrir une parure en argent ainsi qu’une jolie tenue de sortie. Elle achète aussi un cadeau à son père et à Aïcha.
    Cela leur fait plaisir. Elle est heureuse. Elle a obtenu le pardon de sa belle-maman. Tout se passe bien entre eux.
    Les jours s’écoulent dans la paix. Lorsqu’Aïcha découvre qu’elle est de nouveau enceinte, elle se demande si Zahia continuera d’être aussi gentille et attentionnée. Si cet évènement ne réveillera pas sa méchanceté gratuite. Celle qu’elle a subie pendant des années…

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  11. Artisans de l'ombre Dit :

    12eme partie

    Aïcha hésite à lui apprendre la nouvelle. Elle est folle de joie mais elle s’efforce de ne rien laisser paraître. Elle n’en dit rien à Kadour car si elle lui demande de ne pas répandre la nouvelle, il ne comprendra pas. Il n’a jamais accepté l’idée que Zahia puisse être jalouse d’elle. Ce devait être pour cette raison aussi qu’il prenait toujours sa défense. Elle a toujours obtenu ce qu’elle voulait. Certes, elle n’est pas retournée en classe et aux cours de couture, mais il l’accompagne souvent en ville. Pour s’approvisionner en soie et en fils. Elle a des clientes qui redemandent des articles. Son commerce marche bien. Aïcha peut la voir sourire, tout en travaillant.
    Elle est souvent tentée de lui confier que la famille allait s’agrandir. Mais elle redoute sa réaction.
    Entre-temps, plusieurs semaines passent. Son ventre commence à s’arrondir. Zahia, fort occupée, n’a rien remarqué. Un matin, Aïcha se réveille avec des contractions. Elle ne parvient pas à quitter le lit. Zahia est levée depuis un moment. Elle a pris le petit-déjeuner avec son père, a servi les vieux puis a entamé le ménage sans attendre. Ce n’est qu’une fois devant la chambre qu’elle entend des gémissements. Sa belle-maman est pâle et se tord de douleurs.
    - Qu’est-ce qui t’arrive ?
    - Je ne sais pas…
    - Tu veux que je t’apporte un calmant ?
    - Non… Oui !
    Aïcha est en larmes. Elle serre les dents. À bout de souffle, elle lui demande :
    - Va chercher na Fathma… Va la chercher ! Cours…
    Zahia la regarde longuement, se rappelant que na Fathma était une sage-femme et qu’elle aide les femmes à leur domicile à mettre au monde les enfants. Son ventre qui rebondit sous le drap la frappe soudain.
    - Tu es enceinte !
    - Non… Je ne sais pas… Je t’en prie, cours la chercher !
    - Tu savais ! Tu ne peux pas être enceinte et ne pas le savoir ! réplique la jeune fille. Pourquoi n’as-tu rien dit ?
    - Je ne savais pas…
    - Je ne te crois pas !
    Aïcha, le souffle coupé par la douleur, lève les yeux, au plafond.
    - Tu vas la chercher ou non?
    - J’y vais.
    Zahia se rappelle d’une cousine, morte en couche. Elle ne peut prendre le risque de la laisser sans aide. Sans même mettre un gilet, sur ses épaules, elle sort dans sa robe d’intérieur. Elle court chercher la vieille na Fathma.
    - J’ignorais qu’elle était enceinte ! remarque celle-ci tout en jetant un châle sur ses épaules.
    - Je crois qu’elle ne le savait pas, réplique Zahia tout en prenant son sac. Faisons vite ! Je ne voudrais pas qu’il lui arrive malheur !
    Toutes deux pressent le pas. Lorsqu’elles arrivent auprès d’Aïcha, celle-ci est inconsciente…

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  12. Artisans de l'ombre Dit :

    13eme partie

    -Je ne peux rien faire pour elle ! Je ne veux pas avoir de problème!
    Na Fathma lui demande d’apporter de l’eau et une serviette. Elle la mouille et lui rafraîchit le visage. Aïcha ouvre doucement les yeux mais pas longtemps.
    - Vite ! Cours chercher ton père !
    Zahia, paniquée, sort de la villa en courant. Les vieux ont remarqué son départ en coup de vent mais ils n’ont pas la force de la suivre. Dehors, elle regarde à droit puis à gauche. À pied, elle n’y parviendra pas avant une demi-heure. Qui sait ce qui peut se passer entre-temps ?
    Elle va à la route principale qui mène au centre-ville et stoppe une voiture. Elle prie le conducteur de l’emmener au lycée où travaille son père.
    - Qu’y a-t-il de si urgent ?
    -Ma mère… enfin, la femme de mon père, elle n’est pas bien, lui dit-elle. On doit l’emmener à l’hôpital ! Elle a perdu connaissance !
    Le conducteur trouve plus logique d’emmener la malade à l’hôpital en premier. Puis ils iront chercher son père.
    -Oui, on commence par elle !
    Zahia lui montre le chemin, menant à la villa. Aïcha est encore inconsciente lorsqu’ils la portent à la voiture. Zahia la garde appuyée contre elle, et elle a beau lui parler et lui caresser les cheveux, elle ne bouge pas. Durant tout le trajet jusqu’à l’hôpital, elle ne remue même pas les paupières.
    Ils ont de la chance, aux urgences, elle est vite prise en charge. Zahia est pâle comme un linge.
    - Est-ce qu’elle va mourir ?
    - Non, la rassure le médecin. Vous êtes sa fille ?
    -Non, c’est… c’est ma belle-maman… Elle croit être enceinte, ajoute-t-elle. Sauvez-les ! le prie-t-elle.
    Le bon samaritain lui fait signe. Elle attend que sa belle-maman soit emmenée sur un brancard pour le rejoindre.
    - Je vous emmène au lycée, propose-t-il.
    Zahia pleure. Elle ne veut pas quitter l’hôpital.
    - Est-ce que vous pouvez vous y rendre sans moi ? Je ne voudrais pas la quitter, lui dit-elle. Vous comprenez ?
    -Oui. J’y vais tout de suite.
    Il part sans perdre une seconde. Elle le regarde partir puis va s’asseoir sur le banc, dans le hall. Ses yeux ne quittent pas la porte des soins d’urgence. À chaque fois qu’une infirmière pousse la porte, elle vers elle.
    -Elle est revenue à elle ?
    -Oui, ne vous inquiétez pas, lui dit l’infirmière. Elle est entre de bonnes mains !
    Zahia soupire de soulagement.
    - Allez vous asseoir ! Dès qu’ils auront fini, je viendrais vous chercher !
    Zahia retourne s’asseoir. Elle tremble. Elle a peur pour Aïcha. Jamais auparavant, elle n’a ressenti la peur de la perdre. Elle s’en veut de ne pas l’avoir écoutée sur-le- champ. Elle l’a interrogée comme si elle avait des comptes à lui rendre. Elle ne l’avait pas cru.
    Lorsque son père arrive en courant, elle se jette dans ses bras et pleure.
    -Qu’est-il arrivé ?
    -Je ne sais pas… Le médecin est en train de l’examiner…
    -Bien. Espérons que ce n’est rien de grave !

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  13. Artisans de l'ombre Dit :

    14eme partie

    -Pourquoi trembles-tu ?
    - Je ne sais pas… Elle avait mal…
    Ne sachant toujours pas de quoi souffre sa femme, Zahia est contrainte d’expliquer à son père. Ce dernier est aussi surpris qu’elle.
    - Elle ne peut pas être enceinte ! Je l’aurais su !
    - Peut-être qu’elle l’ignorait ?
    - Ce n’est pas possible…
    Pourtant, lorsque le médecin ressort, il leur apprend qu’elle est revenue à elle.
    - Elle est dans la salle de travail. Avec un peu de chance, tout se passera bien.
    - Sa grossesse est à terme ?
    - Oui. Ne vous inquiétez pas… Elle est entre de bonnes mains !
    Kadour soupire en secouant la tête. En leur confirmant qu’elle est bel et bien enceinte et sur le point de mettre un bébé au monde, ils réalisent que la famille n’est pas prête à accueillir un nouveau-né.
    - Toi, tu restes ici, décide-t-il. Je sors acheter… Qu’est-ce que je dois acheter ?
    - Tu achètes des vêtements de rechange, pour Aïcha et pour le bébé, tout ce qu’il faut ! Une petite couverture aussi, ajoute-t-elle tout en le suivant dehors. Un bonnet !
    - Tu dois en avoir, dit son père. Je t’ai vu en tricoter !
    -Ils ont été vendus, répond-elle en souriant. Mais je te promets d’en tricoter d’autres ! Pour lui ou pour elle…
    Kadour sourit.
    - Inch’Allah que ce sera un garçon !
    - Oui. Je l’espère aussi !
    Il part promettant de vite revenir. Zahia retourne dans le hall et s’assoie sur le banc. Près d’une heure passe avant qu’il ne revienne, avant que le médecin ne vienne leur apprendre que tout s’est bien passé.
    - Félicitations, vous venez d’avoir une fille !
    - Ma femme, elle va bien ? demande Kadour.
    - Oui, elle s’en remettra.
    - Est-ce qu’on peut la voir ? J’ai apporté le nécessaire !
    - Une infirmière viendra vous prévenir lorsqu’elle aura été emmenée dans une chambre !
    Ils remercient le médecin. Ce dernier va s’occuper d’un enfant malade porté par son père. Zahia et Kadour n’auront pas à attendre longtemps avant qu’une infirmière sort les appeler. Aïcha a été installée dans une chambre où il y a déjà deux autres femmes. Ces dernières ont accouché la veille. Elles se préparent à rentrer chez elles. Leurs bébés dorment dans leur lit.
    - Où est le notre ? demande Zahia, impatiente.
    - Elle va l’amener d’un moment à l’autre, murmure Aïcha avant de prendre sa main. Que m’est-il arrivée ?
    - Tu as perdu connaissance, répond Zahia, émue. J’avais eu peur de te perdre…
    - Tu viens de gagner une petite sœur !
    - Oui. C’est magnifique ! Je vais apporter à l’infirmière ces affaires ! Elle va en avoir besoin…
    Mais celle-ci arrive. L’infirmière l’a emmaillotée dans un drap. Elle la remet à Zahia qui en a le souffle coupé. Elle a peur de lui faire mal ou qu’elle ne lui tombe. Elle est si petite. Elle regarde les vêtements de bébé achetés par son père et elle pense qu’ils seront trop grands.
    - Je lui en ferai d’autres, à sa taille, dit-elle, émue. Je prendrai soin de toi !
    - Comment on l’appellera ? demande Aïcha.
    - On lui donnera le prénom de grand-mère, décide Zahia. N’est-ce pas papa ?
    Comment pourrait-il refuser ? Aïcha soupire de soulagement. Elle est rassurée. Zahia est émue de bonheur. Il lui suffit de voir son regard pour se dire qu’elle peut dormir tranquille. Sa fille a un ange gardien. Rien de mal ne pourra lui arriver en la présence de Zahia. Aïcha ferme les yeux, cédant à son envie de dormir…

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  14. Artisans de l'ombre Dit :

    15.
    -Ne pleure pas ! Je suis là…
    Zahia accourt vite à chaque fois qu’il lui semble que sa petite sœur s’est réveillée. C’est elle qui s’en occupe. Elle est très alerte. Au moindre bruit, elle va vérifier si tout va bien. La petite Kheïra tombe souvent malade. Elle est passée entre les mains de médecins et même de guérisseurs. Avec son père, elle l’a emmenée chez une vieille parente au village. Elle est herboriste. Depuis toujours, elle soigne les bébés et parfois même les grands.
    Elle leur a donné des tisanes et d’autres infusions. Zahia les lui donne en temps et en heure. L’une des infusions fait vomir le bébé et c’est une des raisons pour laquelle elle se rend auprès d’elle, au moindre bruit. Elle ne la laisse jamais pleurer. Elle s’en occupe comme si elle était sa mère. Elle la garde dans sa chambre. Même la nuit.
    Aïcha s’est remise tout doucement de son accouchement. Quelque temps après, les vieux sont tombés malades. Ils sont vieux et à peine l’hiver s’est-il annoncé que la grippe les terrasse. Ils ne s’en remettront jamais. Amari et sa famille viennent à leur chevet, craignant qu’ils ne partent sans les avoir vus. Ils les assistent jusqu’à leur dernière heure. La vieille mère les quitte en premier et trois semaines après, c’est au tour du vieux.
    La famille est en deuil. Aïcha doit les réconforter, s’occuper de la maison et des invités. Zahia l’aide beaucoup mais elle préfère ne pas l’accaparer. Quelqu’un doit s’occuper du bébé, et comme il fait froid, elle lui demande de la garder dans la chambre.
    Les veillées l’épuisent. Elle s’efforce à faire bonne figure, à ne pas s’endormir avant le départ des invités. Elle n’a jamais le temps de récupérer même si souvent, Zahia lui donne un coup de mains lorsque le bébé dort.
    - Je n’en peux plus, dit-elle à Kadour. Je ne pourrais pas supporte longtemps…
    - Patience ! Dans quelques jours, ils retourneront tous chez eux ! La vie va reprendre son cours normal… Tu récupèreras après !
    - J’ignore si je tiendrais jusque-là !
    - Dis ? demande-t-elle, inquiète. Vont-ils nous demander de quitter la villa ?
    - Non. Je ne pense pas.
    Aïcha ne peut s’empêcher d’y penser. Elle ne veut pas retourner au village. Ils sont si bien ici. Elle s’y plaît. S’ils décident de les mettre dehors, elle en souffrira. Elle veut que sa fille grandisse en ville, qu’elle fréquente l’école. Elle lui espère un grand avenir.
    Un soir de printemps, Amari vient les voir. Ils doivent discuter de la villa, de l’héritage de ses parents…

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  15. Artisans de l'ombre Dit :

    16.
    -Reste ! dit Amari à Aïcha qui s’apprête à sortir du salon après leur avoir servi une tisane. Toi aussi tu es concernée…
    Aïcha regarde son mari. Kadour hoche la tête. Elle prend place près de lui.
    - Vous avez fait beaucoup de bien à mes parents, de leur vivant… Vous n’avez jamais manqué à vos devoirs !
    - Si, au début, c’était une condition pour pouvoir vivre ici, dit Kadour. Par la suite, c’était naturellement… – Ils étaient bons. Allah irhamhoum, ils étaient faciles à vivre ! Tout ce qu’on a fait, c’était avec plaisir !
    - Ils ont fini leur vie tranquilles et en paix. Je vous en suis reconnaissant, dit Amari. Si je suis venu ce soir, c’est pour nous entendre sur la villa ! Je ne peux pas l’habiter. Je ne veux pas la vendre… J’ai une proposition à vous faire !
    - Une proposition ?
    - Oui. Je ne veux pas que vous partiez. Vous en avez pris soin comme si elle est la votre, poursuite Amari. Je vous propose d’en garder une moitié. L’autre, je la fermerais. Peut-être que mes enfants voudront y vivre, plus tard ?
    - En effet.
    -Donc, voilà… La moitié de la villa est à vous. Je vous la donne de bon cœur, dit-il. Vous pouvez travailler le jardin…
    Aïcha n’a pas encore compris. Kadour voit bien qu’elle se pose des questions.
    - Dis ce que tu as sur le cœur !
    - Cette partie sera à nous, jusqu’à quand ? demande-t-elle. C’est une très belle maison… Qui sait si un jour vos enfants, une fois grands, ne voudront pas tout récupérer ?
    Amari secoue la tête. Il la rassure.
    - Si vous voulez dès demain, je vous fais les papiers qui attesteront que vous en êtes bien les propriétaires, dit-il. Vous aurez votre propre entrée et une petite cour… C’est bon ?
    - Oui.
    - Vous gardez les meubles que vous avez utilisés. Si vous avez besoin d’une aide financière, pour les travaux, propose-t-il. Je peux vous l’avancer !
    Kadour le remercie.
    - J’ai mes économies. Je saurai me débrouiller…
    Il ne peut pas en dire plus. Tout comme sa femme, il est en larmes. Lorsqu’il avait parlé de l’héritage, il avait pensé qu’ils devront plier bagage. Et puis voilà que son bienfaiteur après leur avoir donné l’occasion de vivre en ville, leur donne la moitié de la villa. Ils seront désormais chez eux.
    Zahia, occupée à bercer le bébé, apprend la nouvelle avant de se coucher. Elle éclate de rire et se met à danser avec le bébé. Elle chantonne, heureuse comme jamais…

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  16. Artisans de l'ombre Dit :

    17.

    -On l’accroche dans le salon. Dans notre salon, précise Aïcha en donnant le cadre à Zahia.
    Kadour les a emmenées chez un photographe. Il pris une photo de la petite famille. Agrandie puis mise dans un beau cadre que Zahia accroche au-dessus de la cheminée du salon.
    -C’est merveilleux… On a notre propre maison, en ville ! Notre salon… Le rêve, quoi !
    Aïcha est d’accord avec Zahia. À la demande d’Amari, Kadour entame les travaux la semaine suivante. Il y a un maçon et un manœuvre. Kadour, ne pouvant pas prendre de congé, leur donne des instructions avant de partir au lycée.
    Les travaux avancent lentement. Il y a toujours quelque chose à refaire. Lorsque Kadour découvre qu’ils n’ont pas suivi ses ordres, il leur demande de recommencer. Il est sur les nerfs. Il ne peut pas leur permettre de gâcher ses plans et son argent.
    Ils doivent construire une petite cuisine dans la cour. Pendant toute cette période, Aïcha ne sort pas. C’est Zahia qui leur apporte le petit-déjeuner, qui les sert. Qui sort lorsqu’ils appellent parce qu’ils ont besoin de quelque chose.
    Aïcha s’occupe de sa fille. Le contact ne passe pas. La petite Kheïra passe son temps à pleurer. Les berceuses que lui chantait Zahia lui manquent.
    - Zahia, je suis dépassée !
    - Si tu t’énerves, elle ne se calmera pas !
    - Occupes-toi en, s’il te plaît ! Ses pleurs vont me rendre folle !
    - J’y vais ! dit Zahia, mais elle doit retourner auprès du maçon qui avait encore besoin d’elle.
    Il leur manque de l’eau et pendant près d’un quart d’heure, elle porte des seaux d’eau de l’autre côté de la cour. Lorsqu’elle retourne à l’intérieur, le bébé ne pleure plus.
    Elle pense qu’Aïcha l’a calmé. Elle se rend à sa salle de bains où elle se change. Les pans de sa jupe sont mouillés. Elle met une autre jupe puis va étendre sa robe sur la porte de la cuisine. Elle l’aurait mise à sécher au soleil mais la poussière et le ciment l’auraient vite couverte.
    Comme le bébé dort, elle va au salon et reprend un tricot qu’elle a commencé depuis des jours. Faute de temps, elle ne parvient pas à le finir.
    - Je vais profiter de la pause, pour tricoter, dit-elle.
    À peine a-t-elle saisi les aiguilles que sa belle-maman vient à elle, souriante. Elle ne cache pas son soulagement.
    - Que deviendrait Kheïra sans toi ? Il suffit que tu la prennes pour qu’elle s’endort ! soupire-t-elle. Dis, tu n’aurais pas un secret ?
    - Un secret ? Mais tu y es finalement parvenue ! Elle s’est endormie dans tes bras, lui rappelle Zahia.
    - Non… Non, je t’ai demandée de t’en occuper !
    - Le maçon avait besoin d’eau, dit l’adolescente en se levant. Kheïra ne s’endort jamais seule ! Il lui faut sa berceuse… Elle se rend à sa chambre, suivie d’Aïcha. Elle s’approche lentement du lit du bébé et elle pousse un cri. Le bébé est bleu et il se débat comme s’il a des difficultés à respirer…

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  17. Artisans de l'ombre Dit :

    18eme partie

    -Qu’a-t-elle ?
    - Je ne sais pas, réplique l’adolescente, complètement paniquée. Qu’est ce qu’on fait?
    Aïcha la prend et la secoue. Le bébé ferme les yeux. Lorsqu’elle le dépose sur le lit, il est inerte.
    - Oh Mon Dieu! Elle est morte!
    - Ce n’est pas possible!
    - Si! Elle est morte! C’est de ta faute! Je t’avais dit d’aller la calmer !lui reproche-t-elle. Pourquoi tu n’y es pas allée?
    - Le maçon avait besoin d’eau, rappelle Zahia en portant les mains à la tête. Je te croyais encore avec elle!
    -Non! Je t’avais dit de la prendre! Quand elle s’est tue, moi, je pensais que tu t’étais occupée d’elle! Malheur à toi Zahia!
    - Je n’y suis pour rien!
    - Si! Tu l’as tuée!
    Aïcha se met à crier. Elle tombe à genoux, devant le lit où le bébé gisait inerte. Zahia sort de la chambre, à reculons. Elle se sent trembler de la tête aux pieds. Le maçon et le manœuvre accourent aux cris de sa belle-maman. Ils la trouvent en larmes, pâle comme une morte.
    - Qu’est ce qui se passe? Pourquoi elle crie?
    - Le bébé, souffle-t-elle, les laissant passer.
    Elle les entend tenter de la calmer.
    - Il faut l’emmener chez un médecin !dit le maçon. Je sens son cœur battre! Elle n’est pas morte! Ce n’est pas grave!
    - Non! Non, elle est morte!
    - Donnez moi une couverture! Je l’emmène chez un médecin, insiste le maçon. On ne peut pas rester ainsi, sans rien faire!
    Deux minutes après, ils sortent de la chambre, en pressant le pas. Aïcha les suit, en pleurant, chez le médecin du village. Zahia aussi mais elle s’arrête en chemin. Elle n’a pas la force. Elle ne veut pas entendre le médecin confirmerqu’elle est bel et bien morte.
    C’est par sa faute. Si elle s’était occupée d’elle avant, la petite Kheïra serait vivante. Elle a préféré porter de l’eau, au maçon. Elle regrette de ne pas avoir vérifié en rentrant si elle dormait bien. Elle regrette…
    Lorsqu’elle pense à son père, à la réaction qu’il aura quand il apprendra la mort du bébé, elle n’ose pas retourner à la maison. Elle ne veut pas voir sa peine. Elle ne supporte pas aussi l’idée qu’il puisse lui en vouloir. Sa colère sera terrible. Elle redoute tant l’instant où elle s’abattra sur elle.
    Elle marche dans les rues, au hasard. Lorsqu’elle se retrouve à la gare routière, elle monte dans le premier car. Elle n’a pas demandé où il se rendait. Elle veut juste partir, s’éloigner à jamais. Tous la tiendraient responsable de la mort du bébé qu’elle adorait. Tous lui en voudront. Elle ne peut pas retourner à la maison. Plus jamais…

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  18. Artisans de l'ombre Dit :

    19eme partie

    Elle ferme les yeux comme pour ne plus voir l’image du bébé mort. Elle s’en veut. Sa belle- maman a raison. Elle est responsable de sa mort. Elle ne se le pardonnera jamais.
    Son visage est inondé de larmes. En pensant à son père, elle se mord la lèvre. Lui et Aïcha ne lui pardonneront jamais de ne pas avoir pris soin du bébé. Ils comptaient toujours sur elle. Elle les a déçus à jamais.
    - Quelque chose ne va pas ?
    Zahia lève les yeux vers le receveur. En voyant ses yeux rougis à force de pleurer, il en déduit qu’elle a appris une mauvaise nouvelle.
    - Vous avez perdu quelqu’un?
    Zahia éclate en sanglots. Elle ne peut pas parler et hoche la tête. En fermant les yeux, des larmes coulent. Elle s’essuie avec la manche de sa chemise.
    - Un proche parent?
    - Ma sœur, arrive-t-elle à articuler.
    -Allah irhamha, répond-il. Vous descendrez où?
    - Au terminus…
    - Votre famille est à Constantine?
    - Oui.
    Elle appuie son visage contre la vitre. Elle n’y a pas pensé mais elle est partie sans même réfléchir. Elle ne voulait pas affronter la colère de son père ni voir sa peine. Rien ne pourra les réconforter.
    L’adolescente ferme les yeux. Elle ne veut pas voir les regards interrogateurs des passagers. Elle entend le receveur parler au chauffeur.
    - Elle a perdu sa sœur. Elle descend à Constantine…
    - Comment se fait-il qu’elle voyage seule ?
    Le receveur hausse les épaules.
    - Tu ne crois pas à la perte de sa sœur ?
    - Si! Ses larmes le prouvent mais pourquoi voyage-t-elle seule? Sans bagage, pas même un petit sac?
    Le chauffeur est loin de se douter qu’elle entend tout.
    - Tu veux que j’aille l’interroger?
    - Non.
    Zahia soupire. Elle garde les yeux fermés, feignant d’être assoupie. Ce, jusqu’à Constantine.
    - Terminus ! crie le receveur.
    Les passagers se lèvent et commencent à descendre. Zahia suit la file. Le chauffeur et le receveur descendent aussi. Ils suivent son regard. Elle semble perdue. Indécise…
    - Votre famille n’est pas venue vous chercher ? l’interroge le chauffeur.
    - Oui. Je ne pourrais même pas vous payer…
    - Mâalich!
    Zahia reste figée, à regarder autour d’elle, se demandant où elle allait partir.
    - Ne vous inquiétez pas, lui dit le chauffeur. Je vais attendre avec vous! Personne ne vous importunera!
    Le receveur après avoir remis la recette du jour, part sans se retourner une seule fois, pressé de rentrer chez lui. Zahia, partie sans réfléchir, elle a peur. D’ici une heure ou deux, la nuit tombera. Elle risque de la passer dehors…

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  19. Artisans de l'ombre Dit :

    20eme partie

    -Vous avez l’adresse de votre famille ?
    Zahia sursaute. Elle a oublié la présence du chauffeur. Elle hésite à s’aventurer hors de la gare routière. Elle ne sait pas où aller. Elle n’a pas où aller. Elle a menti et elle se rend compte que le chauffeur est soucieux. Il garde encore un œil sur elle.
    - Non, répond-elle d’une petite voix.
    - S’ils ne viennent pas, comment allez-vous faire?
    - Je vais attendre le temps qu’il faut, dit-elle. Ils ont eu un imprévu qui les retarde…Ils vont arriver d’une minute à l’autre!
    - Il va bientôt faire nuit, lui fait-il remarquer.
    - Je sais.
    - Si vous voulez, je reste jusqu’à leur arrivée, propose-t-il.
    - Cela fait une heure que vous attendez avec moi, dit Zahia. Vous n’êtes pas obligé! Votre famille doit vous attendre, rentrez chez vous!
    - Je ne serais pas tranquille, réplique le chauffeur. Je reste ici. Au cas où ils ne viendront pas, je pourrais vous aider! On ne sait jamais! Peut-être ont-ils oublié que vous arriviez aujourd’hui?
    - Peut-être?
    - Ou peut-être qu’ils…
    Zahia regarde autour d’elle et voie tous les voyageurs descendant des cars, s’éloigner rapidement. Personne ne traîne dans la gare. À part quelques voyous.
    - N’ayez pas peur. Temps que je suis là, ils n’oseront pas s’approcher, dit le chauffeur qui a suivi son regard inquiet. Vous êtes sûre que votre famille viendra?
    - Normalement.
    - S’ils ne viennent pas, la rassure-t-il. Je ne vous abandonnerais pas ici!
    - Vous m’emmènerez où?
    - À la maison, répond-il. J’ai une famille qui m’attend. Vous venez?
    - Que direz-vous à votre famille?
    - Ce qu’il en est, dit-il en souriant. Je ne peux pas laisser une adolescente, dans une gare!
    - Ils vont poser des questions? Peut-être même qu’ils ne voudront pas de moi?
    - Allons-y maintenant! Avant que la nuit tombe…
    Zahia le suit à contre cœur. Elle ne veut pas se retrouver seule, dans la nuit. Ces voyous peuvent la suivre et s’en prendre à elle.
    Elle remonte dans le car et il démarre. Elle est assise juste derrière lui.
    - C’est vrai qu’elle est morte, votre sœur?
    Elle éclate en larmes tout en secouant la tête.
    - Oui. Oui…Ma belle-maman m’a accusée. Elle a dit que j’étais responsable de sa mort!
    - Non. Elle n’a pas pu vous dire ça!
    - Si…
    Et Zahia pleure de plus belle. Elle a conscience d’avoir perdu sa petite sœur bien-aimée, sa famille. Elle n’a plus rien. Elle est seule au monde…

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  20. Artisans de l'ombre Dit :

    21iéme partie

    -Je m’appelle Safir, dit le chauffeur en enlevant sa casquette. Et je suis de la région. J’habite avec ma famille, ce qui veut dire mes parents, mes frères et mes sœurs…Votre famille est d’ici?
    - Je…Je n’ai plus de famille, murmure-t-elle en essuyant ses larmes.
    - Essuie tes larmes, lui dit-il. Quel que soit ton problème, il se résoudra!
    Elle n’y croit pas. Elle ne pourra jamais retrouver sa famille. Elle pense à leur peine. Elle se demande s’ils diront que c’est par sa faute, si le bébé est mort. S’ils en parlent, la police voudra l’arrêter? Elle risque de se retrouver en prison…
    Rien qu’à cette pensée, elle décide de ne pas dire d’où elle est originaire et même son nom.
    - Comment t’appelles-tu?
    - Zahia.
    - C’est tout?
    - Oui.
    Safir n’insiste pas. Ils sont presque arrivés.
    - Ma mère est un vrai policier. Elle est curieuse, la prévient-il. Tu vas passer un interrogatoire. Elle voudra tout savoir!
    Zahia garde le silence. Elle s’en doutait bien. Elle se demande que leur dire. Elle est pâle, les yeux rougis que Safir la présente à sa famille un quart d’heure plus tard.
    Sa mère Maria, une femme grande et forte, fronce les sourcils. Son regard va de son fils à l’adolescente.
    - Qui est-ce?
    - Elle n’avait pas où aller, répond-il, un peu gêné.
    - Comment ça? Elle a bien une famille quelque part!
    - La vieille! Ce n’est pas comme ça qu’on accueille une fille qui n’a où aller ! Lui reproche son mari Rabah. Il est évident qu’elle a connu la plus mauvaise journée de sa vie…Sois plus humaine et emmène la à la salle d’eau. Mets là à l’aise!
    Maria soupire et veut bien l’écouter. En se retrouvant seules, dans la salle d’eau, elle en profite pour l’interroger.
    - Comment se fait-il que tu sois à la rue?
    Zahia baisse les yeux.
    - Ma belle-maman me tient responsable de tous ces malheurs, répond-elle. Aujourd’hui, elle m’a chassée de la maison…
    En pensant au bébé qu’elle revoit encore inerte et bleu, elle pleure.
    - Et ton père?
    - Il…Il croit tout ce qu’elle dit.
    - Tu l’as volée?
    - Non.
    - Tu l’as frappée?
    - Non. Je faisais tout, je m’occupais de ma petite sœur, répond-elle. Elle dormait même avec moi…
    - Si tu avais été aussi serviable, elle ne t’aurait pas mise à la porte !remarque Maria. Qu’est-ce qui s’est passé aujourd’hui?
    Zahia hésite. Elle sent bien que Maria n’est pas femme à tolérer le mensonge. Mais qui sait si elle la croira ?

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  21. Artisans de l'ombre Dit :

    22eme partie

    - Si tu dis la vérité, je t’accueillerais comme une parente, dans le besoin d’un abri, promet Maria, les lèvres pincées. Je ne tolère pas le mensonge!
    - Je ne mens pas!
    - Que s’est-il passé?
    Zahia mise en confiance, décide de tout lui raconter. En quelques mots, elle lui explique comment le bébé s’est retrouvé seul, à pleurer au point d’avoir des spasmes.
    - Tu es sûre que ta sœur était morte?
    - Elle ne bougeait plus. Elle était bleue, lui dit l’adolescente. Elle avait de la mousse, à la bouche…Aïcha a dit qu’elle était morte! Elle s’était mise à crier! Elle…Elle disait que c’était de ma faute!
    - Puisque tu étais occupée, elle aurait dû la garder auprès d’elle!
    - Elle n’en avait pas l’habitude! Kheïra ne se calmait jamais en compagnie des autres! J’étais la seule, à pouvoir la réconforter, dit l’adolescente. Aujourd’hui, j’ai manqué à mon devoir!
    - C’est elle qui a failli à son devoir de mère ! réplique Maria. Et elle se donne bonne conscience en t’accusant toi!
    - Mon père aurait pris son parti! Lui aussi m’aurait tenu responsable! Il sait combien Kheïra tient à moi!
    De nouvelles larmes coulent sur ses joues. Maria la prend par les épaules et la secouent presque.
    - Ils n’auraient pas dû te la confier! Tu es encore trop jeune, pour connaître les gestes qui peuvent sauver un bébé! Seule une mère digne de ce nom peut protéger son enfant! Allez, essuie tes larmes…Rince toi le visage!
    Elle prend une petite bassine et la remplie d’eau d’un tonneau. Zahia s’exécute sous son regard. Quand elle a fini, Maria lui tend une serviette.
    - Retournons là bas! Mon vieux mari va penser que je t’ai mise à la porte!
    Elles retournent dans la pièce principale. Rabah les regarde puis fait signe à Zahia de s’approcher.
    - Assieds-toi!
    Elle prend place sur le tabouret, près de lui.
    - Ça va mieux ? lui demande-t-il.
    Elle hoche la tête.
    - Ne t’inquiète pas! La vieille aboie plus elle ne mord, dit-il sur le ton de la confidence.
    - Laisse la pauvre fille tranquille! Elle en a vu de toutes les couleurs ! glisse Maria.
    - Si elle prend ta défense, c’est que tu es victime d’une injustice! La vieille a horreur de la hogra!
    - Tais-toi…Le dîner est bientôt prêt! Laisse la reprendre son souffle…Ou plutôt emmène la à la chambre des filles, dit Maria en essuyant des larmes au coin des yeux. En attendant…
    La chambre est en face de la cuisine. Des matelas sont posés sur un tapis tissé à la maison. Les filles sont en train de réviser, les livres et les cahiers posés sur leurs jambes. Elles lui font une place, en souriant.
    - C’est bien les filles, dit leur père. Faites connaissance…
    Les filles n’en ont pas besoin. Elles mettent tout de suite Zahia à l’aise. Elles ne comprennent pas pourquoi elle éclate en sanglots. à l’aise ou pas, elle ne sera jamais bien. Sa peine est trop grande. Rien ne peut la réconforter…

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  22. Artisans de l'ombre Dit :

    23eme partie

    -Pourquoi pleures-tu ?
    - Je n’aurais jamais la chance, d’être avec ma sœur, répond Zahia. Quand je vous voie comme ça, j’ai mal en pensant qu’on ne pourra jamais être proches…
    - Moi, c’est Soumia, se présente la grande, une fille d’à peu près son âge. Et ma sœur s’appelle Karima…On deviendra comme des sœurs si tu veux…
    - On n’est pas d’une même famille!
    - Tu vas vivre ici. Notre famille deviendra la tienne!
    - Je ne crois pas…
    - Maman ne te mettra jamais dehors!
    Zahia hausse les épaules. Lorsque le dîner est prêt, Maria les appelle. Elle les sert dans une grande assiette. Assises autour de la table basse, elles mangent ensemble. Les garçons et leur père ont dîné avant elles.
    Maria ne cesse de regarder Zahia.
    - Bienvenue chez nous, lui dit-elle. Je m’excuse pour tout à l’heure…J’avais été surprise et j’ai horreur des surprises!
    Zahia ne dit mot. Elle ne mange pas. Elle a une boule dans la gorge qui l’empêche de déglutir. Elle s’y efforce. Pour faire plaisir à Maria.
    - Mange, s’il te plait!
    - Je ne peux rien avaler, s’excuse l’adolescente.
    - Je comprends, murmure Maria. Moi aussi, j’ai eu une belle maman. On passait notre temps à se disputer. Lorsqu’elle me frappait, je partais alors chez mon oncle et ces nuits là, je les passais, le ventre vide. Le temps que je me remette de ma peine , de mes émotions. C’est pourquoi je ne te force pas…Mais promets-moi une chose!
    - Oui.
    - Dès que tu as envie de manger, n’hésite pas à venir dans la cuisine et à te servir!
    - C’est promis, répond Zahia, soulagée.
    - Allons à la chambre. Je suis sûre que tu es épuisée!
    Elles se rendent à la chambre des filles et Maria lui prépare où dormir. Zahia n’a aucune envie de dormir même si elle est épuisée. Elles s’installent sur sa couche. Maria se met à lui raconter son enfance malheureuse, victime d’une belle- maman qui la frappait parfois sans raison.
    - J’avais subi ses colères jusqu’au jour où mon père m’a promise à mon cousin…Aujourd’hui, ce ne sont que de mauvais souvenirs mais en leur temps, je trouvais ça injuste et terrible! Depuis je ne tolère plus qu’on lève la main sur moi ou sur quelqu’un devant moi! Tu comprends? Ici, désormais il ne t’arrivera rien…Tu seras à l’abri de tout!
    Zahia pleure. Mise en confiance, elle se met à lui raconter comment sa défunte grand-mère s’était occupée d’elle après la mort de sa mère.
    - Je faisais ce que je voulais. Elle avait toléré mes caprices et tout. Elle a été une mère, pour moi!
    - Je veux bien te croire! Ta belle- maman ne te battait pas? Et ton père?
    Zahia ferme les yeux.
    - J’allais à des cours de couture. Quand elle était tombée enceinte, ils avaient décidé de me garder à la maison, confie-t-elle. Je me suis mise à tricoter et à coudre des tenues pour bébés…Je gagnais beaucoup d’argent!
    - Et où est ton argent?
    - à la maison, répond l’adolescente.
    Maria la serre dans ses bras. L’idée qu’elle ait pu fuguée, lui a traversé l’esprit. Mais Zahia aurait pris ses bijoux et ses économies si cela avait été le cas. Elle la serre contre elle, touchée par son malheur…

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  23. Artisans de l'ombre Dit :

    24eme partie

    -Je ne te demanderais pas d’où tu viens ni comment tu t’appelles…Je ne chercherais pas à t’envoyer chez toi, lui promet-elle. Sauf si tu le veux!
    - Non, non!
    - Il y aura des jours bons et d’autres moins bons, la prévient Maria. Mais je peux te jurer que personne n’abusera de toi et ne lèvera la main, sur toi. Tu auras le même sort que mes filles!
    - Ton fils, ton mari…
    - Appelle le khali Rabah. à partir de maintenant, il sera comme un père, pour toi!
    - Tu crois qu’il sera d’accord, pour que je reste ici? demande Zahia, inquiète.
    - Pourquoi refuserait-il?
    - Pourquoi accepterait-il ? réplique-t-elle. Il n’est pas obligé…
    - Rabah a bon cœur! Il ne te jettera pas à la rue. Quoi qu’il en soit! Tu as certainement envie de dormir. Je te laisse, bonne nuit.
    - Bonne nuit.
    Zahia s’endort d’un sommeil profond, sans rêve. Soumia et Karima font le moins de bruit possible, en rangeant leurs affaires d’école avant de se mettre au lit.
    Lorsqu’elle se réveille le lendemain, elle ne reconnait pas les lieux. Puis en faisant un effort, elle se rappelle la journée passée et de nouveau, elle culpabilise. Maria venue réveiller ses filles, la trouve en larmes. Elle tente de la réconforter mais en vain.
    - Il faut être courageuse et te ressaisir ! lui dit-elle. Tu as pris grand soin de ta petite sœur. Elle n’est pas morte à cause de toi.
    - Si j’y étais allée au moment où Aïcha me l’avait demandée, Kheïra ne serait pas morte!
    - Si tu veux retourner auprès de ta famille, on t’y emmènera, propose Maria. Je sais que ce n’est pas facile de couper avec sa famille! Si tu te crois assez forte, pour supporter leur colère et leur peine, alors, rentre chez toi!
    - Non, je ne supporterais pas.
    - Zahia. On ne peut pas changer le cours du destin, poursuit Maria. Il était écrit que ta sœur mourrait. Avec toi à ses côtés ou pas, elle n’aurait pu échapper à sa destinée!
    - Qui sait?
    Maria secoue la tête.
    - écoute, si j’étais sûre que ta belle- maman ne te tiendrait pas rancune toute la vie, je t’emmènerais chez toi, sur le champ!
    - Elle ne me pardonnera jamais de lui avoir pris son unique fille, reconnait Zahia. Même mon père!
    - Alors, dis-toi que tu as de la chance, d’être ici! Sa foudre ne t’atteindra pas jusqu’ici!
    L’adolescente le reconnait. Elle a de la chance. Si vingt quatre heures auparavant, on lui avait dit qu’elle se retrouverait ici, elle n’y aurait pas cru. Et pourtant, elle est loin de sa famille, parmi des inconnus au bon cœur. Elle sait qu’elle ne pourra jamais retourner chez elle, maintenant. Pour que la foudre ne s’abatte pas sur elle…

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  24. Artisans de l'ombre Dit :

    25eme partie

    Safir est en train de prendre son café, avec son père quand Maria les rejoint à la cuisine.
    - Quand tu iras à Guelma, écoute ce qui se dit…Peut-être que sa famille la recherche ou la police?
    - Oui. Et je fais quoi s’ils me posent la question?
    - Tu leur diras la vérité, réplique-t-elle. Qu’elle est ici…Mais si on ne demande pas après elle, on ne va pas le crier!
    - Ne t’inquiète pas…
    Il finit de prendre son café et les salue avant de partir à son travail. Les filles ont vite fait de se préparer. Il les dépose à l’école.
    Rabah qui travaille dans un chantier, dans le quartier, ne part pas tout de suite.
    - Sois sans crainte! On ne cherche pas à te renvoyer chez toi, lui dit-il. On veut juste savoir si ta famille a alerté les gendarmes et tout. Tu comprends?
    - Oui.
    Il lui sert une tasse de lait et un bout de pain.
    - Mange un peu, cela te fera du bien! Hier soir, tu n’as pas dîné, lui rappelle-t-il. C’est l’heure que je parte au travail, soupire-t-il. à ce soir!
    - Bonne journée!
    Zahia prend son lait puis décide de s’occuper. Elle ne peut pas rester les bras croisés alors que Maria est en train de ranger les chambres.
    Mais ce n’est pas pour plaire à Maria. Elle la trouve en train de rincer les verres, tout en pleurant.
    - Laisse ça! Je ne t’ai pas gardé ici, pour que tu t’en occupes!
    - Je voulais m’occuper. Je ne cesse de penser à ce qui est arrivé, confie l’adolescente. Je voudrais ne plus y penser! Oublier…
    Maria lui essuie ses larmes puis la serre dans ses bras.
    - Il faudra du temps…
    - J’ai tellement mal. J’ai tout perdu!
    - Je sais.
    Maria promet d’être toujours là, pour la réconforter. La douleur partira avec le temps. Pour l’instant, elle attend le retour de Safir de Guelma. Il pourra leur apprendre si sa famille s’est manifestée, si les gendarmes savent qu’elle a fugué…

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  25. Artisans de l'ombre Dit :

    26eme partie

    -Alors? dis-nous!
    - Il y a eu trois décès de bébés, répond Safir. Je connais quelqu’un qui travaille à la mairie et il m’a affirmé qu’ils sont tous morts subitement!
    - Personne ne cherchait une jeune fille? Personne n’a parlé de Zahia?
    - Non, rien!
    Maria aurait voulu entendre que sa famille la recherchait. Ainsi elle aurait été contrainte, à leur ramener. Mais ce n’est pas le cas. La belle-maman voudra la retrouver uniquement pour venger la mort du bébé. Toute sa vie elle le lui fera payer.
    - Elle restera avec nous. Je vous demanderais de prendre soin d’elle, d’éviter les sujets qui peuvent la blesser, leur dit-elle. Quand elle ira mieux, on l’inscrira au centre de formation. Elle est habile en couture. Elle apprendra un métier…
    - Oui. La pauvre petite…
    Pendant des semaines, voire des mois, Zahia ne retrouve pas le sourire. Rabah l’a inscrite dans un centre de formation. Tout comme Maria, il refuse à ce qu’elle reste cloitrée à la maison. Elle est comme leur fille. Ils l’ont vite adoptée.
    Elle s’entend bien avec toute la famille, même les voisins la trouvent adorable. Lorsque Maria reçoit son beau-frère et sa belle-sœur, ils sont surpris. Ils savaient qu’ils avaient recueilli une fille mais ils ignoraient dans quelle condition. En voyant que c’est une jeune fille, la belle-sœur Naïma écarquille les yeux.
    - Mais elle est grande!
    - Oui. Elle doit avoir quinze ans, répond Maria.
    - Pourquoi as-tu accepté de la garder?
    - Je ne pouvais pas la laisser traîner dans les rues! C’est une fille sérieuse, de bonne famille. Elle n’a pas eu de chance, ajoute Maria, c’est tout!
    - Comment peux-tu savoir si elle est de bonne famille?
    - Sa belle-maman l’a chassée! Satisfaite?
    - Non. Est-ce que tu te rends compte qu’elle est en âge de fonder un foyer?
    - Oui.
    - En lui permettant de sortir, tu sais à quel problème tu t’exposes ? l’interroge la belle-sœur avant d’ajouter. Ou cela n’a pas d’importance, à tes yeux parce que ce n’est pas ta fille!
    - Je jure devant Dieu qu’elle est comme ma fille! Je ne la garde pas ici, pour les corvées mais parce que je tiens à elle! Et si tu es réellement inquiète, sache que je n’ai pas l’intention de me séparer d’elle!
    - Que comptes-tu faire?
    Maria un peu énervée, refuse de lui répondre.
    - Tu le sauras au bon moment!

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  26. Artisans de l'ombre Dit :

    27eme partie

    - Je te trouve bien soucieuse, remarque Rabah. Quelque chose ne va pas?
    Maria a les lèvres pincées. Son beau-frère et sa belle-sœur sont partis et depuis elle est silencieuse. Trop, se dit-il. Il la connait bien. Elle est préoccupée. Quelque chose la travaille.
    - Qu’est-ce qui ne va pas ? l’interroge-t-il.
    - Rien.
    - Parle moi!
    - Laisse moi réfléchir, réplique Maria. J’ai besoin d’être seule!
    - Je voudrais bien savoir, insiste-t-il.
    Maria prend le panier à linge et va à la cour où elle se met à trier le linge sale. Elle le trempe dans de l’eau. Perdue dans ses pensées, elle ne se rend pas compte qu’il l’a suivie. Elle sursaute en se retournant, tombant sur lui.
    - Je n’abandonnerais pas, lui dit-il. Je ne te laisserais pas tranquille!
    Maria soupire tout en s’asseyant.
    - Ils étaient venus voir Zahia. D’après eux, tous se posent des questions, raconte-t-elle. Sur ces origines, pourquoi on la garde et jusqu’à quand! Comme si j’allais me séparer d’elle!
    - Ce jour arrivera bien, réplique Rabah. C’est une jeune fille. Un jour, elle se mariera…
    - Oui, mais pas avec n’importe qui, dit-elle. Je l’aime beaucoup et pour m’assurer qu’il ne lui arrivera rien de mal, dans la vie, j’ai pensé que si…
    - Que si quoi?
    Maria les yeux larmoyant, le regarde et finit sa phrase.
    - Safir est en âge de se marier. Si on lui propose Zahia, je suis sûre qu’il ne refusera pas!
    Rabah rit. Il ne la prend pas au sérieux. Elle ne peut pas être sérieuse…
    - Qu’est ce que tu ferais pour ne pas être séparée d’elle?
    - Tout…Même la marier à mon fils!

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  27. Artisans de l'ombre Dit :

    28e partie

    Rabah ne souffle mot pendant un long moment. Maria le regarde, attendant une réaction de sa part. Elle veut qu’il partage son idée, qu’il ait envie d’avoir Zahia, à jamais, dans leur famille.
    Elle est de bonne famille. Elle est belle et tout ce qu’elle fait de ses dix doigts, est parfait. Elle s’entend bien avec leurs filles. Entre elle et Safir, presqu’aucun contact. Juste bonjour et bonsoir.
    Maria ne les a jamais vus ou entendus se parler. Elle reconnait que Safir n’est jamais à la maison. Il travaille même le week-end.
    Leur fils est calme et sérieux. Elle ne lui connait aucune histoire d’amour.
    - Oui, dit-il enfin. Ils feraient un beau couple…Mais tu dois en parler à Safir! Il a aussi son mot à dire!
    - Oui, oui, murmure-t-elle. Mais toi, qu’en penses-tu? Es-tu d’accord?
    - Oui. Zahia est parmi nous depuis longtemps! Et j’ai eu l’impression de la connaître depuis toujours, dit Rabah. Elle n’a que des qualités. Un mot gentil, un sourire…
    - Parfois, je sens que Zahia pense à sa famille, confie Maria. Elle a des moments de silence presque religieux…Elle est à mille lieux d’ici, par la pensée. Je me demande si on ne devrait pas chercher après elle?
    - Pourquoi maintenant?
    - Je veux la marier à mon fils, dit- elle. Le temps a dû panser les blessures et les rancunes doivent être oubliées, poursuit-elle. Zahia ne risque plus rien…Cela lui fera du bien, de retrouver sa famille avant de se marier!
    - Oui. Mais on fait quoi en premier ? l’interroge Rabah. On retrouve sa famille ou on les marie?
    Maria décide de les marier. Elle craint qu’après les avoir retrouvés, ils voudront décider pour elle. Et peut-être même qu’ils refuseront? Elle ne veut pas prendre le risque de perdre Zahia. Dès ce soir, elle en parlerait à Safir. Il doit à tout prix accepter…

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  28. Artisans de l'ombre Dit :

    29eme partie

    -Me marier ? Mais je n’ai que vingt deux ans, lui rappelle Safir.
    - C’est l’âge idéal! réplique Maria. Si tu ne travaillais pas je te donnerais raison! Mais on ne manque de rien. Tu as ta chambre, tu es travailleur!
    - Ce n’est pas une raison!
    - Mais si!
    Safir soupire.
    - Et avec qui veux-tu que je me marie?
    Maria sourit.
    - Une fille magnifique.
    - Je la connais? Ou tu comptes me la présenter?
    - Je n’en aurais pas besoin, dit Maria. Tu la connais déjà?
    - Une de tes nièces, sûrement!
    - Non, répond-elle.
    - Une voisine?
    - Non.
    Safir fronce les sourcils. Il ne voit pas qui.
    - Si ce n’est pas une nièce, une voisine alors qui cela peut-être?
    Maria pose la main sur son bras.
    - Zahia, lui dit-elle. Elle est parfaite. Elle sera une bonne épouse et elle te donnera de beaux enfants!
    - Comment peux-tu penser au mariage ? demande le jeune homme avant de lui rappeler. Elle est comme une sœur, pour moi!
    - Elle ne l’est pas. Et comme elle est en âge de se marier, je préfère que ce soit toi qui aies la chance de l’avoir pour épouse!
    Safir réfléchit pendant un moment.
    - Papa est au courant? Qu’est ce qu’il en pense?
    - Il partage mon avis. Zahia devient notre belle-fille. On sera très heureux, poursuit Maria. Elle est digne de toi…
    - Et elle, tu ne lui en as pas parlé?
    - Pas encore…Je le ferais plus tard. J’avais besoin de ton consentement avant, dit la mère, émue. Imagine que je lui en parle en premier et que tu fasses des problèmes…Que tu refuses même de te marier avec elle! Elle en sera blessée et elle n’aura même plus envie, de vivre ici, après! Dis, tu es d’accord?
    - Oui, oui.
    Maria prend son fils, dans ses bras. Elle pleure presque de joie. Son rêve est en train de se concrétiser. Il lui reste à en parler à Zahia. Elle espère qu’elle saura l’écouter comme son fils l’a su faire et accepter ce mariage. Il n’en résultera que du bien. Elle en est persuadée…

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  29. Artisans de l'ombre Dit :

    30eme partie

    Lorsqu’elle entre dans la chambre des filles, elle n’est pas surprise de les trouver occupées. Ses filles révisent leurs cours et Zahia est en train de broder le col d’une robe pour fillette.
    - Je voudrais te parler, lui dit-elle.
    - Oui.
    Zahia ramasse les bobines de fils et les bouts de tissus pour lui faire une place, sur le matelas. Mais Maria ne s’assoie pas.
    - Allons à la cuisine. Je veux te parler, seule!
    Les filles échangent un regard.
    - Tu peux parler devant elles, dit la jeune fille.
    - Oui maman! Quoi que tu ais à lui dire, tu peux le faire devant nous!
    - Oui, insiste Zahia. On n’a pas besoin d’être seules…Mais de quoi veux-tu parler?
    Ses filles ont abandonné leurs livres et la regardent s’assoir, près de Zahia. Son sérieux les étonne. Elles s’approchent.
    - Retournez à vos cours! leur ordonne-t-elle.
    - On le saura tôt ou tard. Alors pourquoi ne pas maintenant? réplique Soumia, arrachant un sourire à leur mère. C’est bon, tu nous permets d’écouter?
    - Oui.
    Maria les regarde réunir autour d’elle et elle prie pour qu’il en soit toujours ainsi. Dès qu’elle aborde le sujet qui lui tient à cœur, ses filles sautent au cou de Zahia, la pressant d’accepter.
    - Tu seras notre belle-sœur! On a de la chance! Safir a de la chance!
    - Pourquoi moi? demande Zahia qui ne s’attend pas à la demande. Il y a d’autres filles…
    Maria prend sa main.
    - Oui, il y a les nièces, les cousines, les voisines mais moi et Safir, c’est toi qu’on veut. Tu comprends?
    - Il…Il y tient vraiment?
    - Mais oui! Penses-tu que s’il avait refusé, je t’en aurais parlé?
    - Non…
    - Alors. Dis-moi, cela te plairait d’avoir une belle-mère grincheuse?
    - Je ne crois pas qu’il puisse y avoir plus adorable que toi! Oui, je veux bien, répond Zahia, émue. Je ferais partie de la famille, pour toujours!
    - C’est mon rêve! Je ne voulais pas que tu sortes de ma vie, confie Maria. C’est comme ça que j’ai eu l’idée d’arranger votre mariage!
    - Une bonne idée!
    Les filles crient leur joie. Ce soir-là, toute la famille veille et parle du grand projet. Safir y participe aussi. Pour la première fois, il ne la regarde plus comme un frère…

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  30. Artisans de l'ombre Dit :

    31eme partie

    Maria n’attend pas l’été, pour fêter le mariage. Quelques semaines après, elle invite la famille et les voisins à déjeuner. Elle n’a pas donné de grande fête. Ils n’en ont pas les moyens.
    En patientant encore quelques mois, ils auraient pu mais Maria ne voulait pas perdre de temps.
    Pour plusieurs raisons. Depuis qu’ils se savaient destinés l’un à l’autre, ils profitaient de chaque instant, pour rester ensemble. Elle ne pouvait pas tout le temps, les chaperonner. Aussi, en plus de vouloir éviter le scandale, elle craignait que son fils puisse être influencé par les remarques des voisins et de la famille.
    Ce mariage “surprise” leur avait cloué le bec. Ils avaient été nombreux, à ne pas apprécier le fait qu’elle garde Zahia. Aussi, lorsqu’ils avaient appris qu’elle allait les marier, tous ne s’attendaient pas à ce que ce soit aussi rapide.
    Le jour du mariage, elle surveille de près les mariés. Elle craint le mauvais œil et les personnes mal intentionnées.
    Lorsqu’elle a à faire, elle confie à ses filles, la surveillance. Et comme c’est juste un déjeuner, les invités ne tardent pas à partir.
    Quand elle se retrouve enfin seule, avec sa famille, elle soupire de soulagement. Tout s’est bien passé. Elle remercie Dieu, de les avoir protégés.
    Son rêve enfin réalisé, elle peut dormir tranquille. Rien ni personne ne pourra les séparer. Elle aime Zahia comme si elle est sa fille. Elle est si heureuse.
    La famille nage dans le bonheur. Safir reprend son travail, une semaine après le mariage. Il aurait voulu rester plus longtemps mais son remplaçant n’est pas à la hauteur. Il conduit mais mal. Le receveur est venu le trouver, pour le lui dire.
    - Je ne peux plus travailler avec lui. Je crains pour ma vie et celles des passagers, lui confie-t-il.
    - C’est bon. Demain, je reprends!
    Zahia et Safir se sont vite attachés l’un à l’autre. Ils s’aiment beaucoup. Le matin où il part travailler, elle est en larmes. Maria est émue.
    - Il me manque déjà, lui dit-elle. Il est obligé de travailler si loin?
    - Ce n’est pas loin Guelma, lui fait remarquer Maria. Il revient ce soir…
    - La journée sera longue et vide sans lui!
    La belle-mère rit, émue et heureuse.
    - J’ignorais que vous vous aimiez autant!
    - Oui, je l’aime. Qu’est ce que je vais devenir sans lui?
    - Il ne t’arrivera rien. Tu es chez toi, entourée de ta famille, lui rappelle Maria. Et puis, les journées passent vite! Il y a tellement à faire…
    - C’est vrai! Je vais reprendre aussi mes broderies, soupire Zahia. Cela m’occupera l’esprit et me fera oublier qu’il n’est pas là…
    - Ma fille, je voudrais te parler d’un sujet qui me tient à cœur, dit la belle-mère. Cela concerne ta famille…si tu es d’accord, je lui demanderais de chercher après elle!
    Zahia secoue la tête. Elle refuse de façon très sèche, la proposition. Maria est surprise. Elle ne comprend pas pourquoi.

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  31. Artisans de l'ombre Dit :

    32eme partie

    - Tu nous as mentis?
    La question de Maria la surprend. Elle a un air suspicieux dans le regard. Zahia secoue la tête.
    - Non!
    - Tu as fugué, pourquoi?
    - Tu le sais. Ma sœur était morte. J’avais paniqué. J’étais partie sans réfléchir, lui rappelle-t-elle. Je ne peux pas retourner là-bas!
    - Pourquoi? Il y a bien une raison!
    - Oui.
    - Je n’ai plus ma place, auprès d’eux, répond Zahia en larmes. Ils ne voudront plus de moi. Après ce que j’ai fait, je préfère ne jamais y retourner!
    - On sera avec toi. Il ne peut rien t’arriver, la rassure Maria. S’ils te pardonnent, c’est bon! Mais s’ils refusent, on rentrera à la maison, le cœur tranquille! On aura au moins essayé!
    - Non! Non, je ne peux pas affronter la colère de papa! C’est trop dur!
    Maria s’approche d’elle et la secoue presque.
    - Tu sais quoi? J’avais tellement de peine, pour toi que je ne pouvais pas te laissez retourner là bas! J’avais en souvenirs, mon enfance malheureuse où ma belle-maman me maltraitait sans raison, confie-t-elle à sa belle-fille. Je refusais que tu retournes là-bas et qu’elle te fasse payer la mort du bébé!
    - Je sais tout ça!
    Maria secoue la tête.
    - Je regrette. On aurait dû chercher après eux, quelques jours après…Puis, je me suis attachée à toi au point de ne pas supporter l’idée que tu puisses nous quitter!
    - Tu as eu l’idée de me marier, à Safir!
    - Oui. Maintenant que je ne risque plus de te perdre, poursuit Maria, j’ai décidé qu’on irait les voir! Quitte à te traîner là-bas! Même par les cheveux!
    - Safir ne te laissera pas faire!
    Maria sourit.
    - Il est de son devoir, de prendre soin de toi! De te protéger…Mais aussi, de te ramener à la raison…Ce que j’essaie de faire maintenant! Tu comprends? Il le faut! C’est impératif…
    Zahia soupire et essuie ses larmes.
    - J’ai peur du regard de papa. Je ne supporterais pas sa colère et sa peine…J’étais sa fille chérie. Il me passait tous mes caprices!
    - Même maintenant, il te pardonnera! Tu es de sa chaire et de son sang!
    - Je veux tant le retrouver! Il me manque!
    Maria la serre dans ses bras et lui promet que tout se passera bien. Le soir même, elle demande à son mari, d’aller à Guelma. Ils doivent trouver son père et les réconcilier.
    Rabah ne se fait pas prier. Le lendemain, en compagnie de Safir, il se rend à Guelma. L’adresse à la main, ils cherchent la villa. Tous les passants à qui ils la montrent, ne peuvent les renseigner…

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  32. Artisans de l'ombre Dit :

    33eme partie

    -Ce n’est pas possible! Comment se fait-il que personne ne connaisse cette adresse?
    - Il doit bien y avoir quelqu’un qui pourra nous renseigner, dit Rabah. Allons à la poste! Si le facteur a fini sa tournée, il nous renseignera!
    C’est une bonne idée. Le facteur est là. Il fait sa pause et dès qu’il lit l’adresse, il hoche la tête.
    - Oui. C’est la grande villa…
    - Savez-vous si Kadour X y vit encore?
    - Je dépose souvent des factures, dans sa boîte, répond-il. Vous êtes de sa famille?
    - Oui. Mais on n’est jamais venus auparavant. On n’arrive pas à la trouver, dit Rabah. Est-ce loin d’ici?
    - Oui. Mais je peux vous y conduire si vous débrouillez un taxi?
    - Je vais essayer d’en trouver un, dit Safir. Reste avec lui! Je reviendrais vite!
    - Vous connaissez la placette?
    - Oui, oui!
    Safir part en pressant le pas. Il n’aura pas à chercher longtemps. Un taxi passe à sa hauteur et il le hèle.
    - C’est pour une course, pas très loin, précise Safir en prenant place, près du taxieur.
    Ils vont à la poste. Rabah et le facteur montent vite. Le facteur guide le taxieur, à travers les ruelles. Moins de dix minutes après, ils se retrouvent devant la grande villa.
    Rabah règle la course et remercie le facteur. Safir va frapper à la porte plusieurs fois…
    - Insiste! C’est une grande maison. Je vais faire le tour…
    En contournant, il ne s’attend pas à trouver une autre entrée. Il frappe et aussitôt une femme regarde d’une fenêtre. Elle l’ouvre et lui demande.
    - Qui êtes-vous?
    - Je cherche Kadour…c’est bien sa maison?
    - Oui.
    - Où puis-je le trouver?
    - Je l’ignore, répond la femme.
    - C’est votre mari?
    - Non, dit-elle en secouant la tête. Nous avons loué sa maison…
    - Il n’habite plus ici? Où puis-je le trouver?
    - Je ne sais pas. Je crois qu’ils ont quitté la région…
    Rabah est déçu. Mais ils leur restent un endroit à voir. Kadour a travaillé au lycée. Avec un peu de chance, quelqu’un saura les renseigner.
    Safir et lui s’y rendent sur le champ. Ils n’ont pas de temps à perdre…

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  33. Artisans de l'ombre Dit :

    34eme partie

    Le gardien du lycée n’a pas encore fermé le portail. Il répond à leur salut.
    - Kadour est là?
    - Non. Il a quitté, il y a des mois, répond le gardien. Il a trouvé un meilleur travail.
    - Où?
    - Je l’ignore.
    - On n’a pas de chance, soupire Safir. On ne le retrouvera pas…
    - On aura au moins essayé, dit Rabah. On pourrait se rendre à son village natal?
    - Oui. Mais je les imagine mal y retourner après avoir trouvé un meilleur emploi! Peut-être qu’ils sont allés à Annaba?
    - Si c’est le cas, on ne le retrouvera jamais! Tu as raison. Il ne peut pas être à son village natal. S’il a déniché un meilleur travail, ça ne peut qu’être à Annaba! Rentrons à la maison!
    En fin de journée, lorsqu’ils poussent la porte d’entrée, Maria va à eux. Elle est impatiente. Elle n’attend pas qu’ils aient repris leurs souffles et qu’ils se soient mis à l’aise, pour les interroger.
    - Vous les avez vus?
    - Non. On n’a pas eu cette chance, répond Rabah. Ils n’habitent plus là…
    Il lui raconte tout. Maria est déçue mais elle s’efforce à sourire lorsque Zahia les rejoint dans la pièce principale.
    - Vous avez passé une bonne journée?
    - Non…enfin si, rectifie Safir.
    - Va, dit Maria à sa belle-fille. Prépare-leur du café! Ils en ont besoin après cette journée de travail…
    Zahia se rend à la cuisine.
    - Elle ignore que vous êtes partis à Guelma, chercher sa famille! Prétendez avoir à faire…On doit l’aider à oublier! Plus jamais on ne doit parler de sa famille, leur conseille-t-elle. Puisqu’on est sans espoir de la retrouver!
    Tous deux hochent la tête alors que Zahia revient avec du café. Elle les sert. En les regardant, elle remarque qu’ils l’évitent.
    - Quelque chose ne va pas? demande-t-elle.
    - Si…Pourquoi cette question ?
    - Vous paraissez étrange, dit-elle. Seriez-vous partis aujourd’hui même, à la recherche de ma famille?
    - Tu l’aurais su, réplique Maria, si cela avait été le cas!
    - Le jour où vous partirez, est-ce que je pourrais vous accompagner?
    - Bien sûr, répond le beau-père, ému. C’est ton droit! On te préviendra ce jour-là!
    Zahia le remercie. Elle retourne à ses occupations. Elle a gardé l’habitude de travailler, dans la chambre de ses belles-sœurs. Elle ne se doute de rien. Maria est soulagée qu’il en soit ainsi. Elle n’aurait pas supporté de la voir soucieuse et malheureuse…

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  34. Artisans de l'ombre Dit :

    35eme partie

    à chaque fois que Zahia demandait quand ils chercheraient après son père, Maria ou Safir répondaient « un jour » ou « à mon prochain congé ».
    Puis, leur vie familiale sera bien remplie. Ils auront d’autres préoccupations. Zahia finit par ne plus en parler. Elle oublie même.
    Les filles passent leurs examens et elle veille avec elles. Elle tient à leur réussite. Aussi, c’est l’occasion pour elle, de renouer avec la lecture. Quand elle n’a pas de commande.
    Puis son beau-père a une fracture suite à une chute, au chantier. La fracture le cloue au lit pendant de longues semaines. Maria reste à son chevet. Quand il n’a pas besoin d’elle, elle aide Zahia. Elle se charge du linge sale, refusant que toutes les corvées lui soient reléguées. Si elle ne prend pas soin d’elle, qui le fera?
    Maria se comporte avec elle comme une mère. Quelques mois après le mariage, lorsqu’elle tombe enceinte, elle est aux petits soins, pour elle.
    Elle lui mijote de petits plats et lui recommande de se reposer. Ce, jusqu’au jour de sa délivrance.
    Zahia suit les conseils même si elle profite de chaque moment de solitude, pour se lever. Ses belles-sœurs complices, la préviennent quand sa mère se dirige vers la chambre. Elle retourne aussitôt au lit. Quand elle soupire, Maria la rassure.
    - Ce n’est qu’une question de semaines…Inch Allah et que tout se passera bien, lui dit-elle.
    - J’ai peur. Je crois que je ne saurais pas m’occuper du bébé!
    - Ne t’inquiète pas! Je m’occuperais de toi et du bébé, lui promet-elle.
    Zahia n’en doute pas. Elle a appris à la connaître. Elle sait qu’elle pourra toujours compter sur elle. Le soir où elle est prise de contractions, elle s’affole. Elle a l’impression qu’elle ne s’en sortira jamais.
    Maria l’accompagne à l’hôpital. Zahia a peur et souffre atrocement. La sage-femme lui demande de rester dans le couloir. Une attente interminable où l’angoisse lui serre les tripes. Un temps où elle ne cesse de prier pour que tout se passe bien…

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  35. Artisans de l'ombre Dit :

    36eme partie

    -Alors? Comment va ma fille ? demande Maria lorsque la sage-femme sort.
    - C’est votre fille?
    - Oui, oui…Est-ce que je peux entrer?
    - Non. Mais pour répondre à votre question, elle va bien. Elle vient d’avoir un garçon…
    - Hamdoullah! Hamdoullah!
    Maria pleure cette fois de soulagement et de joie. Elle court informée Safir qui est resté dehors.
    - Selket, ya oulidi!
    Safir la prend dans ses bras et la serre très fort.
    - Hamdoullah!
    - Mabrouk ya oulidi!
    - Mabrouk alina ! Est-ce qu’on peut la voir?
    Mais ce ne sera possible qu’au petit matin. Maria entrera la première et l’aidera à se changer. Après, il peut les rejoindre. Une infirmière leur apporte le bébé.
    - Te voilà papa, lui dit Zahia. Félicitations!
    - Toi aussi félicitations. Maman…
    Maria a pris le bébé et le berce tout doucement. Elle est émerveillée devant lui.
    - Regardez comme il est beau!
    Zahia détourne les yeux. Pour qu’ils ne voient pas ses larmes. Mais Safir ne regarde qu’elle. Il prend sa main.
    - Ça va?
    Elle hoche la tête. Les larmes continuent de couler.
    – Dis-moi ce qui ne va pas!
    - Rien…
    Maria se tourne vers eux, en les entendant chuchoter. Quand elle voit Zahia en larmes, elle s’approche d’elle, pose le bébé pour la prendre contre elle.
    - Ne pleure pas! Tout s’est bien passé. Le bébé est magnifique! Tu ne dois pas pleurer. Dans ton état, c’est déconseillé!
    - C’est plus fort que moi…
    - à quoi penses- tu?
    Zahia tente de sourire à travers ses larmes.
    - Je pense à ma famille. à mon père…J’aurais voulu qu’il soit là ! murmure- t- elle. Safir, je voudrais le revoir…Fais-moi plaisir! Pars le chercher!
    Maria tente de la calmer. Elle la rassure.
    - Oui, oui… Il partira dès demain…Maintenant, calme-toi!
    - Promets le moi !
    Safir le jure à sa femme. Il ne lui dit pas qu’il a déjà tenté de le retrouver, l’année précédente. Il ne veut pas la faire souffrir davantage…

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  36. Artisans de l'ombre Dit :

    37eme partie

    -Alors? Tu les as trouvés?
    Safir secoue la tête. Il a passé la journée à chercher. Il s’est rendu au village natal de sa femme, a fait la tournée des quelques rares maisons, encore habitées. Les cousins éloignés de Kadour n’en savaient pas plus que lui.
    Cela faisait des années qu’il ne les avait pas vus. Depuis qu’il s’était installé à Guelma.
    Zahia est déçue.
    - Ils sont bien, quelque part, dit elle.
    - Oui. Mais pour l’instant, on ignore où, répond son mari. Ils ont loué la villa et sont installés ailleurs! Un jour, ils reviendront vivre chez eux…
    - Je vais devoir attendre qu’ils reviennent! Qui sait quand ce jour arrivera ? s’interroge- t- elle.
    - Mais il arrivera, promet Safir. Dans un an, dans dix ans, vous vous retrouverez! Je te jure que chaque année, je me rendrais à la maison!
    - C’est vrai?
    - N’en doute jamais! Avec la volonté d’Allah, vous vous retrouverez!
    Zahia le croit. Elle se rétablit vite. Maria a pris soin d’elle et du bébé. Ce dernier nommé Kamel est adorable. La vie reprend son cours. Elle lui donnera d’autres frères et sœurs. Au total, elle a eu huit enfants.
    Quinze années plus tard. Ses belles-sœurs ont fini leurs études. Soumia est enseignante et Karima est secrétaire, à la mairie. Soumia vit à Guelma et Karima non loin de chez eux.
    Les beaux-parents sont encore en vie, vieux mais affaiblis par le poids des années. Zahia s’occupe d’eux comme s’ils sont ses parents. Même si elle n’a pas oublié sa famille.
    Chaque année, Safir se rendit chez elle mais la villa est toujours en location. Ils ont fini par s’habituer à sa visite.
    - Comment vous payez la location?
    - On ne paye qu’une fois par an et il ne s’annonce jamais, répond la dame. Quand il vient, il trouve son argent prêt!
    - Vous ne savez pas où ils habitent maintenant?
    - Non.
    à chaque fois qu’il revenait sans nouvelle positive, Zahia pleurait. Il lui suffit de voir ses beaux- parents vieillis, pour imaginer son père et sa belle-mère les cheveux blancs, la peau ridée. Elle les imagine seuls, sans personne pour prendre soin d’eux.

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  37. Artisans de l'ombre Dit :

    38eme partie

    -Tu te fais des idées! Ils vont bien, dit Safir. Le fait que ton père travaille encore, le prouve!
    - Parce qu’il n’a pas le choix.
    - Il aurait pu prendre sa retraite et rentrer à la maison. Chose qu’il fera un jour, l’assure son mari. Dans un an, dans dix ans…
    - Oui. Mais s’ils tombent malades. S’ils meurent sans qu’on se soit revus avant ? émet- elle.
    - Prie pour que Dieu leur prête longue vie ainsi vous vous reverrez!
    Mais les mois, les années passent sans qu’ils aient pu entrer en contact. Presque trente ans se sont écoulés sans qu’elle ait l’espoir de revoir sa famille. Quand un jour, sa belle-sœur arrive, surexcitée…
    - Tu ne devineras jamais!
    - Non, je ne suis pas forte aux devinettes!
    - Je suis heureuse de t’apprendre que ton père et sa famille sont de retour, à Guelma!
    Zahia n’en croit pas ses oreilles. Elle a perdu espoir depuis si longtemps qu’elle a l’impression de rêver, éveillée…
    - Depuis quand le sais-tu?
    - Hier soir, on passait par votre quartier quand j’ai vu un camion déchargé des meubles et tout, raconte Soumia. Alors, on s’est arrêtés pour demander qui emménageait et quand on a entendu « Si Kadour », je peux te dire qu’on a eu la chaire de poule!
    Zahia n’y croit toujours pas. Elle se tourne vers son mari qui n’a soufflé mot tant il est ému. Autant qu’elle.
    - On part quand ? demande- t- elle.
    - Demain, répond-il en souriant. Tu vois, ta patience a été récompensée!
    - Je n’y croyais plus!
    Elle court au salon, apprendre la nouvelle, à ses beaux-parents. Maria sourit en lui caressant la joue.
    - Je suis heureuse pour toi. Si je suis en forme demain, je vous accompagnerais!
    - Oui. J’y tiens aussi!
    Elle ne dort pas de toute la nuit. Le lendemain, après avoir envoyé ses enfants, en classe, elle se prépare à partir. Maria n’est pas bien. Elle n’a pas la force de voyager. Karima passera vérifier qu’ils ne manquent de rien, durant leur absence.
    Safir n’a pas travaillé. Il est resté pour l’emmener chez elle, chez sa famille. Ils achètent des cadeaux en route. Zahia ne cesse de soupirer, traversée par mille pensées. En fait, elle est angoissée. Elle craint leur réaction.
    - Tu crois qu’ils me reconnaitront?
    - Pourquoi pas?
    - Tu crois qu’ils me pardonneront?
    - Oui…Pourquoi pas?
    Mais elle n’y croit pas vraiment.
    - Et s’ils ne veulent plus de moi ?demande- t- elle.
    Safir lui prend la main, voulant la rassurer.
    - Quoi qu’ils décident de faire, je serais toujours là! N’oublie pas que tu as ta propre famille! Tu ne risques pas de te retrouver seule!
    Zahia a un petit sourire. Elle prie pour qu’ils lui aient pardonné. Elle n’a pas oublié la petite KheÏra. Chaque jour, au fond de son cœur, elle la pleure. Elle a besoin de leur pardon, pour tourner la page…

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  38. Artisans de l'ombre Dit :

    39eme partie

    -J’ai peur, tu sais!
    Safir sourit pour la rassurer. Il prend sa main et la serre comme pour lui communiquer sa force et son assurance.
    - Tu verras, tout se passera bien!
    Zahia a le cœur qui cogne fort en apercevant la villa. Ils se dirigent vers l’entrée et quand elle frappe, elle ne peut s’empêcher de reculer. Quelques secondes plus tard, une jeune fille vient ouvrir. Elle la salue.
    - Si c’est pour nous vendre de la lingerie, on n’est pas intéressé!
    - Non, non!
    - Alors c’est pourquoi?
    - Je voudrais voir Si Kadour, dit Zahia.
    - Pourquoi? Qui êtes- vous?
    - Une parente, répond Zahia.
    - Je connais notre famille mais vous, non! D’où venez- vous?
    - De Souk Ahras. Où est ton père? Ta mère?
    - On revient d’Annaba. Ils sont partis chercher le restant de nos affaires. Ils ne reviendront pas avant deux ou trois jours, lui apprend-elle avant d’être rejointe par sa sœur.
    Il n’y a aucun doute. Elles se ressemblent comme deux gouttes d’eau. Mais cette dernière est plus souriante. Lorsqu’elle apprend qu’elle est de la famille, elle n’hésite pas à les inviter à entrer.
    - Excusez-la! Elle fait subir un interrogatoire, à chaque inconnu! Elle n’a aucune manière!
    Safir refuse d’entrer. Il veut l’attendre dehors. Zahia pénètre à l’intérieur. La couleur du couloir est restée la même. Elle se rend au salon, les précédant sans s’en rendre compte.
    - Comment savez-vous où il se trouve ?
    - Parce que j’ai vécu ici. Il y a longtemps, dit-elle, les yeux larmoyants. J’y ai vécu heureuse jusqu’au jour…
    - Papa avait pris d’autres locataires?
    - Non…
    En regardant autour d’elle, elle s’aperçoit que la photo familiale est toujours là.
    - Il a été bien entretenu, remarque- t- elle.
    - On l’a toujours eu. Dans notre appartement à Annaba, répond la plus âgée. Vous l’avez déjà vu?
    - Oui…
    Zahia s’en approche et lui montre la fille.
    - Là, c’est moi! Papa, Aïcha et le bébé qu’on a perdu, Kheïra!
    Les deux jeunes filles échangent un regard.
    - Vous êtes Zahia?
    - Oui.
    - Notre sœur! s’écrient-elles en même temps avant de la prendre dans leurs bras. Mais ils vous croyaient morte!
    - Non, non…
    Zahia pleure de joie, elle ne s’attendait pas à cet accueil chaleureux!

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  39. Artisans de l'ombre Dit :

    0eme partie

    -Moi, c’est Sabrina et Lilia…Dis Zahia, qu’était-il arrivé?
    - Beaucoup de choses, murmure- t-elle. J’ai mal rien qu’en y pensant! Que de mauvais souvenirs!
    - Raconte nous! Pourquoi te croyaient-ils morte?
    - Je l’ignore. Mais j’avais paniqué…Je n’arrivais pas à imaginer la maison, sans Kheira! Une adorable petite fille…C’est par ma faute qu’elle était morte!
    - Non! Ce n’est pas possible!
    - Si, insiste Zahia. Je ne sais pas ce qui m’avait prise à cet instant là! J’avais marché devant moi. J’étais montée dans le premier transport partant!
    - Mais pourquoi tu n’es pas revenue?
    - J’avais peur. Je ne supportais pas l’idée que papa puisse m’en vouloir! Leur peine, leur chagrin, c’était trop pour moi…Si vous aviez connu Kheira, elle était si belle, si adorable!
    - Cette peste! Tu parles!
    Zahia bat des cils. Il lui faut un moment pour comprendre.
    - Tu dis « cette peste » ? Tu la connais?
    - Et comment, soupire Sabrina. C’est notre grande sœur!
    - Non, ce ne peut pas être elle! Elle était morte…Aïcha criait, dit Zahia en portant les mains, aux oreilles comme pour ne plus l’entendre. Oh Mon Dieu…
    Les deux sœurs rient.
    - Si, c’est bien elle!
    - Peut-être qu’ils ont eu une autre fille et qu’ils lui ont donné le même prénom, pour chérir son souvenir, émet Zahia qui n’y croit pas. On l’adorait…
    - C’est vrai qu’elle peut l’être, reconnait Sabrina. Papa l’a gâtée…Elle fait ce qu’elle veut de lui, de maman!
    - Peut-être, mais rien ne prouve qu’il s’agit de ma Kheïra!
    Sabrina et Lilia se rappellent que leurs parents parlaient parfois des frayeurs qu’elle leur avait donnés. Depuis ils tremblent pour elle et elle en profitait.
    - J’ai toujours culpabilisé…Si seulement il s’agissait d’elle! murmure Zahia. Je pourrais dormir tranquille. Ils ne m’en voudront pas! Ils ne me demanderont pas de partir!
    Elles la rassurent.
    - Tu parles bien de Kheïra…Je vais te montrer ses photos!
    Lilia sort d’un carton, un vieil album et là, il y a des photos de Kheira, petite puis grande. Zahia ferme les yeux. Elle est bouleversée, heureuse, soulagée. En regardant les photos, elle a l’impression qu’un immense poids lui a été retiré de la poitrine. Il s’agit bien de Kheïra, de sa petite sœur bien-aimée.
    - J’ai besoin de respirer…je sors…
    Lorsque Safir la voie en larmes, bouleversée, il pense que les retrouvailles se sont mal passées.
    - Avec papa, souffle-t-elle. Elle est avec lui…Khïra, elle n’est pas morte!

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  40. Artisans de l'ombre Dit :

    41eme partie

    -C’est incroyable, dit Safir. Tu t’es culpabilisé pour rien, pendant tout ce temps! lui fait-il remarquer. Qu’avait- elle alors?
    - Je l’ignore. Quand ils reviendront d’Annaba, ils me le diront! Mes sœurs sont adorables!
    - Ça y est! Tu les as adoptées!
    Zahia sourit, heureuse comme jamais. Ils rentrent à la maison. Ses enfants sont avec leurs grands- parents. Ils partagent sa joie quand ils apprennent la nouvelle.
    - Dieu soit loué, ton père et sa femme sont encore en vie. Maintenant que vous allez enfin vous retrouver!
    - Il était temps!
    Le dîner est préparé dans une ambiance de fête. Zahia a encore l’impression de rêver. Mais il y a une photo que ses sœurs lui ont donnée. Une photo de toute la famille. Elle a découvert avoir trois sœurs. Son père est devenu chauve. Il lui parait avoir pris du poids.
    Elle est heureuse de savoir qu’il a eu de la chance, en se trouvant un meilleur travail, à Annaba. Il était devenu le garde-corps du wali. Il avait bénéficié d’un logement de fonction.
    Cela explique pourquoi ils avaient quitté la région. Pendant toutes ces années.
    Elle sourit en pensant à la tête que ferait son père, en voyant ses enfants. Les plus âgés sont à la fac. Ses enfants sont grands. Elle a sa propre famille mais même si elle était bien entourée et aimée, il lui manquait; sa famille.
    Zahia décide de vite, y retourner. Moins d’une semaine après, accompagnée de ses beaux- parents et d’une de ses filles, ils se rendent à Guelma.
    Kadour, Aïcha et les filles sont là. Ils les accueillent chaleureusement. Son père la prend dans ses bras. Il n’en revient pas. Il pleure, lui aussi. Même Aïcha…
    - Si on m’avait dit qu’on se reverrait!
    - Tu ne m’as pas cherchée?
    - Si, les premiers jours…Mais pourquoi es-tu partie?
    - J’avais peur. Je croyais Kheïra morte. J’étais persuadée que vous m’en voudrez à mort!
    Aïcha en larmes, en pensant à ce qui était arrivé, la rassure:
    - Elle avait fait une crise…Elle avait été hospitalisée et ce, plusieurs fois ensuite! Tu n’en étais pas responsable! J’ai toujours regretté de m’en avoir prise à toi! Je n’aurais jamais dû crier après toi! Me pardonneras-tu un jour?
    - Et comment ? s’écrie Zahia. Tout ce qui compte pour moi, c’est de vous avoir retrouvés!
    - Nous aussi, tu ne peux pas t’imaginer notre joie! C’est comme si tu venais de renaître! Dommage que Kheïra ne soit pas là…
    - Ce n’est qu’une question de jours! Dès qu’elle rentre d’Alger, vous venez à la maison ! les invite- t- elle. J’ai hâte de la revoir!
    Ce jour-là, Kadour va acheter un mouton et l’égorge. Il demande à Safir d’aller chercher leurs enfants. Ils réunissent la famille et les amis que tous croyaient Zahia, perdue à jamais. Les absents sont Kamel qui étudie à Constantine et Kheïra qui travaille à Alger. Elle a dû vite y retourner.
    - Ils viendront une autre fois, dit Safir.
    - Inch Allah!

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  41. Artisans de l'ombre Dit :

    42eme partie

    Zahia et Kheïra ne se reverront pas avant plusieurs semaines. Kheïra a fini ses études d’anglais et enseigne dans un grand lycée d’Alger. Elle ne vient que durant les vacances. à sa dernière visite, sa famille retournait vivre à Guelma.
    Elle n’a aucun souvenir de Zahia. Elle n’était qu’un bébé quand le drame est arrivé. Kheïra est une très belle fille. Zahia comprend que ses sœurs la jalousent un peu.
    - C’en est un, insiste- t- elle. En fait, deux drames en un! Moi, j’ai failli mourir! Toi partie, papa se retrouvait sans ses filles chéries!
    - Nous voilà réunies! Oublions le passé et regardons vers l’avenir! dit Zahia à sa petite sœur qu’elle garde serrer contre elle. Tu m’as manquée! Je me rappelle ton odeur! Tu adorais dormir sur mon bras. Je te chantonnais des berceuses!
    - à t’écouter, tu remonterais le temps juste pour le refaire!
    - Si seulement c’était possible!
    Elles rient. Le courant passe bien entre elles. C’est comme si elles n’avaient jamais été séparées. Zahia la garde chez elle, une semaine. Le temps de se raconter des choses et pour lui permettre de connaître la famille.
    - C’est dommage que Kamel ne soit pas venu, regrette- t- elle. C’est le seul que je n’ai pas rencontré!
    - Tout comme toi, il étudie et lui, ce n’est pas à Alger mais à Constantine…Il fait des études d’ingénieur, ajoute la mère. Il vient rarement. Quand il a du temps libre, il travaille au marché. Sa bourse ne lui suffit pas et il refuse l’argent de son père!
    - Il est têtu!
    - Peut- être? émet Zahia.
    - J’aimerais bien le connaître!
    - à moins de te rendre à Constantine, je ne vois pas comment?
    Mais Kheïra n’en a pas le temps. Elle a apporté du travail avec elle. Un paquet de copies à corriger.
    - On se verra un jour! C’est inévitable, on n’est d’une même famille!
    Zahia sourit. Elle est si heureuse. Elle éprouve de la peine lorsque Kheïra décide de rentrer à la maison. Elle s’est levée tôt, pour partir avec Safir.
    - Tu reviendras avant de partir à Alger?
    - Si j’en ai le temps! Mais les prochaines vacances, je compte bien les passer ici, promet-elle. Prends bien soin de toi et de ta famille!
    Zahia la serre contre son cœur et a du mal à se séparer d’elle. Safir la prie du regard. Elle consent enfin à les laisser partir.
    Ses enfants remarquent qu’elle est triste et silencieuse. Parfois lointaine.
    - Ça va maman?
    Alors elle se tourne vers eux, en souriant.
    - Oui?
    - Tu penses à Kheïra?
    - Oui. Elle me manque déjà…

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  42. Artisans de l'ombre Dit :

    43eme partie

    Lorsque Kamel rentre à la maison, il est surpris de trouver son grand-père et ses tantes. Personne ne l’a prévenu. Il le reproche à sa mère.
    - Vous auriez pu m’appeler, lui dit-il. Pourquoi ne l’avez-vous pas fait?
    - On t’aurait appelé au marché?
    Kamel reconnaît qu’ils n’ont pas où l’appelé. Il pense enfin à lui demander comment se sont passés les retrouvailles. Zahia sourit et elle lui raconte tout. Il ne se doute pas que Kheira est en vie.
    - Mais tu disais qu’elle était morte!
    - Je l’avais cru. Finalement, elle s’en est sortie! C’est une battante!
    Le jeune homme est heureux pour sa mère. Il partage sa joie.
    - Ton rêve s’est réalisé! Vous vous vous êtes retrouvés, c’est merveilleux!
    - Figure-toi que ton grand-père a donné une fête!
    - Oh non!
    Kadour pose la main sur l’épaule de son petit-fils.
    - On en donnera une autre quand tu viendras, lui promet-il. On préparera uniquement les plats que tu aimes!
    - Je viens quand?
    - Demain, répond le grand-père. Vous êtes tous invités!
    Mais Zahia refuse.
    - Non, une autre fois, répond- elle avant de lui expliquer pourquoi. On viendra lorsque Kheïra sera là!
    Son père a beau insister, seul Kamel s’y rendra. Pour mieux faire connaissance avec la famille. Il ira ensuite chez sa tante Soumia.
    Celle-ci le trouve changer.
    - Tu es devenu un jeune homme. Je vais dire à ta mère, de vite te marier!
    - Et mes études?
    - Tu peux te marier et étudier, dit-elle. L’un n’empêche pas l’autre!
    - Avant…Moi, je veux avoir un travail et un toit avant de me marier! réplique Kamel très sérieux. Ne parle pas de ton idée à mes parents! Je ne veux pas me retrouver la corde au cou à mon âge!
    - À ton âge, ton père était déjà père deux fois!
    - Non, non!
    Soumia fronce les sourcils.
    - Dis, tu n’aurais pas quelqu’un?
    Le jeune homme rougit et baisse les yeux avant de grommeler:
    - Qu’est ce que tu ne vas pas chercher?
    Et il part. Ne laissant pas le temps à Soumia de le rattraper. Elle n’en revient pas…

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  43. Artisans de l'ombre Dit :

    44eme partie

    À la première occasion, Soumia se rend chez son frère. Son mari ayant à faire, à Souk Ahras, elle a tenu à l’accompagner. Elle tient à parler à sa belle-sœur. Elle ignore pourquoi mais elle ressent un malaise, à chaque fois qu’elle pense à son neveu.
    Elle rapporte tout à Zahia. Celle- ci trouve qu’elle exagère.
    - Mais je ne lui ai rien dit de déplacer. On discutait quand il est parti comme ça, comme si une mouche l’avait piqué!
    Zahia la rassure. Elle n’a rien vu dans le comportement de son fils qui puisse la laisser penser qu’il a été contrarié.
    - Je lui avais demandé s’il avait une amie et puis, sans un mot, sans même me dire au revoir, insiste Soumia. Ce n’est pas normal! Je connais Kamel et je suis inquiète!
    - Tu ne devrais pas!
    - T’en a-t-il parlé?
    - Non.
    - Tu devrais garder un œil sur lui, lui conseille Soumia. Je pense qu’il a une petite amie!
    - Inch Allah!
    - Oui mais pourquoi me le cacherai-t-il?
    - Par pudeur. Tu es sa tante, après tout! Il ne peut pas tout te raconter!
    - Non, je suis persuadée qu’il y a autre chose, insiste la tante. As- tu déjà fouillé dans ses affaires? Dans son portefeuille?
    - Non! s’écrie Zahia. Jamais je ne me le permettrai! Mon fils est sérieux et respectueux…Soumia, je ne te comprends pas!
    - La prochaine fois qu’il viendra, n’hésite pas à le faire! Juste pour être rassurée! Il vit loin d’ici. Peut- être qu’il fréquente une fille de mauvaise vie?
    - Non, il ne ferai pas ça!
    - Qu’en sait-on?
    L’inquiétude de sa belle-sœur la gagne.
    - Tu crois vraiment qu’il a de mauvaises fréquentations?
    - Ça ne te coutera rien de le surveiller un peu, dit Soumia. Écoute, un jour, envoie Safir le voir!
    - C’est promis. Je vais lui en parler.
    - Bon, moi, il faut que je rentre!
    - Reste passer la nuit! l’invite Zahia en la voyant prendre son sac à main. Je vais dire à ton mari, de te laisser!
    - Une autre fois!
    Soumia est décidée à ne pas rester. Avant de partir avec son mari, elle va rester un moment avec ses parents. Puis elle part, laissant Zahia, très perplexe et très inquiète. Soumia n’a pas l’habitude de parler pour rien…

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  44. Artisans de l'ombre Dit :

    45eme partie

    Safir remarque tout de suite que quelque chose ne va pas. Zahia est moins loquace. Elle est pensive. Il est évident qu’elle se fait des soucis.
    - Les enfants se sont mal comportés?
    - Non.
    Le lycée a appelé? Des camarades sont venus se plaindre de l’un d’eux ? demande-t-il. Si c’est le cas, je leur interdirai…
    - Non.
    - Des garçons importunent les filles, à leur sortie du lycée ?
    - Non, répond-elle.
    Cette fois, il s’emporte presque.
    - Dis-moi alors ce qui a chassé ton sourire! Pourquoi ton front est plissé? Pourquoi tes sourcils ne font qu’un? Tu es inquiète et angoissée!
    Zahia soupire si profondément qu’il lève les yeux au plafond.
    - J’attends que tu me répondes! Soit tu le fais tout de suite, soit je les réunis tous! Celui qui en est la cause, sera forcé de se dénoncer!
    - Ils n’ont rien fait! Wellah!
    - Bien. Alors qu’as-tu?
    - Rien. Je…Je suis mère. Une maman s’inquiète toujours pour ses enfants!
    - Donc l’un d’eux te cause du souci ! en conclut-il. Qui?
    - Kamel, souffle-t-elle.
    Safir s’assoie.
    - Quoi Kamel?
    - Soumia est venue. Elle m’a rapporté une discussion. D’après elle, sans raison, il est reparti de chez elle, fâché! Sans même lui dire au revoir!
    - Ce n’est pas dans ses habitudes ! réplique Safir. C’est un garçon respectueux! Il a dû se passer quelque chose!
    Elle lui explique pourquoi. Safir comprend son inquiétude.

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  45. Artisans de l'ombre Dit :

    46eme partie

    -Comment faire pour en avoir le cœur net?
    - Tu pourrais lui rendre visite! propose Zahia. Même ta sœur y a pensé!
    - Il trouvera ça louche!
    - Je sais. Mais tu dois t’y rendre, insiste- t- elle. Prétexte avoir été chez un ami!
    - Il sait que je n’ai pas d’ami, là-bas! réplique Safir.
    - Que tu as rendu service…débrouille-toi!
    Safir s’arrange pour ne pas travailler le mardi et il se rend à Constantine, un sac à la main. Zahia lui a préparé des gâteaux, de la galette.
    Quelques heures plus tard, il débarque à la cité U et il demande après son fils. Il sait que le mardi, il a cours uniquement l’après- midi. Il doit le trouver dans sa chambre. Après avoir décliné son identité, les gardiens le laissent entrer.
    Il connaît l’adresse et il demande à un étudiant de l’accompagner. Une fois devant la porte d’où sort de la musique, il frappe longtemps sans qu’on vienne lui ouvrir.
    Il saisit la poignée et la tourne pour voir si elle est ouverte. Elle l’est. Il la pousse et tombe sur son fils qui dort avec des stops bruit, aux oreilles.
    - El hadj!
    Safir se tourne vers le coin de la petite chambre d’étudiants où un jeune révise. Il écrase la cigarette qu’il a aux doigts et cache la sous- tasse qui sert de cendrier, sous la table.
    - Je suis le père de Kamel. Pouvez- vous baisser le son? Vous ne respectez jamais le sommeil, des autres!
    - Ça ne l’empêche jamais de dormir, le rassure-t-il en lui obéissant. Touchez- le pour le réveiller!
    - Pourquoi dort- il à cette heure?
    - Hier soir, il a travaillé comme videur, répond le camarade de chambre, sans le regarder.
    - Videur? Où ça?
    Il regarde vers Kamel qui bouge dans son sommeil. Il semble hésiter, à répondre. Comme s’il craint d’être entendu…

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  46. Artisans de l'ombre Dit :

    47eme partie

    Safir regarde son fils se tourner et fait signe au camarade, de le suivre, dans le couloir. Il pose le sac avant de le rejoindre.
    - Kamel est videur où?
    - Dans un bar!
    - Ya latif! Je croyais qu’il travaillait au marché!
    Le jeune hausse l’épaule.
    - C’est à lui qu’il faut demander!
    - Oui. Excuse-moi…Mais…a-t- il une amie?
    - Non. Wellah que non! Il travaille seulement dans ce bar, répond le camarade.
    - Merci, mon garçon!
    Ils retournent à la chambre. Kamel dort encore. Safir s’assoie sur le bord du lit puis le réveille en lui tapotant à l’épaule. Son fils ouvre péniblement ses yeux.
    - Papa? Qu’est-ce que tu fais là?
    - Je passais par ici et j’ai voulu te dire bonjour! Je t’ai apporté des choses, de la part de ta maman, dit Safir en approchant le sac.
    Kamel y jette un coup de d’œil et sourit.
    - Hum! Ça sent bon! Remercie maman!
    - Toute la famille te passe le bonjour!
    - Tu les embrasseras pour moi, réplique le jeune homme en s’asseyant. Ils vont bien?
    - Oui, oui, répond le père. Mais toi, tu me parais fatigué! Ce sont tes études qui t’éreintent à ce point?
    Kamel répond par un petit « oui ». Il se lève et enfile sa chemise.
    - Et tu continues à travailler au marché?
    - Non, j’ai arrêté!
    - Pourquoi?
    - C’est la période des examens, répond le jeune homme. Après, je reprendrai!
    - Si tu as besoin d’argent, pourquoi n’acceptes-tu pas que je t’aide?
    - Je suis assez grand, pour me débrouiller seul!
    - Ce que tu es têtu!…Bon, il faut que je retourne à Souk-Ahras, dit Safir. Quand viendras-tu à la maison?
    - Quand je pourrais. Embrasse- les tous pour moi, surtout les vieux!
    - Je n’y manquerai pas! Ne fais pas de bêtises !lui conseille Safir en le serrant dans ses bras. Si tu as besoin de quoi que ce soit, tu sais où nous trouver!
    - Oui, merci papa! Bon retour!
    Safir rentre déçu. Il ne comprend pas pourquoi il ne lui a rien dit de son nouveau travail. Son camarade de chambre a affirmé qu’il n’a pas d’amie. Mais rien ne lui prouve que c’est la vérité…

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  47. Artisans de l'ombre Dit :

    48eme partie

    -Je te jure qu’il va bien! Il n’a pas de petite amie, ajoute-t- il à sa femme. Son camarade de chambre m’a dit qu’il étudie et travaille! Qu’il ne se consacre qu’à ses études et à son travail! Wellah!
    - Hamdoullah!
    - Tu vois, tu te faisais du souci, pour rien!
    Elle est soulagée de le savoir.
    - Et si son camarade le couvrait?
    - Kamel dormait quand je suis arrivé, dit Safir. On a discuté dehors. Le jeune était à l’aise. Il ne craignait pas d’être entendu. Tu comprends?
    - J’espère que c’est la vérité! Il faudra que je l’apprenne à ta sœur! Quand m’emmèneras- tu à Guelma ?
    - Quand tu veux.
    Mais l’état de santé de sa belle- mère s’est dégradé. Elle décide d’attendre qu’elle aille mieux, pour aller voir sa famille. D’ailleurs, dès que ses belles-sœurs apprennent qu’un médecin a été appelé à son chevet, elles viennent.
    Elles pleurent en la voyant si faible. Son regard est éteint. Il faut se pencher tout près, pour l’entendre respirer.
    - Qu’a dit le médecin?
    - Elle n’a rien, répond Safir tout doucement. Elle est faible parce qu’elle est vieille! C’est comme ça…
    - Oh non! Il a dit combien de temps, elle va être ainsi?
    - Non. Mais elle est consciente de tout. Parfois, quand elle le peut, leur dit- il, elle parle!
    - Depuis tout à l’heure, elle dort! Nos discussions ne semblent pas la gêner!
    - Wellah que tu t’angoisses pour rien!
    Mais Safir a beau les rassurées, elles n’y croient pas. Elles n’y croient plus. Elles savent que leur mère est mourante. Elles sont soulagées par le fait qu’elle ne souffre pas.
    Elles n’auraient pas supporté de la voir, proie à la douleur. Soumia ne passera qu’une nuit, à la maison. Elle rentrera chez elle, le cœur meurtri. Karima qui vit pas très loin, vient quand elle le peut.
    Elle aide Zahia et les filles lorsqu’elles doivent lui faire la toilette, la changer ou lui donner à manger. Maria ne se nourrissait plus elle- même. Zahia passe ses nuits, à surveiller son sommeil. Elle se rappelle la mort de sa grand- mère puis des bienfaiteurs de Guelma, Allah irham houm. Ils sont morts paisiblement. Elle aussi connaît le même sort. Après avoir pris une tasse de lait, elle ferme les yeux après avoir regardé son vieux mari. Ce dernier impuissant devine que c’est son dernier regard.
    - Elle est morte…
    Zahia s’approche et ne sent plus son souffle léger. Elle se prend la tête entre les mains, la pleurant. Maria l’a aimée comme sa propre fille. Elles ont vécu heureuses depuis le premier jour. Elle a eu la chance, d’avoir une mère de cœur. Ils comprennent qu’elle se sente comme une orpheline.
    Tous compatissent à sa douleur. Son mari, ses belles-sœurs, ses enfants l’entourent et la soutiennent dans cette épreuve. Même Kheïra venue d’Alger n’a pas le cœur, à la laisser dans cet état.
    Elle ne repartira pas avant qu’elle se soit ressaisit. Kamel aussi…

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  48. Artisans de l'ombre Dit :

    49eme partie

    -J’ignore ce que je serais devenue sans vous !
    Zahia soupire avant de les remercier. Sans sa famille, sans ses enfants, elle ne se serai jamais remise de la mort de sa belle-mère.
    Kamel n’est pas retourné à ses études. Kheïra a arrêté de travailler. Elle est restée, pour la soutenir. Elle est aussi aux petits soins, avec ses enfants. Elle les conseille, assiste ceux qui ont des difficultés, dans certaines matières. Elle sort parfois avec Kamel, pour leur choisir des livres. Ils s’entendent bien.
    Elle s’est mise à leur cuisiner dès son arrivée. Zahia et ses belles-sœurs ont beaucoup apprécié. Le vieux beau-père a droit aussi à quelques attentions. Elle lui prépare des bains de pieds. Aidée de Kamel, elle le sort dehors. Le soutenant tous deux, ils l’emmènent en promenade. Le vieil homme retrouve de la sérénité et son sourire. Même si ce n’est pas tous les jours, la promenade lui est bénéfique.
    Enfin, elle est si présente que le jour de son départ, à Guelma, pour se préparer à rentrer à Alger, tous la pleurent. Elle leur promet de vite revenir. Kamel part aussi, le même jour.
    Zahia a l’impression que la maison s’est vidée d’un coup. Ceux qui y mettaient de l’ambiance, sont partis et toute la famille a hâte de les revoir.
    - Khali Rabah, que voudrais-tu que je te fasse pour le dîner?
    - Je n’ai pas d’envie particulière, répond-il d’une voix faible.
    - Ton bain de pieds, tu le voudrais maintenant ou avant d’aller te coucher?
    - Maintenant.
    Elle le lui fait avant d’aller préparer le dîner. Ses enfants sont dans leur chambre et se consacrent à leurs révisions. Les filles ont pris l’habitude de ranger la cuisine après le dîner.
    Zahia va tenir compagnie à son beau-père et son mari, au salon. Ils parlent de Kheïra.
    - C’est une fille, remarque son beau-père. Elle est en âge de se marier!
    - Il faut croire que son destin n’est pas encore arrivé!
    - Elle s’entend bien avec les enfants, poursuit-il. Surtout avec Kamel…
    - Ils ont juste trois ans de différence, leur rappelle-t-elle. C’est pourquoi ils s’entendent si bien!
    Safir pince les lèvres. Il semble sceptique et ne pas apprécier leur attachement…

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  49. Artisans de l'ombre Dit :

    50eme partie

    -C’est trop ! Elle en a trop fait ! Zahia est choquée par les propos de son mari.
    - Il a raté tous ses cours. Elle aurait pu l’encourager à retourner à Constantine, poursuit Safir. Ta sœur a failli à sa mission !
    - Elle s’est occupée de khali Rabah, des enfants ! Elle a été gentille et serviable !
    - C’est ça, elle en a trop fait, réplique son mari. Kamel ne la lâchait pas d’une semelle ! Je la tiens pour responsable de son échec si cela arrive !
    - Non ! Ma parole…Tu as une mauvaise opinion d’elle ! Tu sembles oublier que c’est ma sœur ! Si elle est restée, c’est parce que j’étais mal ! Ce n’est pas vrai…Je n’en crois pas mes oreilles !
    - Zahia, je ne dis pas du mal d’elle !
    - Parce que tu trouves que ce sont des éloges ? rétorque- t- elle. Non, tu en veux à ma sœur ! Et je ne comprends pas pourquoi !
    - Pourquoi tes autres sœurs ne sont pas restées ?
    - Elles ont leurs occupations, dit elle.
    - Kheïra a abandonné son travail, pour rester avec nous !
    - C’est suspect à tes yeux ! Tu oublies qu’on fait tout, pour rattraper le temps perdu ! Si elle était là, ce n’est pas pour Kamel mais pour moi et toute ma famille ! Chasse tes idées noires ! Et erham waldik, ne me tiens plus des propos de ce genre !
    - Ya Zahia ! Ya Zahia !
    Elle change de pièce, refusant de l’écouter une seconde de plus. Sa sœur n’a rien fait de mal. Elle ne comprend pas pourquoi il a cette mauvaise opinion d’elle. Il devrait être content. Ses enfants ont une tante avec qui ils s’entendent à merveille. Même Kamel est en confiance avec elle.
    Elle reconnaît au fond d’elle- même qu’elle n’a pas apprécié qu’il sèche les cours, pour rester avec eux. Mais il est sûr d’avoir son année. Alors pourquoi en faire tout un plat ? Il est parti, lui aussi.
    Elle en veut à son mari, de lui avoir fait de la peine, même involontairement.
    Après s’être assurée que son beau- père dort ainsi que leurs enfants, elle va à sa chambre. Elle se met au lit et feint de dormir quand Safir l’y rejoint.
    - Il se peut que je me trompe ! La prochaine fois, observe-les !
    Elle sent que si elle lui répond, ils vont se fâcher. Voyant qu’elle ne bouge pas, il finit par abandonner. Elle passe une très mauvaise nuit. Perturbée par ces propos.
    Ce qu’il insinue est horrible. IL ne semble pas s’en être rendu compte mais s’il dit vrai, c’est une relation incestueuse. Elle n’en croit pas capable son fils et sa sœur. Son mari se trompe. Elle a hâte de lui prouver le contraire !

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  50. Artisans de l'ombre Dit :

    51eme partie

    Il faudra attendre plusieurs semaines avant que Kheïra ne revienne à Guelma. Elle ne leur rendra pas visite. Zahia ne l’aurait pas su si leur père ne s’était pas déplacé pour l’emmener le week- end. Il tenait à les voir toutes.
    Aïcha a préparé un succulent dîner. Elles ont l’occasion de parler du passé, de la vilaine petite fille qu’elle était alors.
    Si elles en rient aujourd’hui, c’est parce qu’elles s’entendent bien maintenant. à cette époque, il y a eu des nuits où l’ambiance glaciale ou des querelles qui n’en finissaient pas. Elles se gardaient rancune longtemps.
    - Ton père et ta grand- mère, Allah irhamha, t’avaient trop gâtée ! Tu étais arrogante, insolente ! Mon Dieu ! Et j’en passe…
    - Mais j’avais fini par m’assagir !
    - Oui. Il en a fallu du temps et de la patience, dit Aïcha. Mais c’est vrai que tu avais fini par changer !
    - Heureusement…Comment était Kheïra ?
    Aïcha fait une moue.
    - Adorable ! C’est le bon terme, ajoute- t- elle. Elle a toujours eu ce qu’elle voulait ! Elle sait être persuasive quand elle le veut !
    - A- t- elle un ami ?
    Aïcha hausse l’épaule.
    - Je crois…Sinon elle aurait cherché à travailler, ici ou dans la région !
    - Oui. Il y a longtemps qu’elle a commencé à travailler ?
    - Bientôt deux ans. Elle vit en pension…On l’y appelle de temps à autre mais pas tous les jours, dit la mère. Pourquoi toutes ses questions ?
    - J’avais envie d’en savoir plus !
    Kheïra les rejoint à cet instant précis.
    - Et si je vous disais que mes oreilles ont sifflé !
    Aïcha et Zahia rient, surprises.
    - On parlait de toi ! dit sa mère. On trouve que tu devrais venir travailler ici !
    - Non, je suis bien à Alger !
    - On ne te manque pas ?
    La jeune femme secoue la tête en riant.
    - Quand c’est le cas, la rassure- t- elle. Je viens !
    - Oui, mais on est vieux ! On aimerait bien t’avoir près de nous, insiste Aïcha.
    - Maman, mazel el baraka !
    - Qui sait vraiment ?
    - Peut- être qu’elle ne nous dit pas tout ? émet Zahia. Ton cœur est là bas, n’est-ce pas ?
    - Hélas, soupire- t- elle.
    - Il t’aime au moins ?
    - Oui.
    - Alors pourquoi vous ne vous mariez pas ?
    - Il n’a pas de situation stable, répond Kheïra. Mais dès que c’est le cas, il viendra !
    Zahia et Aïcha la pressent de questions. Que fait- il dans la vie ? Comment est- il ? Est- ce que sa famille est au courant ? Les connaît- elle? Que des questions auxquelles elle n’a pas envie de répondre. Elle les trouve bien curieuse d’un coup…

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  51. Artisans de l'ombre Dit :

    52eme partie

    -J’ai hâte de le connaître, dit Aïcha. Il me tarde d’avoir un gendre !
    - Si j’écoutais mon ami, hé bien, il serait déjà venu, confie Kheïra. Mais je préfère attendre d’être sûre de moi !
    - Sûre de toi ? reprennent Aïcha et Zahia en chœur. Pourquoi ?…Nous, de notre temps, on était mariée sans même être consultée ! ajoute la mère. Je ne connaissais pas ton père mais cela n’empêche pas qu’on est heureux !
    - Cette époque est révolue, réplique Kheïra en riant. Maintenant, on se fréquente un peu avant de se décider ! Pour savoir si on a des affinités et tout…Après, on se fiance !
    Aïcha secoue la tête et lève le doigt, l’avertissant.
    - N’allez pas jouer ensemble ! Tu n’es pas une fille pour que je te mette sur tes gardes ! Vos rendez- vous, ils ont lieu où ?
    - Dans des endroits publics, bien sûr ! Mais qu’est-ce que tu vas penser ? Tu ne crois tout de même pas qu’on va franchir le pas, comme ça ? s’écrie sa fille avant de se reprocher d’en avoir trop dit. J’aurais dû me douter que tu l’interprèterais mal !
    - Non, non, c’est toi qui risques de te laisser entraîner ! Si ton père l’apprend, tu peux être sûre qu’il te demandera de rentrer au bled !
    - Tu ne lui diras pas ? Dis, tu ne lui diras rien !
    - à une condition. Je veux être informée de tout ce qui se passe là-bas !
    Kheïra le lui jure. Elle n’aura aucun secret. En fait, elle ne leur dit pas tout. Il est vrai qu’elle a un ami, depuis quelques semaines. Elle lui parle presque tous les jours. Ils discutent sur internet, chaque soir. Elle sait beaucoup de choses, sur lui, sur son travail, sur sa famille. Une famille nombreuse qui l’empêche d’avoir de l’intimité lorsqu’il est à la maison.
    Alors, il s’y rend rarement. Et dans sa ville natale, il n’y a pas où se connecter. Il ne peut pas se passer d’elle, de leur discussion. Depuis quelques temps, il veut la rencontrer. Elle hésite à lui accorder un rendez- vous.
    - Comment s’appelle- t- il ?
    - Karim, répond- elle.
    - Quel âge a- t- il ?
    - Mon âge, soupire- t- elle. Il n’est pas vieux, ajoute- t- elle comme pour les rassurer. Il ne s’est jamais marié !
    - Ce n’est pas un coureur de jupons, j’espère !
    - Je ne crois pas !
    - Alors, enquête sur lui, lui conseille sa mère. Tu ne peux pas te permettre de t’afficher, avec lui ! Toux ceux qui connaissent sa mauvaise réputation, médiront sur ton compte !
    Comment enquêter sur lui ? Elle réalise qu’elle ne connaît pas l’essentiel. Rien ne prouve qu’il s’appelle bien Karim, qu’il est bien ce qu’il dit, un jeune homme, à la recherche de la femme de sa vie. Peut- être, est- ce un pervers ? Un mythomane ? Pour le savoir, Kheïra doit accepter de le rencontrer.
    Sa mère ne lui laisse pas le choix. Si elle lui demande une description, elle ne pourra rien lui dire. Elle ne lui a jamais demandé de photo. Il lui a dit être un grand et beau blond.
    Mais peut- être qu’il est brun, laid et bossu ?
    Non, elle ne peut pas s’attarder sur ce sujet, car il s’avère plein d’épines. Et puis, en plus de répondre aux questions de sa mère, il y a sa sœur Zahia, qui est tout aussi protectrice. Elle s’excuse, trouvant un prétexte, pour les abandonner. Toutes deux savent qu’elle a pris la fuite, pour ne pas répondre à leurs questions.
    - Tu trouves qu’on y a été un peu fort ?
    Zahia rassure sa belle-maman. Elles ont posé les bonnes questions, au bon moment. Zahia est bien soulagée. Elle a hâte d’apprendre la nouvelle à Safir…

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  52. Artisans de l'ombre Dit :

    53eme partie

    CHAPITRE II “LA RENCONTRE INATTENDUE”

    Lorsqu’elle retourne chez elle, elle est bien heureuse d’apprendre à son mari qu’il se faisait du souci pour rien. Kheïra a non seulement un ami, et c’est du sérieux.
    - Ils ont l’intention de se marier. Ils se voient régulièrement…
    - Je m’excuse, dit Safir. Je ne pouvais pas douter que j’étais dans l’erreur ! J’ai tiré des conclusions hâtives !
    - Oui. Tu sais, elle a trouvé nos questions indiscrètes. Aïcha lui a fait promettre de la tenir au courant sinon elle en parlera à papa.
    - Elle n’est pas en âge de faire des cachoteries ! Elle est en âge de fonder un foyer. Il serait temps…
    - C’est une belle fille, en plus instruite. Elle fera le bonheur de n’importe quel homme.
    Kheïra, qui est repartie à Alger par train, pense à tout ce qui s’est passé. Elle regrette de les avoir mis dans la confidence.
    Maintenant elle n’a pas le choix. Elle devra accepter le rendez-vous de Karim et qui sait comment cela se passera entre eux. Elle avait dit que leur relation était sérieuse et qui sait si ce sera toujours le cas après leur rencontre.
    Kheïra, une fois rentrée et reposée du voyage, va se connecter et lui laisser un message.
    “J’accepte de te rencontrer. Si tu es libre ce lundi, fais-moi signe. On s’entendra sur l’heure et le lieu du rendez- vous.”
    Elle s’attend à ce qu’il réponde tout de suite. Mais Karim prend tout son temps.
    Elle l’imagine pris par son travail ou par des problèmes de famille. Lui aussi doit en avoir. Des problèmes qui prennent beaucoup de temps vu qu’elle restera sans nouvelle de lui, pendant trois semaines. Entre-temps, elle a gagné quelques cheveux blancs.
    Elle s’est souvent demandé s’il ne s’est pas trouvé une nouvelle petite amie durant son absence.
    Lorsqu’elle ouvre le message, elle le lit puis le relit.
    “Il y a longtemps que j’attendais ta réponse. Je suis heureux comme jamais. Choisis le jour, l’endroit, même à quel moment de la journée on se verra. Je suis à ton entière disposition. Karim qui rêve de te tenir dans ses bras.”
    Elle a réellement l’impression de sentir la chaleur de ses bras autour d’elle. Après ces trois semaines d’attente, elle est soulagée, heureuse.
    Toutefois, elle décide de ne pas donner rendez-vous pour la semaine suivante. Malgré sa joie, elle lui en veut d’avoir pris tout son temps, pour répondre. Il aurait pu lui expliquer pourquoi il a été si longtemps absent.
    Elle est aussi un peu surprise qu’il ne veuille pas discuter via la messagerie instantanée. C’est la première fois que cela leur arrive.
    Elle se demande s’il ne lui cache pas des choses. Ne lui aurait-il pas tout dit sur sa situation ? Elle pense encore à la recommandation de sa mère. Comment faire pour enquêter sur lui ?

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  53. Artisans de l'ombre Dit :

    54eme partie

    En le laissant sans nouvelle, le temps de quelques jours, elle s’attend à ce qu’il se manifeste, à ce qu’il s’impatiente. Il lui écrit des messages pour relancer sa proposition puis, inquiet, il demande ce qui l’empêche de répondre. Il pense au pire.
    - J’espère que tu n’es pas souffrante !. Puis un autre “Si on était ensemble, je pourrais prendre soin de toi !”.
    Elle lit chaque message, se réjouissant de l’effet de son silence.
    - Qu’est-ce qui se passe ? Pourquoi n’es-tu pas joignable ? Laisse-moi un message pour me rassurer ! Je ne supporte pas d’être sans nouvelle de toi !
    Elle décide d’attendre encore un ou deux jours avant de se manifester. Elle espère que cela lui servira de leçon.
    Elle a déjà l’excuse qu’elle lui sortira lorsqu’il voudra savoir pourquoi elle n’était pas joignable.
    - Un problème de connexion et comme on se contacte que le soir, je ne pouvais pas sortir pour trouver un cybercafé !
    Mais comme ce n’est que pour mettre sa patiente à l’épreuve, elle finit par lui écrire. Comme Karim est en ligne et qu’il semble surveiller son apparition, elle n’est pas surprise quand il demande à discuter.
    - Je te croyais disparue de la surface de la terre. Que t’est-il arrivé ?”
    - Je n’avais plus d’internet, écrit-elle. Et je n’avais pas où te joindre…
    Elle se demande s’il allait lui donner un numéro de téléphone où le joindre. Elle saurait ainsi de quelle région il est réellement et si son numéro est fiché dans l’annuaire, elle trouvera bien son nom. Elle a une amie qui travaille au PTT. Elle pourra la renseigner. Ce, s’il le lui donne.
    - Je suis soulagé de savoir que tu vas bien, écrit-il. Je m’inquiétais grave…
    Elle sourit. Et ne répond rien.
    Une fois, j’avais pensé que ta famille était au courant de notre relation et qu’ils t’avaient coupé le téléphone…
    - Mon père, ancien moudjahid, me tranchera la gorge s’il le découvre, écrit-elle. L’honneur de la famille, ça n’a pas de prix chez nous !
    - Même dans ma région, assure-t-il. On ne plaisante pas avec ces choses-là ! Alors, je viens quand ?
    - Après-demain à onze heures, propose-t-elle. Ça te convient ?
    - Même à minuit, ça me convient ! On se retrouve où ?
    - A la gare, répond-elle. Il y a un salon de thé, tout près de l’entrée. À côté, un buraliste et juste en face, un magasin de sport.
    Je porterais un ensemble noir et une chemise blanche. J’aurais mon cartable en cuir et je porterais des lunettes. Et toi ? Comment ferais-je pour te reconnaître parmi les voyageurs ?
    - Un costume gris, une canne pour battre les admirateurs qui oseraient poser les yeux sur toi…
    - Espérons que tu seras le seul à porter du gris, après-demain, écrit-elle, avant de lui souhaiter bonne nuit.
    Tous deux trouvent le temps bien long. Même s’il ne s’agit que d’une journée, le temps semble ne plus s’écouler. Kheira espère que le charme perdurera après leur rencontre…

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  54. Artisans de l'ombre Dit :

    55eme partie

    Même si le temps leur a paru long, ils finissent par voir le jour tant désiré arriver. Kheira s’est préparée avec soin. Elle s’est faite belle et à la dernière minute, elle décide de ne pas porter la tenue qu’elle avait décrite à Karim. Elle veut le surprendre, le dévisager à son insu et si elle voit qu’il ne répond pas à ce qu’elle s’est imaginée de lui, elle repartira discrètement. Elle s’habille d’un pantalon en jean et d’un pull bleu. À la place du cartable, un sac de sport. À son allure, on la prendrait pour une étudiante qui a rendez-vous. Son regard est pétillant.
    Elle se surprend à sourire. Certains se tournent sur son passage. Mais elle continue son chemin. Elle n’a qu’une envie, arriver la première au rendez-vous. La gare routière grouille de passagers qui débarquent de toutes les régions du pays.
    Elle jette un coup d’œil au salon de thé. Il y a du monde mais aucun jeune homme blond au costume gris. Elle s’en va faire le tour de la gare avant de retourner au salon de thé. Cette fois, elle profite d’une table qui se libère pour vite s’y asseoir.
    Un serveur vient débarrasser.
    - Sabah el kheir… café ou lait ?
    - J’attends quelqu’un, répond-elle. Je suis obligée de consommer avant ?
    - Non.
    - Alors, je préfère attendre. Merci !
    Elle a de la chance, là où elle se tient, elle peut voir les voyageurs arriver. Elle pense qu’elle saura reconnaître Karim. S’il porte sa canne, ce sera facile. Mais elle a du mal à imaginer un jeune homme avec une canne.
    - Il a dit blond, se dit-elle en dévisageant les inconnus qui se hasardent devant le salon, hésitant à entrer. Pas de costume, pas de canne…
    Un beau blond entre et elle manque de se lever, s’imaginant que c’est Karim. Deux hommes le saluent et lui font une place à leur table.
    - Ya kha ! pense-t-elle en rougissant. Une seconde de plus et la honte ! Heureusement qu’il n’a pas regardé dans ma direction !
    Le temps de se ressaisir, elle fait signe au serveur.
    - Un café, lui demande-t-elle.
    Il le lui apporte rapidement. Elle le remercie d’un sourire. Elle est en train de sucrer son café quand elle aperçoit quelqu’un qu’elle ne s’attend pas à voir ici.
    - Oh non, pas lui ! Pas maintenant…
    Elle regarde sa montre et constate que Karim est en retard de près d’une demi-heure. Elle lève les yeux sur les passagers qui vont et viennent. Aucun d’entre eux ne porte un costume gris et une canne.
    - Peut-être qu’il ne viendra pas ? Ou qu’il a eu un empêchement ? Ou est-il coincé dans un encombrement ? Peut-être qu’il a décidé de ne pas venir ? Ou peut- être qu’il porte autre chose qu’un costume et qu’il est en train de la regarder de l’extérieur ? À cette pensée, agacée, elle renverse son café. Elle a à peine le temps de se lever qu’elle sent une main sur son épaule.
    (À suivre)

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  55. Artisans de l'ombre Dit :

    56eme partie

    -Kheïra ? Mais qu’est ce que tu fais ici ?
    Elle sourit à son neveu Kamel.
    - Moi, je vis à Alger ! J’attends une amie, ment elle alors que le serveur apporte une éponge, pour nettoyer la table. Et toi, peux-tu me dire ce que tu fais ici, à des centaines de kilomètres de ton lieu de travail et de ta ville natale ?
    - C’est comme ça qu’on accueille un parent ? lui reproche-t-il. Tu ne dis pas bonjour ?
    - Si…
    Elle regarde autour d’eux, recherchant Karim. Elle se demande ce qui peut bien le retenir.
    Ils se font la bise et Kamel demande :
    - Est- ce que je peux me joindre à toi ?
    - Euh… Oui… Bien sûr !
    Le jeune homme prend place alors qu’elle regarde vers les clients qui viennent d’entrer. Aucun ne correspond à la description de Karim, aucun d’entre eux ne porte de costume et de canne. Quelle idée ridicule ! pense-t-elle.
    - Tu ne t’assieds pas ?
    - Si. Je regardais, répond-elle, mon amie… Apparemment, elle ne viendra pas !
    - Cela fait longtemps que tu l’attends ?
    - Non.
    Une fois assise en face de lui, elle remarque son sourire.
    - Pourquoi souris-tu ?
    - C’est interdit de sourire, à sa tante maternelle ?
    - Non. Mais tu as une pensée en tête ! insiste- t- elle.
    Kamel rit. Il le reconnaît.
    - Tu t’es faite belle ! Comme pour un rendez- vous ! Ma main à couper, ajoute-t-il, que ce n’est pas une amie mais un ami que tu attends !
    - Mais t’es fou ! s’écrie-t-elle avant de baisser la voix. Comment oses-tu ? Ce n’est pas une façon de parler à sa tante !
    - Je sais mais comme on a presque le même âge !
    - Même. Ce n’est pas une excuse valable !
    - Zaâma tu n’as pas de petit ami ?
    - Cela ne te regarde pas, réplique Kheïra en faisant mine de se fâcher. Mais dis, que fais-tu à Alger ?
    - Je voulais voir connaître la capitale, dit le jeune homme en faisant signe au serveur.
    Tu prendras bien ton petit-déjeuner avec moi ? Je t’invite pour me faire pardonner !
    - J’accepte.
    Ils commandent du café, du jus et des croissants. Tout en mangeant avec bon appétit, elle tente d’en savoir plus sur son voyage.
    - Depuis quand tu es là ?
    - Deux jours.
    - Tu es venu seul ?
    - Oui. Je voudrais faire mon stage, ici, lui apprend-il. Je finis mes études dans quelques semaines, lui rappelle-t-il devenu très sérieux. Je dois me trouver une entreprise. Rapidement…
    - À force de chercher, tu finiras par trouver. Dis, tu n’avais pas un travail à mi-temps ? Tu faisais quoi au juste ?
    - J’ai fait pas mal de petits boulots, répond Kamel. Gardien dans un parking, vendeur dans un marché, videur dans un bar et depuis quelques semaines, réceptionniste de nuit dans un grand hôtel !
    - Tu m’impressionnes, dit-elle en haussant les sourcils. Peux-tu me dire à quoi te sert cet argent ?
    - Hélas non.
    Kheïra fronce les sourcils. Elle s’attendait à ce qu’il se confie. Il en a pourtant l’habitude. Qu’est-ce qui a changé depuis trois mois et qu’elle ignore ?

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  56. Artisans de l'ombre Dit :

    57eme partie

    -C’est quoi ces cachotteries ? l’interroge Kheira. Je croyais qu’on n’avait pas de secret !
    Kamel est gêné. Il trouve l’excuse idéale.
    - T’es ma tante, je ne peux pas tout te confier, dit-il en riant. Tu comprends ? Il y a une limite !
    - Depuis quand ?
    - Depuis maintenant, répond-il. Puisque tu ne voulais pas me dire la vérité, j’ai décidé de ne pas tout te dire ! Sur mes occupations, sur mes projets…
    - Parce que tu as des projets ? reprend elle, surprise. C’est d’ordre… ?
    Kamel secoue la tête.
    - Privé, répond-il.
    - Tu as une petite amie, n’est-ce pas ?
    - Tu n’en sauras rien ! Changeons de sujet, propose-t-il. Quel est ton programme ? Si ton amie ne vient pas…
    - Je vais rentrer. J’ai beaucoup de travail, dit- elle. Vu que tu ne peux plus te confier, on n’aura pas grand-chose à se dire !
    - Je suis d’accord avec toi, réplique le neveu. Et puis, moi aussi, j’ai à faire ! Je peux t’appeler ?
    - Si tu veux, répond-elle en sortant un billet pour régler leur consommation.
    - Non, c’est moi qui invite, dit Kamel. Range ton billet ! T’es fâchée ?
    - Non. Seulement déçue. Il faut me comprendre…
    - Mais toi aussi tu as des secrets et je ne te fais pas un procès ! Tu en as le droit, tout comme moi…
    - Oui, tu as raison.
    - Apparemment ton amie a oublié que vous aviez rendez-vous ! Deux filles à la gare routière ! Tu aurais pu trouver mieux, glisse Kamel alors qu’elle prend son sac et lui lance un regard meurtrier. C’est bon ! J’arrête !
    - Tu cherches les ennuis, ma parole, réplique- t-elle avec un sourire. À bientôt…
    - Incha Allah !
    - Tu ne voudrais pas que je t’accompagne ? propose-t-il.
    - Pour ta sécurité, il vaut mieux qu’on se sépare !
    - Wellah, je ne t’embêterais plus avec ce sujet !
    - Non !
    Et Kheira part la première. En sortant, elle n’a pu s’empêcher de regarder vers les voyageurs, espérant apercevoir Karim. Elle se demande pourquoi il a raté leur rendez-vous.
    Elle a hâte de se connecter afin d’en savoir plus. Quelle excuse trouvera-t-il ?
    Elle a encore envie d’attendre, voulant se persuader qu’il finira par arriver. Mais en se tournant, elle voit son neveu la suivre du regard.
    Elle achète un ticket et monte dans le premier bus en partance d’Alger-Centre. Son neveu ne comprendrait pas pourquoi elle traîne les pieds.
    Une matinée de gâchée. Enfin, elle y a échappé belle. Si Karim était venu, son neveu les aurait vus et qui sait comment il aurait réagi ?

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  57. Artisans de l'ombre Dit :

    58eme partie

    “Allez, connecte-toi !” Kheira est rentrée après avoir fait quelques achats. Elle a hâte de discuter avec lui. Elle voudrait bien savoir ce qui l’a empêché de venir au rendez-vous.
    Le désordre a beau régné dans la chambre, elle ne touche ni à ses vêtements ni à ses chaussures. Il lui a fallu du temps, pour se préparer.
    Et comme elle n’a rien rangé avant de partir, elle devra le faire plus tard.
    Elle pourrait le faire maintenant mais elle tient à discuter avec Karim. Le problème, c’est qu’il ne se connecte pas de tout l’après-midi.
    Ce soir-là, elle ne dîne pas. Elle se contente de croquer une pomme en face du micro. Lorsque Karim se connecte enfin, il est près de 22h.
    “Te voilà enfin ! écrit-elle. Pourquoi as-tu raté notre rendez-vous ?
    - J’y étais, répond-il. Mais toi, tu n’es pas venue !
    - Si. J’ai attendu plus d’une heure, écrie-t-elle. Comme tu ne te montrais pas.
    - Je suis resté à la gare, plus d’une heure, à surveiller toutes les jeunes femmes qui portaient du noir et du rouge. Il y en a bien eu sauf qu’elles étaient soit laides, soit plus âgées.
    - Ah !
    Kheira reste pensive pendant un moment. Elle n’écrit rien. Se pourrait-il qu’ils se soient ratés, par sa faute vu qu’elle ne portait pas l’ensemble qu’elle lui avait décrit ? Cependant, s’il était bien à la gare, comment se fait-il qu’elle ne l’ait pas reconnu ?
    - Je ne me rappelle pas avoir vu un jeune en costume gris, avec une canne !
    - Je n’en portais pas. Juste un jean et une chemise à carreaux, écrit-il. C’est étrange qu’on se soit raté !
    - Oui.
    - Mais toi, tu portais vraiment du rouge et noir ?
    Elle avoue avoir aussi triché.
    - Je voulais te voir avant, écrit-elle. Si tu étais repoussant, j’aurais pu prendre la fuite, en douce.
    - On a eu la même idée ! Et on s’est raté. On s’est peut-être vus sans se reconnaître ! Où étais-tu assise ?
    - Dans le salon de thé, écrit-elle. Là où était prévu notre rendez-vous. Et toi ?
    - Moi aussi, répond-il, la surprenant. Je ne rappelle pas avoir vu une jeune femme attablée, seule !
    - Et toi, t’étais où ?
    - Dans le salon, écrit-il. Comme je ne te voyais pas, je suis parti.
    - C’était vers quelle heure ?
    - Entre 10h30 et midi.
    Elle y était aussi. Elle ne comprend pas comment ils ont pu se croiser, être dans un même endroit pendant plus d’une heure sans se voir, sans se reconnaître. Kheira secoue la tête. Quelque chose lui échappe.
    - Qu’as-tu fait après ? demande-t-il.
    - Je suis rentrée.
    - Que dirais-tu de se voir demain matin, à Alger-Centre ? propose-t-il. Je te promets de m’habiller comme je t’aurais dit. D’un jean et d’une chemise à carreaux. On se retrouve près de l’agence de voyages si t’es d’accord ? À 9h, c’est bon ?
    Kheira ne refuse pas. Elle attend le lendemain, avec impatience. Durant le reste de la nuit, elle se consacre à son travail. Elle corrige les devoirs de ses élèves et quand elle se met enfin au lit, c’est pour sombrer dans un sommeil troublé par d’étranges rêves…

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  58. Artisans de l'ombre Dit :

    59eme partie

    Le lendemain matin, Kheira se lève tôt, fait du rangement dans la chambre avant de se préparer. Elle décide de porter une jupe et un body à fleurs. Elle se maquille à peine et dès neuf heures, elle se rend près de l’agence de voyages et attend qu’il se montre.
    Elle jette un coup d’œil à sa montre et se rend compte qu’il est encore en retard. Mais comme elle ignore d’où il vient, elle décide de patienter encore un peu.
    - Ma parole, tu me surveilles !
    Kheira écarquille les yeux en se tournant. Elle aurait reconnu la voix entre mille. Elle fronce les sourcils. Le regard rieur de Kamel la surprend. Sa présence sur le lieu du rendez-vous l’agace.
    - Qu’est-ce que tu fais là ?
    - En voilà une façon de m’accueillir, réplique-t-il. Bonjour khalti Kheira !
    - Bonjour ! Dis, qu’est-ce que tu fais là ?
    - Je passais par là quand je t’ai aperçue, dit Kamel en souriant. Alors j’ai voulu te dire bonjour mais, apparemment, tu n’es pas contente de me voir !
    - Si.
    - Mais ma présence te gêne, termine le jeune homme. Puisque tu ne veux pas de ma compagnie, je vais attendre de l’autre côté !
    Kheira ne l’en empêche pas. Elle se tourne pour qu’il ne voit pas son visage fermé. Elle ne comprend pas pourquoi il traîne toujours dans les alentours lorsqu’elle a rendez-vous avec Karim. D’ailleurs, si ce dernier ne se montre pas d’ici quelques minutes, elle allait rentrer.
    Elle mettra fin à leur relation, même si dans le fond ce n’en est pas une. Certes, elle s’entend à merveille, avec lui. Elle peut discuter avec lui, de tous les sujets. Elle ne s’est jamais sentie aussi proche d’un homme comme c’est le cas avec lui.
    Maintenant qu’ils doivent se voir, elle découvre qu’il n’est pas ponctuel. S’ils se sont ratés, hier, pourquoi aujourd’hui il n’est pas encore là. Il a proposé ce rendez- vous, pour qu’ils aient une nouvelle chance de faire connaissance.
    En regardant autour d’elle, elle tombe sur son neveu qui la fixe depuis l’autre côté de la ruelle. Elle lui fait signe de venir. Il la rejoint.
    - T’as changé de sentiments ?
    - Oui. On va prendre un café ensemble ?
    - Comment pourrais-je refuser ?
    Ils s’assoient à la terrasse d’un grand salon de thé. Kheira ne peut s’empêcher de regarder vers l’agence, espérant que Karim…
    - Apparemment ton rendez-vous ne viendra pas, fait remarquer Kamel.
    - Oui. Et toi, tu avais aussi rendez-vous ?
    - Oui. Mon ami n’est pas venu, dit-il.
    - Ami ou amie avec un e ? demande-t-elle.
    - Amieeeeeeee !
    Ils éclatent de rire.
    - Eh oui, reconnaît-elle. Nos fameux rendez- vous sont absents ! Hier, aujourd’hui… C’est à croire qu’on ne se verra jamais…
    - Raconte-moi ! Il est comment ton ami ?
    Kheira fait la moue.
    - À toi de parler de ta petite amie. Comment est-elle ? Que fait-elle dans la vie ? Comment vous êtes-vous connus ?
    Kamel semble hésiter.
    - En fait, tu ne vas pas le croire, dit-il. Je ne l’ai jamais vue… On discute souvent par internet. Je l’adore…
    - Ah… par internet ! Depuis quand ?
    La réponse qu’il lui donne, la laisse bouche-bée. Elle n’en croit pas ses oreilles…

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  59. Artisans de l'ombre Dit :

    60eme partie

    -Ce n’est pas vrai, murmure-t-elle. C’est toi Karim ?
    - Euh, oui…
    - Oh Mon Dieu ! C’était donc toi mon rendez-vous raté !
    - Et toi que j’attendais, poursuit Kamel. J’ai l’impression de rêver !
    - Je croyais avoir trouvé l’homme idéal !
    - Et moi, la fille de mes rêves.
    Tous deux se taisent un moment. Kheira n’entend plus rien, uniquement les battements sourds de son cœur. Celui qui la laissait depuis des semaines éveillée et amoureuse au point d’envisager un avenir commun n’est autre que son neveu. Comment cela a-t- il pu leur arriver ?
    Kamel continue de la regarder. Il est encore sous le coup de la surprise. Jamais il ne se serait douté que l’inconnue au bon cœur puisse être sa tante maternelle.
    - J’aurais dû me douter que c’était toi, dit-il très grave. Le contact passait si bien entre nous. Quand on était ensemble, on était si bien.
    - C’est vrai. On est très proche.
    - Jamais je n’avais ressenti cela avant, poursuit-il.
    À la mort de grand-mère, tu as été là pour toute la famille. Moi, j’étais comblé. J’étais aux anges…
    - Rappelle-toi que je n’avais pas envie de reprendre le travail…
    Ils en rient.
    - Moi, je ne voulais pas retourner à mes cours et à mon job. Tout ça, pour rester avec toi. Je trouvais que t’étais la meilleure tante du monde, ajoute-t-il. Tu es belle, cool et tu as tant de qualités ! La femme idéale, quoi !
    - Toi aussi, tu es adorable, dit-elle. Tu ne manques ni de charme ni de qualités !
    - Tu sais quoi, confie-t-il, devenu subitement très grave. Je crois que je t’ai aimée dès le premier jour !
    - Qui n’aime pas sa tante ? réplique-t-elle.
    - Je ne parle pas de cet amour-là ! Je t’aime tout simplement… Comme on aime une fille avec qui on voudrait faire sa vie, précise-t-il. Est-ce que tu comprends ce que je te dis ? Je t’aime !
    Kheira prend son sac et part en courant comme si elle a le diable à ses trousses.
    En fait, elle vient de réaliser que leurs sentiments sont réciproques.
    Elle a beau avoir découvert que c’est son neveu qui se cachait derrière l’écran, elle n’en est pas moins amoureuse.
    Tous deux savent qu’ils ne peuvent pas. Leur relation est sans issue. Ils ne peuvent pas continuer. Ces sentiments sont contre nature.
    - On doit mettre de la distance entre nous. On ne doit pas. Cet amour est insensé. Il nous perdra…

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  60. Artisans de l'ombre Dit :

    61eme partie

    Kheira ne sort pas de sa chambre pendant deux jours. Elle est tombée malade de déception. Cela aurait pu tomber sur n’importe qui mais il a fallu que ce soit elle qui vive une relation sans avenir. Pas avec n’importe quel jeune homme mais son neveu.
    Lorsqu’elle se rappelle tous leurs messages enflammés, les promesses d’amour et d’avenir commun, elle enrage. Pourquoi a-t-il fallu qu’elle s’éprenne de quelqu’un avec qui la relation est impossible ?
    La malchance n’aurait pu mieux choisir. Depuis toujours, ses amours finissaient mal. Mais là, c’est trop. Elle reste au lit, deux jours, sans boire, sans manger, sans dormir. Elle a l’impression que sa vie s’est suspendue et qu’elle ne peut penser à rien d’autre.
    Lorsque la dame chez qui elle vit s’inquiète de ne pas la voir frappe à sa porte, elle est forcée de se lever. À sa mine défaite, elle s’écrie :
    - J’aurais dû me douter que tu n’allais pas bien, dit-elle. Veux tu que j’appelle un médecin ?
    - Non.
    - Le lycée a appelé. Ils veulent savoir si ce qui se passe !
    Kheira passe une main dans ses cheveux emmêlés.
    - Si tu es souffrante, tu devrais voir un médecin et déposer un arrêt de travail, conseille Meriem.
    - Non, non. Je vais reprendre.
    - As-tu besoin de quelque chose ?
    - Rien que tu puisses avoir, hélas ! Merci Meriem, dit Kheira avant de soupir.
    - Tu pourrais demander aux autres ? suggère celle-ci.
    Aux autres, ce sont les pensionnaires, des jeunes filles, des femmes divorcées venues de loin, travailler à la capitale et qui louent tout comme elle, des chambres aménagées et toutes équipées de toutes les commodités. La location est chère mais vu qu’elles ne manquent de rien, c’est supportable. En plus, Meriem ne fait pas de scandale lorsque l’une d’elles tarde à régler la location ou leurs parts de factures d’électricité et d’eau. Kheira vit chez elle, depuis plus d’un an. Elle s’est habituée à Meriem, à sa chambre, à sa petite vie tranquille.
    Si elle avait su qu’en achetant un pc et qu’en se connectant, sa vie en serait bouleversée, elle se serait abstenue de le faire.
    Mais elle ne peut pas effacer le passé. Et encore moins cet amour en elle. Elle a beau se raisonner, elle n’y peut rien. Elle ne peut pas arrêter le cours du temps. Elle ignore de quoi sera fait demain. En partie seulement.
    Elle et Kamel ne se verront plus. Ils ne seront plus jamais proches. Elle tient à l’éviter. Elle se sent coupable de cet amour insensé qui la rend malade. Mais la vie continue. Elle doit se ressaisir. Ses élèves l’attendent. Et puis, c’est bientôt les vacances. Elle pourra rentrer à la maison et changer d’air.
    Kheira grince des dents. Lui aussi sera à la maison. Elle ne pourra pas voir sa sœur Zahia. Plus rien ne sera comme avant…

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  61. Artisans de l'ombre Dit :

    62eme partie

    Kheira reprend le chemin du lycée le samedi matin. Elle écarquille les yeux en trouvant son neveu devant le portail du lycée. Elle s’emporte d’un coup. Au point d’en avoir les oreilles rouges.
    - Qu’est-ce que tu fais ici ?
    - Il fallait que je te vois, dit le jeune homme. Ça va ?
    - Comment voudrais-tu que ça aille ? rétorque- t-elle. Depuis, j’ai la tête prête à exploser !
    - Pourquoi te torturer ? l’interroge-t-il.
    - C’est plus fort que moi, soupire-t-elle. On ne doit plus se voir. Tu comprends ?
    - Mais on est d’une même famille !
    - Je sais. Sauf si tu me promets de me regarder comme une tante et pas autrement, exige-t-elle de lui. Est-ce que tu en seras capable ?
    - Je l’ignore. Mais on ne pourra jamais s’éviter. La famille finira par le remarquer et ils se poseront des questions, dit Kamel.
    - Tout, sauf éveiller leurs doutes. Je ne le supporterais pas !
    - Moi aussi ! Peut-être que notre amour se transformera en amitié ? émet le jeune homme. On ne sera jamais gêné ou coupable de ressentir cet amour.
    - Ne m’en parle plus jamais. Et ne cherche plus à rester avec moi, le prie Kheira. Pars d’ici ! Pars !
    Elle est persuadée qu’en ne se voyant plus, le sentiment finirait par disparaître.
    - Comment on fera à la maison ?
    - On sera entourés de nos familles ! lui rappelle- t-elle. Et c’est temps mieux ! Pars ! Ne me force pas à crier après toi.
    - Maâlich, crie après moi, réplique Kamel. Si cela peut soulager ton cœur !
    - Je t’en prie, pars ! Je suis assez mal comme ça ! Écarte-toi de mon chemin.
    Il ne bouge pas. Elle le pousse et entre au lycée.
    - Kheira ! Kheira !
    Elle ne se retourne pas. Elle va voir le proviseur et prétexte avoir eu la migraine.
    Ce dernier la croit sur parole. À sa mine, il est clair qu’elle a passé de mauvais moments.
    - Est-ce que je dois déposer un arrêt de travail ?
    - Ce ne sera pas nécessaire, répond-il. Si vous rattrapez les heures perdues…
    Elle le lui promet. Il ne leur reste à peine un mois avant les grandes vacances.
    Elle a hâte d’y être. Elle se sent à bout de force.
    Elle est heureuse de retrouver ses élèves et elle leur rend les copies des devoirs de la semaine passée. Les notes sont moyennes mais, dans l’ensemble, elle est satisfaite d’eux.
    - Les compositions sont prévues dans dix jours. J’attends de vous que vous fournissiez plus d’efforts !
    Les cours de cette journée et des suivantes se passent bien. Lorsqu’elle est occupée, elle ne pense plus à Kamel.
    Mais une fois la nuit tombée, c’est le contraire. Il lui arrive même de le rêver.
    Depuis leur rendez-vous, elle ne s’est plus connectée, de crainte de trouver des messages qui la troubleraient plus qu’elle ne l’est déjà…

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  62. Artisans de l'ombre Dit :

    63eme partie

    -Enfin ! Je n’y croyais plus…
    Kheira pose ses affaires et va se blottir dans les bras de sa mère puis de ses sœurs.
    - Sois la bienvenue à la maison, ma fille, lui dit Aïcha. Tu ne peux pas savoir comme tu nous as manqués !
    - Et moi donc !
    - Je suis si heureuse. On va t’avoir deux mois à la maison, dit la mère. Quel bonheur !
    En prenant le temps de la regarder, elle la trouve amaigrie avec des poches sous les yeux.
    - Eh, ben dis donc, ils t’ont fait travailler dur ce trimestre !
    - Oui, ces derniers mois ont été très pénibles à vivre !
    Ses sœurs prennent les bagages et les portent à sa chambre. Aïcha et Kheira vont dans le salon.
    - Enlève ta veste !
    Kheira la retire et l’accroche au portemanteau. Elle enlève ses chaussures et rejoint sa mère sur le canapé. Elle peut enfin respirer. Son soupir n’échappe pas à sa mère qui ne cesse de l’observer depuis son arrivée.
    - De l’eau ! demande-t-elle à ses sœurs. Et un bon café ! J’ai une migraine atroce !
    - J’en déduis qu’elle est la cause de ces plis sur ton front !
    Kheira hausse l’épaule.
    - Ça va bien, là- bas ?
    - Oui.
    - Vraiment ?
    Elle est bien soulagée de ne pas avoir à répondre tout de suite. Sa sœur Sabrina apporte un verre d’eau. Lilia est en train de préparer le café dans la cuisine.
    - Alors, tes études en médecine ?
    - Très difficiles, mais je m’accroche, répond Sabrina, en s’asseyant près d’elle. Il me reste deux années et je pourrais enfin respirer !
    - Inch Allah !
    - Et toi, quoi de neuf ?
    - De quoi veux-tu parler ?
    - Tu as bien un ami, n’est-ce pas ?
    - Euh… oui.
    Kheira est devenue livide. Elle regarde sa mère, lui reprochant de les avoir mises dans la confidence.
    - Normalement, poursuit Sabrina, tu ne devrais pas avoir de secret pour nous !
    - Vous m’auriez harcelée de questions à chacune de mes visites !
    - C’est inévitablement maintenant qu’on est au courant, dit Lilia, les rejoignant au salon, avec le café. Avec sucre ou sans sucre ?
    - Avec sucre, bien sûr !
    - On ne sait jamais…Tu ne nous dis jamais tout sur toi et ta vie !
    - Et puis quoi encore ?
    - On attend que tu nous en dises plus sur lui, glisse Sabrina. Comment est-il ? Que fait-il dans la vie ?
    - Je ne sais pas, répond-elle.
    - Comment, tu l’ignores ? l’interroge sa mère. Tu le fréquentes bien depuis des mois !
    - Je le fréquentais, rectifie Kheira. On s’est séparés, il y a quelques semaines.
    - Dire qu’on croyait que tu te marierais cette année !
    Aïcha secoue la tête, les lèvres pincées. Elle comprend pourquoi sa fille a si mauvaise mine.
    - Pourquoi vous êtes-vous séparés ?
    Kheira hausse l’épaule, se demandant comment expliquer leur séparation. Elle ne peut pas dire la vérité…

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  63. Artisans de l'ombre Dit :

    64eme partie

    Aïcha ne comprend pas. Elle se rappelle son enthousiasme, lors de sa dernière visite. Elle espérait entendre parler de mariage et qu’elle leur parle de séparation.
    - Il a parlé de toi, à sa famille ? Ils ont refusé ?
    - Je ne sais pas.
    - Mais qu’est-ce que tu sais ? Pourquoi vous êtes-vous séparés ? L’autre fois, tu étais aux anges, lui rappelle sa mère, très déçue. Explique-moi ce qui est arrivé ! Pourquoi vous séparer maintenant ? Tu disais que…
    - Oublie tout ce que j’ai dit, réplique Kheira en saisissant la tasse de café que lui tend sa sœur. Je me suis faite des illusions ! Lorsque j’ai parlé mariage, il a ri… Depuis, je suis sans nouvelle de lui !
    - Mais pourquoi ?
    - Je l’ignore ! s’écrie-t-elle. Je ne pouvais pas le prier !
    - Je ne comprends pas, insiste sa mère. As-tu cherché à en savoir plus, sur sa situation ?
    - Je ne connais pas sa famille ni même son quartier, dit-elle.
    - Dis… Vous n’êtes pas allés loin dans votre relation ? Rassure-moi ! Notre honneur est sauf, n’est-ce pas ?
    - Maman ! lui reprochent les filles, d’une même voix.
    - J’ai le droit de savoir !
    - Oui, mais…
    Kheira, les yeux larmoyants, secoue la tête.
    - Ne t’inquiète pas ! On n’est juste sorti de temps à autre !
    - Hamdoullah ! Tu es jeune, tu rencontreras bien quelqu’un, ici, dit Aïcha. Je pense que tu ferais mieux de rentrer vivre ici !
    _Ah non ! Je ne peux pas. Surtout pas maintenant.
    - Pourquoi ? Comment voudrais-tu tourner la page, en restant là-bas ? l’interroge Sabrina. Ici, tu t’en remettras vite.
    - Non, non ! Vous ne pouvez pas comprendre !
    Kheira, agacée, ne finit pas son café. Elle se lève.
    - Et je ferais quoi ici ?
    - Tu te trouveras un travail, réplique Aïcha. Des enseignants, ils en ont toujours besoin !
    - Oh non !
    - Dis, est-ce que ton ami est de la région ?
    - Non.
    - Mais tu réagis tout comme s’il l’était et que tu voulais l’éviter !
    Kheira le jure sur sa tête. Son petit ami n’est pas de la région.
    - Et je ne veux plus en parler ! Je souffre assez ainsi ! Je vais me reposer dans ma chambre.
    Alors qu’elle va s’y enfermer, Aïcha appelle Zahia. Elle lui demande d’inviter Kheira, persuadée que cela lui fera plaisir.
    - Elle se remet d’une séparation. Je ne veux pas qu’elle reste enfermée, à ne penser qu’à lui…

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  64. Artisans de l'ombre Dit :

    65eme partie

    -Ma chère belle-maman ! Vous ne devinerez jamais ! Je donne une fête. Kamel vient d’obtenir son diplôme ! Vous êtes tous invités !
    Aïcha partage la joie de sa belle-fille.
    - Mais son père n’aime pas laisser la maison, lui rappelle-t-elle. Il viendra une autre fois !
    - Maâlich…Va te préparer ! Où sont les filles ?
    - Dans leur chambre. Cette fête tombe bien. Kheira va pouvoir se détendre et, qui sait, si la fête est mixte, peut- être qu’elle fera une belle rencontre ?
    Zahia est de son avis.
    - Je vais leur apprendre la nouvelle, dit-elle.
    - La fête est prévue pour quand ?
    - Dans deux jours. Si je tiens à vous emmener, c’est pour m’aider à l’organiser !
    - Bien sûr ! On le fera avec plaisir…
    Elle se rend dans la chambre de Sabrina et Lilia. Elle les trouve en train de lire tout en écoutant de la musique.
    - Bonjour les filles !
    Sa visite les surprend. Elles sont heureuses de la voir. Elles voient bien à son visage rayonnant qu’il se passe quelque chose. Zahia leur apprend la nouvelle. Ses jeunes sœurs crient de joie et elles sont si heureuses qu’elles augmentent le volume.
    - La fête commence ici !
    Elles mettent une ambiance chaleureuse et insouciante. Kheira qui faisait la sieste, à côté, les rejoint. Elle éteint le magnétophone.
    - Hé ! Qu’est-ce qui se passe ici ? L’une de vous se marie ?
    - Non ! Kamel vient d’obtenir son diplôme !
    - On donne une fête ! Je vous emmène avec moi. Je vais avoir besoin de vous pour l’organiser !
    Kheira soupire tout en secouant la tête. Elle ne les félicite pas. Elle ne partage pas leur joie.
    - Je ne pourrais pas venir, dit-elle.
    - Pourquoi ?
    - Une autre fois, répond-elle. Allez-y ! Moi, je m’occuperais de papa et de la maison.
    - Il pourra se passer de nous, un jour ou deux ! Et puis, il nous rejoindra, dit Aïcha.
    Tu as besoin de changer d’air. Je reste avec ton père mais toi, vas-y !
    Mais Kheira est décidée et rien ni personne ne pourra la faire changer d’avis.
    Zahia est déçue mais elle n’insiste pas. Safir ,qui les attend, leur rappelle que la journée est déjà avancée.
    - Le temps qu’elles préparent leurs affaires !
    Il est surpris que Kheira ne vienne pas.
    - C’est l’occasion pour elle de s’occuper de papa ! Cela arrive qu’une fois par an !
    Quelques affaires en mains, elles rejoignent Safir dans la voiture. Kheira leur fait un signe d’au-revoir sans sourire. Elle n’aurait pas supporté de voir Kamel. Elle ne cesse de penser à ce qui leur est arrivé et elle se sent mal à chaque fois. Elle espère qu’il aura compris et qu’il ne cherchera pas après elle. Mais c’est mal le connaître…

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  65. Artisans de l'ombre Dit :

    66eme partie

    -Mabrouk alik wlidi ! Aïcha prend Kamel dans ses bras et le serre à l’étouffer. Puis le saisissant par les bras, elle se secoue presque.
    - Mais pourquoi cette barbe qui te mange le visage ? Tu me parais amaigri. Est-ce une impression Zahia, ma fille, ou c’est réellement le cas ?
    - Oui, il a maigri. Ces derniers mois ont été éprouvants. Il avait peur de rater ses examens. – Débarrasse-toi de cette barbe sur-le-champ ! La fête est en ton honneur. Je ne veux pas que les gens te voient ainsi. Allez, direction la salle de bains.
    Aïcha l’y pousse. Dans le salon, les filles ont mis de la musique à fond. Elles se sont débarrassées de la table basse, arrangeant une petite piste de danse. Zahia est en train de montrer la semoule à sa belle-maman quand Kamel les rejoint.
    - Kheira n’est pas venue ? Pourquoi ?
    - Oui. Elle est restée auprès de son père, répond Aicha.
    - Mais ils vont nous rejoindre ?
    - Je ne sais pas, répond Zahia. Ton grand-père n’aime pas laisser la maison sans surveillance.
    - Mais Kheira, pourquoi ne viendrait-elle pas ?
    - Elle viendra, répond Aicha. Ta tante a envie d’être un peu seule.
    - Et pourquoi ?
    - Oh, vous les jeunes…
    Kamel comprend. Il les surprend en allant prendre sa veste.
    - Où vas-tu comme ça ? s’écrie Zahia.
    - Je vais la chercher.
    - Il va bientôt faire nuit ! Attends demain…
    - Non, je ne peux pas !
    Il prend la voiture de son père et se rend à Guelma. Durant toute la route, il ne cesse de penser à leur amour qui les ronge. Ni lui ni Kheira n’ont trouvé la paix. Il regrette de ne pas avoir pu s’expliquer avec elle. Elle aurait été une autre qu’il aurait poussé la relation plus loin. Ils ne peuvent pas se séparer. Ils sont d’une même famille. Elle doit être présente à la fête. En fait, elle est la seule qu’il tient à voir à sa fête. Il veut qu’elle partage sa joie.
    Lorsqu’il arrive devant la villa, la nuit est tombée depuis un moment. Il frappe à la porte longtemps. Un silence religieux règne à l’intérieur. Il insiste.
    - Qui est-ce ? demande son grand-père d’une voix endormie.
    - C’est moi, Kamel !
    Kadour ouvre enfin.
    - Tu dors tôt grand-père !
    - Je n’ai plus ton âge, répond ce dernier. Qu’est-ce qui t’amène à cette heure de la nuit ?
    - Je… Demain, je vous emmène à la maison. La fête sans toi, sans vous, ajoute-t-il en voyant Kheira sortir de sa chambre, n’en est pas une.
    - Il ne fallait pas venir de nuit ! lui reproche son grand-père. Ça pouvait attendre le matin.
    - Papa aura besoin de la voiture demain, vers dix heures, répond le jeune homme. On démarrera très tôt, si vous êtes d’accord ? ajoute-t-il en regardant Kheira.
    - On verra demain matin… Ma fille, prépare-lui un lit !
    Kamel, qui tient à rester un peu avec elle, dit en riant.
    - Je ne peux pas dormir le ventre vide !
    Kadour se tourne vers sa fille et lui demande de lui chauffer les restes du dîner. Kamel la suit à la cuisine. Il veut lui parler mais son grand-père, en bon hôte, les rejoints…

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  66. Artisans de l'ombre Dit :

    67eme partie

    -Comment se fait-il que tes parents t’aient laissé partir, à la nuit tombante ?
    Kamel ne dit pas à son grand-père qu’il a pris les clefs, de la voiture, sans avoir même consulté son père. Ce dernier était dans la chambre. Il peut imaginer sa colère.
    - Je leur avais promis de rouler doucement, répond-il. Et c’est ce que j’ai fait grand-père ! J’ai roulé au pas…
    - Tant mieux, tant mieux…
    Kheira s’affaire devant le fourneau. Elle lui chauffe les restes du dîner. Elle ne prend pas place à la table. Elle n’a pas cherché à participer à la conversation. Elle dépose quelques bouts de pain, dans une corbeille et s’apprête à quitter la cuisine lorsque son père lui demande de rester.
    - Je ne peux pas tarder, dit-il. J’ai pris un somnifère… Je retourne au lit… Kheira, je compte sur toi, pour bien t’occuper de lui ! Bonne nuit mon fils…
    - Bonne nuit, grand-père !
    - Bonne nuit père !
    Kamel attend que son grand-père ait tiré la porte de sa chambre, pour s’adresser à elle.
    - Pourquoi ne réponds-tu pas à mes messages ?
    - On n’a plus rien à se dire, répond-elle. Quand le comprendras-tu ?
    - On doit en discuter ! Ce qui nous arrive est unique, insiste-t-il. On aurait mis des masques que notre relation…
    - Chut ! Malgré tout, rien n’est possible entre nous, lui rappelle-t-elle. Quand te le mettras-tu en tête ?
    - Je n’y parviendrai jamais… Je t’aime ! C’est plus fort que moi !
    - Chut ! Ne dis pas ça ! lui ordonne-t-elle. Tais-toi et mange ! Je ne l’ai pas chauffé pour le jeter après !
    - Mais notre relation, tu ne peux pas la jeter aux oubliettes comme si c’était fini ! Car elle ne le sera pas temps qu’on s’aimera !
    Kheira se tourne comme si elle craint d’être entendue.
    - Mais elle est sans issue ! Oublie ! Allons de l’avant…
    Kamel quitte sa chaise et va la prendre par les bras.
    - Regarde moi dans mes yeux et répète !
    - Oui, c’est fini !
    - Dis-moi que tu ne m’aimes pas !
    - Je te déteste !
    En fait, c’est un cri d’amour qui les propulse l’un contre l’autre. Kheira se blottie dans ses bras.
    - Pourquoi tiens-tu tant à ce qu’on se sépare ?
    - Il le faut.
    - Ces mois m’ont été insupportables, lui confie Kamel. Je n’ai pas cessé de penser à toi… Tu m’as terriblement manqué, tu sais !
    - Moi aussi mais…
    Un baiser les réduit au silence. Ils viennent de dépasser les limites et la voix de la raison semble s’être tue devant leur amour insensé…

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  67. Artisans de l'ombre Dit :

    68eme partie

    “RELATION INTERDITE…”
    -On se revoie quand ? Kheira hausse l’épaule.
    - Un jour, à Annaba, répond-elle. Je te dirais quand…
    - Quand tu voudras… Tu viens à la fête ?
    - Oui. Mais va au salon… et tiens-toi tranquille !
    Ils échangent un dernier baiser avant de se séparer. Kheira ferme doucement la porte de sa chambre et elle met de l’ordre dans son lit. Elle n’a pas de regrets.
    Ils viennent de passer un moment unique. Et elle a envie de recommencer.
    Tous deux ne parviennent pas à fermer l’œil, après ce qu’ils viennent de vivre.
    Au petit matin, elle est la première prête à partir. Elle aide son père, à choisir un costume puis range la maison après qu’ils aient pris leur café.
    Kamel ne la quitte pas des yeux. Il la regarde avec adoration. Son regard ne surprend pas son grand-père. Toute la famille sait combien leur relation est forte. Personne ne peut se douter qu’elle a pris une nouvelle tournure immorale. Inacceptable. Intolérable…
    Zahia est heureuse lorsqu’elle les reçoit enfin. Ils peuvent préparer la fête.
    Kheira a retrouvé son sourire et elle les aide à la cuisine. Les filles ont mis de la musique et à chaque fois que Kamel accepte de danser, elle n’hésite pas à abandonner la cuisson des gâteaux, pour le rejoindre, sur la piste.
    Et durant tout son séjour, chez sa sœur, elle profite de la moindre occasion, être avec lui. Même s’ils ne peuvent pas rester plus d’une minute ou deux, c’est un temps suffisant, pour se prendre par la main, pour s’embrasser…
    Tous deux ont hâte de se voir, ailleurs, loin de leurs familles.
    - Kheira a oublié son chagrin d’amour, remarque Aïcha. Finalement Kamel a bien fait d’aller les chercher !
    - Il est fou de joie ! Toute la famille est réunie et sa tante bien-aimée est aussi là ! rappelle Zahia. Il y aurait eu un manque si elle n’avait pas été là !
    - Elle compte tant pour toi ! Ces années de séparation t’ont marquée, poursuit la belle maman. Maintenant qu’on est réunie et que seule la mort nous séparera, tu devrais être rassurée !
    - C’est plus fort que moi, répond Zahia. J’ai peur… au fond de moi, je veux tout contrôler !
    - Certaines choses échappent à notre contrôle. Autant t’y faire, tu n’y pourras rien ! Profite de la vie pleinement. C’est tout ce que je peux te conseiller !
    Zahia la remercie d’un sourire. Elle suit son conseil et va rejoindre la famille et les amies, dans la cour où toutes discutent, rient. Ses filles et ses sœurs dansent.
    Elle se mêle à ses dernières. Elle est si heureuse et quand Kamel la rejoint, elle ne peut s’empêcher de suivre son regard. Il regarde les filles, de son âge.
    Elle sourit, persuadée que d’ici peu, il allait lui souffler le prénom de celle qu’il voudrait pour la vie.

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  68. Artisans de l'ombre Dit :

    69eme partie

    La fête a lieu trois jours plus tard. Zahia, fière et heureuse pour son fils, s’est faite belle et suivant les ordres de sa belle-maman et de ses sœurs, elle n’entre plus en cuisine. Elle reste dans la cour et accueille les invités. Les voisins ont bien voulu leur ouvrir les portes de leur salon. Les hommes y dîneront. La villa s’est avérée trop petite, pour tous les contenir.
    - Maman, le dîner est prêt, dit Kheira. On emporte une grande partie, là-bas ! On sert tous les invités au même moment !
    - Vous ne pourrez pas… Je ne crois pas qu’il y ait assez de vaisselle !
    - Si, si…
    - Je vous fais confiance. Prenez tout ce qu’il faut, en grande quantité ! Je tiens à ce qu’il ne manque de rien ! Kheira la rassure.
    - Tout se passera bien, lui dit elle. J’y vais.
    - Demande à Kamel, de t’aider !
    - Qui voudrais-tu qui m’assiste là-bas ?
    L’occasion rêvée pour eux, d’être en contact. Même s’ils sont occupés à servir, ils profitent de la moindre minute où ils sont seuls, pour s’embrasser. Ils risquent d’être surpris mais c’est plus fort qu’eux. Ils ne peuvent s’en empêcher.
    - Kamel ! Kamel !
    Safir entre dans la cuisine et les trouve en train de mettre les fruits, dans des petites corbeilles.
    - Une, sur chaque table, dit Kheira.
    - Vous en avez pris du temps !
    - On avait oublié de rincer les pommes et les poires !
    - Il fallait prévoir !
    - C’est bon, on y va ! dit Kamel.
    Les cousines, des jeunes filles, apportent la vaisselle sale et lavent sans perdre de temps. Kheira leur donne un coup de main. Elle essuie la vaisselle.
    - Ils sont combien à ne pas être encore passés à table ?
    - Une vingtaine… Un dernier service et c’est fini !
    - Enfin ! Je commence à avoir mal au dos, soupire Kheira. Vous ne savez pas si de l’autre côté, elles on bientôt fini ?
    - Le retour de la musique sera signe qu’elles ont toutes dîné !
    Moins d’une demi-heure après, l’ambiance reprend. Si les invités ont envie que la fête se prolonge jusqu’au matin, Kheira meurt d’envie de les voir partir. Ils pourront rester en famille. Et elle pourra avoir toute sa tête, pour réfléchir à comment partir en week-end, sans ses sœurs.
    Durant les vacances, ils ne se séparent jamais. Lorsqu’ils sortent à la plage ou faire des achats, à Annaba, Kadour les accompagne et ne les quitte pas.
    Comment il fait pour supporter qu’elle puisse vivre à des centaines de kilomètres d’eux, elle l’ignore. Mais maintenant qu’elle est à la maison, elle devra avoir un bon prétexte, pour sortir seule.
    - Un dinar pour connaître tes pensées, dit Safir.
    - Elles ne le valent pas, répond-elle. C’est bon ? Ils ont tous dîné ?
    - Oui.
    - On nettoie et range avant de partir, décide-t-elle, demandant aux cousines, de rester. On vous rejoint après.
    - Je vais chercher du thé, dit Safir. Bon courage les filles !
    Kheira soupire en le voyant partir et sourit lorsque Kamel réapparaît. Il a réfléchi et a trouvé une idée de génie…

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  69. Artisans de l'ombre Dit :

    70eme partie

    Kheira écarquille les yeux lorsqu’il lui fait part de son idée.
    - Je demande à quelqu’un de t’appeler, en se faisant passer, pour la dame chez qui tu vis, dit-il. Et tu dois partir, en urgence à Alger ! Je t’attendrais là bas !
    - Hum…
    - Ils ne se douteront de rien !
    - Peut-être ? Mais toi, comment feras-tu ? Tu es censé avoir fini tes études, être en vacances ! lui rappelle-t-elle. Ils voudront savoir où tu vas, pour combien de temps…
    - Je reprends le travail, de videur, la semaine prochaine, lui confie-t-il. Je pourrais m’absenter quand je veux. On se verra autant de fois que tu voudras !
    - Ton idée est bonne ! Tu attends trois ou quatre jours avant d’appeler, lui dit-elle. Le temps d’aider Zahia, à tout remettre en place et puis, il faudra que je rentre…
    Des coups à la porte les interrompent. Sa sœur Sabrina entre en criant.
    - Kheira, où es-tu ?
    - On est ici, répond celle-ci en allant à sa rencontre.
    Sabrina sourit en voyant Kamel.
    - Vous discutiez ?
    - Non, on aidait les filles, à finir de ranger. Elles au salon, précise le jeune homme. Moi et Kheira, à la cuisine !
    - Bien… Si vous avez besoin d’aide, je suis là !
    - Non, on a fini ! En fait, on s’apprêtait à retourner à la maison !
    Sabrina rejoint les cousines. Elles ont terminé de nettoyer le salon. Maintenant que la villa du voisin est propre et bien rangée, ils retournent tous à la maison où on continue de danser.
    Zahia les accueille en levant les bras, vers eux, abandonnant ses invitées.
    - Ils disent que la fête est une vraie réussite et que le couscous était délicieux, leur dit-elle. Le jour où tu te marieras, je m’occuperais de tout, promet-elle à sa sœur.
    - Incha Allah !
    - Viens, danse avec moi !
    Kheira ne refuse pas. En fait, c’est toute la famille qui se met à danser autour de Kamel. Il en profite pour se glisser entre elles. La fête est en son honneur. Mais ce n’est pas du goût de son père qui entre et lui fit signe de sortir.
    - On te demande dehors !
    Mais une fois dehors, Safir lui reproche son comportement.
    - On dirait un coq !
    - Maman voulait…
    - Quand on est en famille ! Mais là, il y a les cousines, les voisines, dit Safir. Leurs familles ne risquent pas d’apprécier ! Chwia kdar !
    - C’est bon, ya baba ! Inutile d’en faire un scandale. Je croyais que c’était ma fête !
    - Oui, c’est ta fête ! Mais un peu de retenue ! insiste le père. Patiente que les invités soient partis, pour retourner là-bas !
    - Ya baba, ya baba…
    Kamel passe le bras sur ses épaules et ensemble, ils rejoignent le groupe d’invités qui discutent et jouent aux dominos, en attendant la fin de la fête. Plus que jamais, il a hâte de les voir partir…

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  70. Artisans de l'ombre Dit :

    71eme partie

    -Enfin, je ne croyais plus pouvoir tenir, soupire Zahia en s’allongeant à même le tapis. Les invitées voulaient encore rester !
    - La fête est une vraie réussite, dit sa belle-maman, en la rejoignant. Quelle heure est-il les filles ?
    - Quatre heures dans quelques minutes, répond Sabrina. Vous auriez pu nous laisser danser jusqu’au matin ! Maintenant, qu’est ce qu’on va faire ?
    - Essayez de fermer l’œil !
    - J’ai encore de la musique dans les oreilles, dit Kheira, avant de suggérer à ses sœurs de nettoyer le salon.
    C’est la seule grande pièce où on pourra dormir ensemble !
    Zahia demande à ses filles d’aider leurs tantes. Ces dernières la prient de les laisser écouter de la musique.
    - Pas trop fort…
    - Mettez de la musique douce, dit Kheira. De quoi calmer les esprits !
    - Oh ! la ! la !
    Kheira prend un coussin et s’allonge près de sa sœur. Elle est si épuisée qu’elle finit par s’endormir. Zahia la couvre avec un drap. Elle apporte un matelas pour sa belle-maman et le couvre d’un drap. Aïcha s’endort près d’elle. Le reste de la famille ne tarde pas à faire comme elles.
    Kamel et son père sont restés dans la cour. Avec eux, les fils de Karima et de Soumia.
    Ils se sont débrouillés des coussins et des draps et se sont installés, l’un près de l’autre, sur des tapis. Safir ne peut s’empêcher de parler de la fête.
    - La famille et les voisins sont contents pour nous, dit-il avant de préciser, pour toi !
    - J’ignorais que ma réussite importait autant, même pour les autres ! remarque Kamel.
    - Tu ne seras pas surpris le jour de ton mariage… Il y aura foule, dit Safir, avant lui demander à voix basse : Tes tantes Soumia et Karima m’ont paru distantes. Est-ce que je me trompe ?
    - Non. On a dansé ensemble. Mes cousines étaient là… Et les garçons aussi. Pourquoi le penses-tu ?
    - Une impression… C’est comme si elles se tenaient en retrait. J’étais habitué à ce que Soumia se mêle de tout, insiste Safir. Tu comprends ?
    - Tu te trompes, elle n’a pas trouvé le temps de fouiner ! Elle était occupée à aider puis à danser ! Je suis sûr que demain, une fois reposée, elle va me harceler de questions !
    Le jeune homme ne croit pas s’y bien dire. Dès le lendemain, alors que ses tantes maternelles préparent le déjeuner, Soumia le rejoint dans sa chambre. Il est en train de faire sa petite valise.
    - Ne me dis pas que tu pars aujourd’hui ?
    - Non, demain, répond-il.
    -Pourquoi es-tu si pressé de partir ?
    - Le travail, répond Kamel. Je dois continuer en attendant…
    - Moi, je pense que tu vas retrouver ta petite amie, dit la tante. J’ai vu ton regard rêveur…
    - Ah !
    Il rit comme s’il est pris en flagrant délit.
    - Dis-moi, qui est ce ? Comment est-elle ? D’où est-elle ?
    - Hé, doucement,réplique-t-il sans cesser de rire. C’est un interrogatoire, ma parole !

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  71. Artisans de l'ombre Dit :

    72eme partie

    -Je n’ai pas cessé de t’observer, dit-elle à son neveu. Et je suis prête à jurer qu’il y a une fille qui t’attend à Constantine.
    Kamel secoue la tête.
    - Hélas non ! soupire-t-il.
    - Elle vit ici ?
    - Non !
    Mais elle ne le croit pas. Les sourcils froncés, elle le regarde comme pour mieux lire en lui.
    - Je ne vois pas qui pourrait ravir ton cœur ici, dit-elle. Tu n’as pas eu le temps de sortir, de voir les petites perles.
    - Tu te casses la tête pour rien, réplique Kamel. Wallah !
    - Ne jure pas ! Je sais que tu mens. Alors, dis-moi où, sinon je ne vais pas cesser de fouiner !
    Kamel est contraint à mentir pour avoir la paix. Il sait qu’elle n’abandonne jamais. Il se décide à lui confier qu’il y a bien quelqu’un.
    - Je le savais ! dit-elle. Qui est-ce ?
    - J’aimerais bien le savoir aussi, répond-il. Figure-toi que je l’ai vue dans le car. Elle voyageait avec son père. Elle… elle est belle. Je ne peux même pas te la découvrir.
    - Mon pauvre garçon ! As-tu vu où ils sont descendus ?
    - Non, je suis descendu le premier, et sache que je le regrette depuis !
    - Il n’y a vraiment pas moyen de la retrouver et de mettre un nom à son visage ?
    - J’ai essayé, confie-t-il. J’ai demandé au receveur s’ils les connaissaient et tout… Et non, il ne les a jamais vus auparavant, poursuit Kamel, très sérieux, pour être convaincant. Je crois que je vais passer mon temps à surveiller toutes les filles, dans l’espoir de la retrouver.
    - Oh mon fils, j’ai vu ton regard et j’ai tout de suite su qu’il y avait quelque chose.
    - Tu as un scanner à la place des yeux, soupire-t-il. À part toi, personne n’a remarqué ?
    - Non, je ne crois pas. Dommage que tu ne puisses pas me la décrire.
    - Tu aurais fait quoi ?
    Kheira fait irruption dans la chambre, les surprenant en pleine discussion. Elle sent tout de suite qu’elle les gêne.

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  72. Artisans de l'ombre Dit :

    73eme partie

    -Qu’est-ce que je pourrais savoir de plus que toi ? rétorque-t-elle à Soumia. Je suis sa tante et même si on est proche, il ne me dit pas tout ! La preuve, je découvre aujourd’hui qu’il a une amie !
    - Je ne te crois pas ! Allez, dis-moi, qui est-ce ? Est-elle d’ici ?
    Kheira lui jure ne pas la connaître.
    - Mais que sais-tu que j’ignore ?
    - Rien, Wallah !
    Soumia abandonne. Zahia, qui passe dans le couloir et qui a remarqué qu’elles chuchotent, s’arrête à leur hauteur. Elle porte une pile de coussins à ranger.
    - Qu’est-ce qui se passe ici ?
    Soumia sourit.
    - On complotait, répond-elle à sa belle-sœur. Figure-toi que ton fils est tombé amoureux d’une fille qu’il ne connaît pas !
    - Ah ! Je m’en doutais…
    Zahia va ranger dans un placard les coussins. Elle va à sa chambre et s’assied sur le lit. Soumia et Kheira la rejoignent.
    - Tu t’en doutais ? demande Kheira, curieuse.
    - Il était malheureux à son retour, se rappelle Zahia, avant de soupirer. J’avais de la peine en le voyant dans cet état ! Je ne pouvais rien faire pour lui. Il refusait même d’en parler…
    Elle ferme les yeux comme pour chasser ce douloureux souvenir.
    - Heureusement, lorsqu’on s’est mis à préparer la fête, il a retrouvé son sourire ! J’ignore par quel miracle mais, Hamdoullah, il est redevenu comme avant ! Pendant quelques jours, il m’a angoissée, leur confie-t-elle. J’espère ne plus jamais revivre cette angoisse !
    - Tu ne m’en avais pas parlé, lui reproche Soumia. Depuis que tu as retrouvée ta famille, tu t’es éloignée de nous !
    - Non, non. Tu te trompes, affirme Zahia. Il faut me comprendre. J’avais retrouvé ceux que j’avais cru perdus à jamais !
    - On devait rattraper le temps perdu, émet Kheira, en serrant sa sœur contre elle. Maintenant, elle est toute à vous !
    - Je suis heureuse pour vous, dit Soumia.
    - Tu sais, même Kheira a traversé un moment difficile ! Aïcha m’avait demandé de venir la chercher pour qu’elle change d’air !
    Elle n’était pas bien, confie Zahia. Une peine de cœur, aussi !
    - Quel âge terrible ! réplique Soumia. Alors, vous avez connu des peines de cœur à la même période ?
    - Pourquoi faut-il que tu en parles maintenant ? lui reproche Kheira en s’emportant presque, après sa sœur. Et moi qui voulais oublier !
    Elle sort de la chambre. Soumia secoue la tête, surprise. Elle se pose bien des questions…

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  73. Artisans de l'ombre Dit :

    74eme partie

    -Mais qu’est-ce qui lui prend ?
    Zahia hausse l’épaule.
    - Je l’ai trouvée étrange, l’autre fois, confie-t-elle à sa belle-sœur. Elle ne semblait pas contente pour Kamel… Elle ne voulait pas venir…
    - Qu’est-ce qui lui a fait changer d’avis et de sentiments ? l’interroge Soumia.
    - Kamel s’est mis dans tous ses états lorsqu’il a vu qu’elle n’était pas là. Il est parti la nuit là-bas ! Le matin, il a ramené son grand-père et sa tante !
    Elle était de meilleure humeur et d’après ce que j’ai vu, elle s’est bien amusée !
    - Elle m’a parue très bien, remarque Soumia. Elle n’a pas cessé de danser, surtout avec lui ! Si elle n’était pas sa tante, je jurerais qu’elle et lui s’aiment !
    - Tu dis n’importe quoi !
    - Ça peut paraître bête mais c’est ainsi que je les vois. On dirait des amoureux…
    - Aya baraket ! C’est à croire que tu parles sans réfléchir !
    Soumia se lève.
    - Je m’excuse, lui dit-elle. Je crois que tu as raison ! Je parle sans réfléchir ! Ce doit être la fatigue…
    - Allons voir ce qu’ils font !
    Zahia la prend par le bras et elles vont au salon où toute la famille est réunie. Les neveux, les nièces, les tantes, tous sont là. Sauf deux personnes…
    Alors que Zahia s’assoie, Soumia trouve un prétexte, pour se rendre à la cuisine.
    - Je vais boire un verre d’eau… Qui en veut ?
    Aïcha en veut aussi. Soumia ne s’y rend pas directement. Elle s’arrête à la hauteur de la chambre de Kamel et tend l’oreille.
    Elle entend Kamel et Kheira discuter à voix basse, si basse qu’elle ne saisit rien de ce qui se dit derrière la porte. Elle est si curieuse et si intriguée qu’elle s’apprête à entrer. Safir la surprend la main sur la poignée.
    - Ah ! tu es là ! dit-il, la faisant sursauter.
    - Oui.
    Elle va vers lui.
    - Tu as besoin de moi ?
    - Non. Ton mari est arrivé. Il préfère tes râles au silence que tu as laissé, plaisante-t-il. Si tu veux encore rester, je peux négocier pour toi !
    - Tu ferais ça, pour moi ?
    - Bien sûr ! Alors, tu pars ou tu restes ?
    Soumia hésite à partir.
    - Je vais dire un mot à Kamel et je vous rejoins, dit-elle. S’il refuse de se passer de moi, je partirais !
    - Je vais discuter avec lui…
    Soumia que la curiosité a piqué, cette fois, n’hésite pas à ouvrir. Elle les trouve assis sur le bord du lit à parler doucement. Kamel est tout rouge.

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  74. Artisans de l'ombre Dit :

    75eME PARTIE

    -Qu’est-ce que vous faites ? leur demande-t-elle. Qu’est-ce que vous complotez ?
    - Rien, répond-il. Tout comme toi, elle essaie d’en savoir plus… C’est toi qui l’as mise au courant ?
    - Inutile de mentir, je sais qu’elle l’est depuis longtemps ! réplique la tante. Ce que je voudrais savoir, c’est ce que vous faites ici, seuls ?
    - Rien, répond Kheira.
    - Je trouve ton comportement étrange, dit Soumia à l’intention de celle-ci. J’ai l’impression qu’il se passe des choses !
    Kheira éclate de rire.
    - Et quoi donc ?
    - Qu’avez-vous à dire de si secret, au point de vous isoler ?
    - Je voulais le cuisiner, réplique Kheira. J’aurais réussi si tu n’étais pas entrée ! Mais bon… ce sera pour une autre fois !
    Soumia a l’impression d’avoir raté quelque chose. Elle voie bien que son neveu est gêné et qu’il semble lui en vouloir.
    - Si je suis entrée ainsi, c’est pour te dire au revoir, lui dit-elle en souriant. Encore mabrouk mon fils ! Fais bon voyage !
    - Merci !
    - Quand tu reviendras, passe par chez moi ! Je serais heureuse de te revoir !
    - Avec plaisir !
    - Porte-toi bien !
    Elle serre Kamel, dans ses bras. Kheira ne l’embrasse pas. Elle se contente de lui faire un signe de la main. Sans sourire…
    Soumia va apporter de l’eau, à Aïcha puis rejoint son frère et son mari, à la cour.
    - Ton mari est d’accord, pour que tu restes, lui apprend Safir.
    - Non, non, je me suis rappelée qu’une voisine m’a demandé service, ment-elle. Il faut que je rentre ce soir…
    - Oh non !
    - Je reviendrais vite, promet-elle à son frère en le prenant par le bras. Je voudrais seulement te conseiller, ajoute-t-elle à voix basse.
    - Ghir el kheir ?
    - Rentrons ! dit-elle. Je vais ramasser mes affaires et t’expliquer…
    Soumia s’efforce à sourire, pour le rassurer. Une fois qu’ils sont loin de toute oreille indiscrète, elle lui demande de garder un œil sur Kamel.
    - Pourquoi ?
    - Je ne sais pas, avoue-t-elle. Mais j’ai le sentiment qu’il n’est pas normal…
    - Tu penses qu’il file un mauvais coton ?
    - Peut-être ?
    Safir porte la main à la tête et se gratte le crâne.
    - Tu penses qu’il a de mauvaises fréquentations ?
    - Oui, lâche-t-elle en se tournant vers Kamel et Kheira qui sortent de la chambre. Avec elle…

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  75. Artisans de l'ombre Dit :

    76eme partie

    -Tu crois qu’elle le mène sur le mauvais chemin ? demande Safir en devenant livide. Tu crois ?
    Soumia hoche gravement la tête.
    - Je ne parle jamais pour rien, dit-elle. Garde un œil, c’est tout ce que je te demande !
    Safir le lui promet. Soumia va dire au revoir au reste de la famille avant de partir. Elle laisse son frère si soucieux qu’au dîner, il ne mange rien.
    Zahia, qui est sollicitée par ses enfants, ses sœurs, ne remarque rien. Elle les a tous servis copieusement. Mais en allant aider son beau-père à manger, elle n’a pas vu qui a ou n’a pas mangé.
    Même ce soir-là, toute la famille se réunit autour de Kamel. Ils plaisantent et rient de blagues qu’ils prennent plaisir à raconter. Aïcha se met à leur parler de Zahia et de tous les coups tordus qu’elle leur a faits.
    - C’était une vraie peste, leur dit-elle. Il ne passait pas un jour sans qu’on crie après ! Wellah, à plusieurs reprises, j’avais été tentée de retourner chez mes parents, leur confie-t-elle.
    - On ne dirait pas qu’elle ait pu être aussi difficile, à vivre, remarque Kheira. Elle est calme, posée et c’est à peine si elle dit un mot.
    - Elle s’est défoulée quand elle était petite, glisse Kamel. Dis, pourquoi n’avez-vous pas cherché après elle ?
    - Tu parles de sa fugue ? reprend Aïcha.
    - Oui.
    - On a cherché après elle et crois-moi, on était persuadé qu’elle était tombée entre les mains, de voyous ou de criminels !
    - J’ai eu de la chance de tomber sur une famille bienfaisante ! Ma belle-mère, Allah yarhamha avait un fond merveilleux, se rappelle Zahia. C’était une femme exceptionnelle.
    Elle est émue en se remémorant tous les moments de complicité qu’elles avaient partagés. Kheira s’appuie sur son épaule et lui rappelle un autre fait important.
    - Oui, je pense que tu as pris exemple sur elle. Aujourd’hui, toi et maman êtes amies, dit-elle. Vous vous entendez si bien qu’il est presque inimaginable que vous ayez eu des différends !
    - C’est vrai, reconnaît Aïcha. Mais avant, sa grand-mère, Allah yarhamha dont tu as hérité le prénom, lui passait tous ses caprices puis son père. Il l’avait trop gâtée. Un peu comme toi, ajoute-t-elle à l’intention de Kheira. Tu en as toujours fait qu’à ta tête.
    Sabrina et Lilia renchérissent.
    - C’est vrai ! C’est une peste, dit l’une.
    - Chitan, le diable personnalisé, ajoute l’autre.
    - Hé doucement ! leur ordonne Kamel. On ne parle pas comme ça de ma tante préférée !
    Safir qui se tient en retrait les voit se cligner des yeux. Il quitte la pièce en soupirant bruyamment.
    - Kamel, crie-t-il. Viens ici ! J’ai à te parler.
    Son ton sec et énervé n’échappe à personne. Kamel s’exécute sur le champ. Zahia les rejoint. Elle ne comprend pas ce qui se passe.

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  76. Artisans de l'ombre Dit :

    77eme partie

    -Qu’est ce qui se passe ? Safir a le regard dur.
    - Retourne au salon, dit-il à sa femme, lui reprochant de les avoir suivis. Je dois parler à Kamel !
    - Qu’y a-t-il de si urgent ?
    - Une discussion entre hommes, réplique-t-il en faisant signe à son fils d’entrer dans sa chambre.
    - Tu te comportes avec lui comme si tu avais quelque chose à lui reprocher ! Comme du temps où il avait fait des bêtises et que tu t’apprêtais à le corriger !
    - C’est un homme maintenant, dit-il, en levant la main, d’un air déçu. Je ne peux pas me bagarrer avec lui !
    - Il a fait quelque chose ?
    -Non ! Non… Va maintenant, laisse-nous !
    Il attend qu’elle soit retournée au salon, pour rejoindre Kamel, dans la chambre.
    - Qu’as-tu à me dire de si urgent ?
    Safir se tient en face de lui. Il serre le poing, refoulant son envie de le gifler.
    - Je t’interdis de t’approcher de ta tante, dit-il. Finis les moments d’intimité ! Je t’interdis tout contact avec elle !
    - Mais pourquoi ?
    Safir ferme les yeux.
    - Tu sais pourquoi ! J’ai envie de vous étrangler ! dit-il entre les dents. Si je vous surprends encore, à échanger des clins d’œil et autres, je te jure que je t’arrache les yeux !
    Le jeune homme recule, devenant subitement blême. Il ne dit pas un mot. Son silence est une preuve pour Safir qu’il ne s’est pas trompé. Soumia avait vu juste dans leur jeu.
    - Garde à toi ! Je t’aurais averti !
    Il sort de la chambre et tombe sur Zahia.
    - Tu écoutais ? l’interroge-t-il.
    - Non. Mais que voulais-tu lui dire que je ne pouvais pas entendre ?
    - Pourquoi faut-il que tu insistes ? On a eu une discussion particulière, répond-il, agacé. Un jour, tu le sauras !
    - Pourquoi pas maintenant ?
    Zahia trouve le comportement de son mari inquiétant. Il le connaît calme et serein. Il est tout le contraire maintenant et cela l’inquiète. Il a dû se passer quelque chose. Elle n’insiste pas auprès de lui. Elle sait qu’il n’en dira pas plus. Elle attend qu’il soit entré dans leur chambre pour voir Kamel. Ce dernier est assis sur le bord du lit et se tient la tête entre les mains, abattu…

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  77. Artisans de l'ombre Dit :

    78eme partie

    -Qu’est-ce qui se passe ? Qu’est-ce qu’il a pu te dire pour te mettre dans cet état ?
    - Rien ! Laisse-moi tranquille !
    - Pourquoi ? Qu’est-ce qui se passe que j’ignore ?
    - Tu n’as pas besoin de savoir… Bonne nuit maman !
    - Pourquoi vous faites tant de mystère ? crie-t-elle.
    - Je t’en prie… Demain, je te raconte tout !
    - C’est promis ?
    Kamel hoche la tête sans la regarder. Zahia retourne au salon. Comme il se fait tard, elle s’excuse et charge ses filles d’installer les matelas pour la nuit. Elle espère qu’en rejoignant son mari, elle en saura plus et qu’elle n’aura pas à attendre jusqu’au matin. Mais il garde le silence. Il ne dort pas. Elle a beau lui poser des questions, il reste muet comme une carpe. Elle voudrait bien comprendre pourquoi.
    - Si tu continues à garder le silence, je me mets à crier jusqu’à ce que ton père t’ordonne de tout me raconter ! menace-t-elle.
    Safir porte la main à la tête. Il est las d’entendre ses questions.
    - Il fréquente une fille indigne de lui et de la famille, répond-il. Je lui ai demandé de rompre et lui ai interdis de la revoir !
    Zahia fronce les sourcils. Elle voudrait comprendre.
    - Pourquoi en avoir fait un mystère ?
    - Je craignais que tu prennes son parti, réplique-t-il. Je sais que tu veux le marier !
    - En effet ! Et je suis sûre que tu n’as pas la preuve que cette fille soit mauvaise ?
    - Ce n’est pas vrai !
    _ Pourquoi ne pas leur donner une chance ? émet-elle. Les gens changent. Pourquoi pas elle ?
    Safir est persuadé que son fils ne cherchera plus à revoir Kheira. Il n’a pas intérêt. Si sa femme n’était pas aussi proche d’elle, il n’hésiterait pas à la mettre au courant. Mais cette nouvelle risque de la tuer. Elle a passé des années à attendre qu’elle retrouve sa famille. Elle ne supportera pas de couper avec elle. C’est inimaginable, impensable, inacceptable.
    Elle est si heureuse et si épanouie depuis qu’il n’a pas la force de lui dire toute la vérité. Cela la briserait.
    À l’aube, lorsqu’elle se lève pour prier, elle s’assure que son beau-père dort et qu’il est couvert. Ensuite, en passant près de l’entrée, elle remarque que la porte est ouverte. Elle s’étonne que personne n’ait pensé à la fermer. Pourtant, dans ses souvenirs, elle l’était quand elle a rejoint son mari dans la chambre.
    - Qui a pu l’ouvrir ?
    Elle la ferme puis va prier. Elle ne retourne pas au lit. Elle retrousse ses manches, décidée à préparer des beignets. Elle tient à ce que Kamel en prenne avant de partir.
    L’odeur du café puis celle des beignets réveillent toute la famille. Sauf Kamel… Tous sont réunis dans la cuisine et prennent leur petit-déjeuner dans la bonne humeur. Zahia secoue la tête.
    - Le pauvre doit être peiné, fait-elle remarquer à Safir. Ta discussion a dû le laisser éveillé toute la nuit. Je comprends qu’il ne se soit pas réveillé malgré ce bruit !
    - Je vais le réveiller. Il doit partir tôt… Mais avant, jugeant qu’une demi-heure de sommeil en plus, lui fera du bien, il ne s’y rend pas tout de suite. Il décide de s’occuper de son père. Il l’emmène aux toilettes puis l’aide à se changer. Il lui apporte son petit-déjeuner. Ce n’est qu’ensuite qu’il va dans la chambre de Kamel et se fige dans l’entrée. Son fils n’est plus là. Son lit est intact. Il n’a pas dormi…

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  78. Artisans de l'ombre Dit :

    79eme partie

    Safir se rend compte que ce ne sera pas facile, de communiquer avec Kamel. En lui interdisant de fréquenter Kheira, il se l’est mis à dos. Il prie pour qu’il prenne le temps de réfléchir à la situation et qu’il revienne à la raison.
    Il ne comprend pas comment ils en sont arrivés là. Zahia le rejoint à la chambre et elle s’étonne du fait qu’il soit parti sans même leur avoir dit au revoir.
    - Tu as été dur avec lui, reproche-t-elle à son mari. Il est parti sans même avoir pris son café, sans nous embrasser !
    - J’ignore qu’il ne prendrait aussi mal, réplique Safir. C’est mon devoir de père de m’assurer qu’il ne tourne pas mal !
    - Oui, peut-être ?
    Zahia retourne à la cuisine. Sa mine contrariée n’échappe à personne. Quand elle leur apprend que Kamel est parti, tous sont étonnés. Kheira ne cache pas sa déception.
    - On lui a donné une magnifique fête. Il aurait pu nous remercier ! Toute la famille s’est investie physiquement et financièrement !
    - Je sais. Je vous remercie toutes et tous, à sa place, dit Zahia en prenant sa main. Surtout toi… Kamel t’adore !
    - Oui, c’est un garçon adorable !
    - Tu fais bien de le rappeler, dit Safir derrière elles, ce n’est qu’un garçon !
    Kheira voie bien à quoi il fait allusion. Elle a un petit sourire. Elle ne répond rien. Elle évite son regard plein de reproches.
    - Bon, on t’aide à ranger la maison puis on part, décide-t-elle.
    Zahia veut encore les garder, Aïcha tient à rentrer.
    - On est là depuis cinq jours, lui rappelle celle-ci. Ton père est seul. Je te promets qu’on reviendra !
    - C’est promis ?
    - Si je ne peux pas venir, je t’enverrai les filles, promet-elle. Ou lorsque Kamel rentrera, vous viendrez passer une nuit ou deux !
    Zahia n’a pas le cœur à laisser son beau-père. Il ne quitte plus le lit et même si ses enfants s’en occupent bien, le jour, la nuit, il faut quelqu’un qui n’hésite pas à se lever plusieurs fois, pour s’assurer qu’il va bien.
    - Incha Allah…
    Safir, qui a tout entendu, se jure que son fils ne posera plus les pieds dans la même pièce que Kheira. C’est lui qui l’accompagnera chez sa famille. Il sait que Kheira n’osera plus se comporter de façon incorrecte, en sa présence.
    Il est persuadé qu’ils n’auront plus l’occasion de se voir. Il se trompe…

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  79. Artisans de l'ombre Dit :

    80eme partie

    Kamel et Kheira s’arrangent pour se voir, plusieurs fois. Safir et Soumia ne se doutent de rien. Le père croit qu’en ayant parlé franchement, les choses allaient retrouver leur place. Ils ne comprennent pas qu’ils puissent se voir autrement qu’une tante et qu’un neveu. Safir même s’il est persuadé que ses avertissements ont ouvert les yeux à son fils, même si ce dernier semble serein et avoir tourné la page, dort avec un œil fermé. Il le surveille. Si avant, il ne se rendait pas à Constantine, depuis qu’il a découvert, il ne rate pas une occasion, pour partir. Ses visites ne semblent pas le surprendre. Plusieurs écoles ont fait appel à lui, pour emmener des élèves, en excursion. Un bon prétexte, pour se rendre à son travail. Kamel, qui ne s’est pas encore trouvé un travail, continue d’être videur et à dormir à la cité universitaire. Le fait que Kamel ait posé sa candidature, à bien des établissements, dans leur région, le rassure. Il pense qu’il tient à rentrer, définitivement, à la maison. Lorsqu’il vient pour une nuit ou deux, il ne cherche pas à se rendre à Guelma. Pour Safir et Soumia, c’est bon signe. Plusieurs mois passent. Kheira n’est pas revenue à la maison. Si bien qu’un jour, Zahia décide d’aller la voir dès qu’elle apprend sa venue d’Alger. C’est Safir qui l’a emmené à Guelma.
    C’est Kheira qui leur ouvre et elle tourne la tête en les découvrant sur le seuil de la porte. Elle les salue à peine. Elle a les traits tirés.
    Zahia la prend dans ses bras.
    - Comme tu m’as manqué !
    - Moi aussi, tu m’as manqué, dit Kheira, très grave.
    - Pourquoi n’es tu pas venue ? Cela fait des mois qu’on ne s’est pas vues !
    - J’ai eu beaucoup de travail, prétexte-t-elle. J’avais un programme chargé…
    Elle évite le regard de Safir. Elle ne lui a pas adressé la parole.
    - Qui est-ce ?
    - Zahia, crie-t-elle à sa mère. Allez-y, ils sont au salon…
    Kheira ne les accompagne pas. Elle se rend à la cuisine, pour préparer du café. Ses sœurs rentrent d’une sortie en ville. Elles ont apporté des gâteaux qu’elle s’empresse de servir avec le café. D’habitude, elle leur tient compagnie mais aujourd’hui, elle va s’enfermer dans sa chambre. Elle n’en ressort pas même quand Zahia, un moment après, demande à la voir.
    - Qu’est-ce qui lui prend ?demande-t-elle à Aïcha. Elle est fâchée après moi ?
    - Non, elle est comme ça, depuis son retour, confie celle-ci. Elle s’isole des heures…
    - Qu’est-ce qui lui arrive alors ? Les filles ne savent pas ? demande-t-elle en allant voir Sabrina et Lilia, à la cuisine. Dites moi ce qui se passe !
    Les jeunes sœurs ne savent pas.
    - Elle ne parle à personne. Elle semble en vouloir au monde entier…
    - Mais pourquoi ?
    Tous veulent comprendre mais personne ne sait vers qui se tourner. Sauf Safir…

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  80. Artisans de l'ombre Dit :

    81eme partie

    Dès qu’ils rentrent, il va trouver son fils. Kamel est dans sa chambre, l’air sombre.
    - Prends ta veste, lui dit-il.
    - Pourquoi ?
    - On va faire un tour dehors. Allez, vite !
    Kamel n’a pas le choix. Il s’exécute sur-le-champ. Safir a déjà mis le moteur en marche. À peine a-t-il fermé la portière qu’il démarre en trombe.
    - Où va-t-on comme ça ?
    - Tu verras.
    - Ralentis.
    Safir le regarde durement.
    - Tu me donnes envie de foncer dans un mur, réplique-t-il. Je t’avais interdit de la voir ! Pourquoi es-tu retourné avec elle ?
    - Comment sais-tu ?
    Safir donne un coup de poing dans le volant. Il se gare au bord de la route. Il descend et fait le tour de la voiture, ouvrant la portière à son fils.
    - Descends !
    - On peut très bien discuter comme ça.
    - Non, descends !
    Kamel soupire. Il ne doit pas s’attendre à recevoir une gifle qui le déstabilise. Safir l’aide à se relever et s’apprête à lui en donner une autre. Le jeune homme lève les bras pour se protéger.
    - Pourquoi tu ne m’as pas écouté ? lui reproche Safir. Pourquoi a-t-il fallu que tu retournes avec elle ?
    - Comment le sais-tu ?
    - Il suffit de la voir, rétorque Safir. Vous êtes fous !
    Kamel ne répond rien.
    - Depuis quand elle est enceinte ?
    - Je ne sais pas.
    Et une nouvelle gifle le surprend. Safir est furieux. Il le prend au cou.
    - Depuis quand ?
    - Quatre mois, souffle-t-il.
    Le père le lâche en le poussant brutalement contre la voiture avant de lui donner un coup de poing qui lui fend la lèvre.
    - As-tu pensé à ta mère ? Vous voulez lui briser le cœur !
    - Ne lui dis rien. Elle ne doit pas savoir.
    - Et comment veux-tu qu’elle cache la grossesse ?
    Kamel s’essuie la bouche, reculant à chaque pas que son père fait vers lui.
    - Comment peux-tu me regarder ? Comment peux-tu… Qu’est-ce qu’on va faire maintenant ? Dis-moi !
    - Je ne sais pas.
    - Qu’est-ce qu’elle t’a dit qu’elle fera ?
    - Je… On n’en a pas parlé, répond-il.
    - Ne me dis pas qu’elle va le garder ?
    - Elle a dit qu’elle se débrouillera seule.
    - Imbécile, comment as-tu pu nous mettre dans ce m… ?
    Safir le secoue avant de monter en voiture.
    - Pars ! Je ne veux plus te voir…
    - Tu ne peux pas me laissez ici ! crie Kamel.
    - Comme si j’allais me gêner !
    Il démarre sans un regard vers son fils. Il lui en veut à mort. Si Zahia découvre ce qui s’est passé, elle risque d’avoir une attaque. Elle qui adore Kheira…

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  81. Artisans de l'ombre Dit :

    82eme partie

    Safir s’est rendu chez sa sœur Soumia. Il a la chance de la trouver seule. Son mari a emmené les enfants en ville. Dès qu’elle l’a découvert sur le seuil de la porte, elle a su qu’il se passait quelque chose.
    Il lui apprend brutalement la nouvelle. Elle s’assoie et le regarde, espérant avoir mal compris.
    - Si, elle est enceinte, insiste-t-il.
    - Il faudra trouver un cabinet qui pratique l’avortement, dit-elle. Mais si c’est contraire à la religion…
    - Elle est au quatrième mois de grossesse, dit Safir. Tu penses qu’ils peuvent régler le problème, même à cet âge-là ?
    - Non…Oh non ! C’est trop tard…Qu’est ce qu’on va faire ?
    - Je ne sais pas, répond Safir. Je comptais sur toi, pour avoir une idée !
    - Je ne vois pas comment je pourrais vous aider, soupire-t-elle.
    - Il faut qu’on trouve quelque chose ! Si Zahia le découvre et surtout qui est le père, je crois que ça la tuera !
    Soumia sait combien elle l’adore et combien elle est proche d’elle. Zahia a souffert une grande partie de sa vie d’avoir coupé avec sa famille. Si une pareille nouvelle lui parvient, elle n’ose imaginer comment elle la prendra.
    - Elle ne doit pas savoir, insiste-t-elle avant de décider d’intervenir. Je vais parler à Kheira…Il doit bien y avoir une solution !
    La seule qui lui vient à l’esprit, est d’enfermer Kheira, jusqu’à la naissance du bébé. Mais où ?
    - Il doit y avoir un problème là où elle a l’habitude de vivre. Sinon elle ne serait pas rentrée…j’en déduis qu’elle doit chercher où aller !
    - Et si c’est le cas, est-ce que tu pourras l’aider ?
    Soumia réfléchit un petit moment.
    - Je vais parler avec elle et si elle n’a pas où aller, je pense demander à une amie de me laisser son appartement, lui dit-elle. Le temps d’en finir avec cette histoire ! Je ne les comprends pas ! Où avait-elle la tête ? Et lui…Ils méritent une correction !
    Safir confie en avoir donné une à son fils.
    - Cette peste en a une qu’elle n’oubliera jamais !affirme Soumia. Elle va en souffrir pendant des années !
    - Je l’espère !
    - Demain, je vais leur rendre visite, décide-t-elle. Je discuterai avec elle et s’il le faut, je lui forcerais la main, assure-t-elle. On doit en finir…
    Maintenant qu’il a pu se confier et qu’il peut compter sur son aide parce qu’il n’aura jamais l’audace de parler avec Kheira, il rentre chez lui. Il est très tard. Mais Il n’est pas surpris de trouver toute la famille bouleversée. Il devine que Kamel est rentré. Zahia l’accueille sèchement.
    - Je peux savoir où tu étais ! Pendant que Kamel se faisait tabasser par des voyous !
    - Un ami avait besoin de moi. Je suis resté avec lui, jusqu’à l’arrivée de la dépanneuse, ment-il. Et puis, ton fils n’a qu’à bien choisir ces fréquentations !

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  82. Artisans de l'ombre Dit :

    83eme partie

    -Mais qu’est-ce qui se passe ? Zahia a attendu que toute la famille se soit couchée, pour interroger son mari. Depuis qu’il est rentré, il n’a pas ouvert la bouche et elle a surpris son regard. Il est dur et plein de reproches. Ces grincements de dents l’inquiètent. Safir est de tempérament calme et tolérant, et il a changé. En y réfléchissant, elle remarque que cela dure depuis un moment.
    - Rien. Tu t’inquiètes pour rien, affirme-t-il en souriant mais elle voie bien que son sourire est forcé. Tu devrais raisonner Kamel. Il a de mauvaises fréquentations…
    - Non, c’est un garçon sérieux ! ça arrive à tout le monde de se faire agresser !
    - Peut-être… Maintenant, laisse-moi dormir, la prie-t-il. J’ai eu une dure journée et j’ai besoin de récupérer ! Je travaille demain !
    - Tu devrais penser à prendre ta retraite, dit Zahia. Si tu es si fatigué !
    - Le jour où ils auront quitté le banc, de l’école, j’arrêterais, promet-il. Mais pas avant…
    - Même si tu es fatigué ?
    - Je ne suis pas mort de fatigue, réplique-t-il. Je suis juste fatigué. Et je dois récupérer… Si tu veux bien me laisser dormir ?
    - Bonne nuit !
    Mais ils dorment mal. Zahia ne cesse de se poser des questions, sans réponse et lui à espérer que tout se passe bien. Le matin, il est contraint à prendre le volant. Une fois à la gare routière, il appelle sa sœur. Son mari lui apprend qu’elle s’est rendue chez sa belle-famille. Il espère que Kheïra saura l’écouter.
    Soumia n’a pas voulu perdre de temps. Après avoir envoyé ses enfants à l’école, elle est allée voir Kheïra. Aïcha est surprise de sa visite matinale.
    - Mon cadet a des difficultés en classe, ment-elle. Je voulais qu’elle lui donne un ou deux cours pour améliorer son anglais !
    - Elle dort encore et je ne sais pas si elle acceptera, répond Aïcha. Depuis son retour, elle n’est pas bien ! Reviens une autre fois !
    - Je ne pourrai pas. Je lui dois lui parler aujourd’hui…
    Elle va à la chambre et elle doit frapper longtemps avant que Kheïra n’ouvre.
    - Hé, doucement !
    Les yeux embués de sommeil, elle ne reconnaît pas tout de suite Soumia.
    - Toi, ici !
    - Oui, je dois te parler. C’est urgent.
    Elle doit la pousser pour pouvoir entrer. Elle prend le soin de fermer.
    - Je suis là pour t’aider !
    - Parce que j’ai besoin d’aide ?
    - Oui, réplique Soumia. Je suis au courant de tout. Kamel s’est confié à moi. Alors, réveille-toi et retrouve-moi chez moi dans deux heures !
    - Et si je ne viens pas ?
    Soumia hausse les sourcils.
    - Je sais que je suis la dernière personne sur terre à qui tu voudrais redevoir un service mais… si je suis venue ici, c’est pour t’aider ! Zahia, tes parents ne méritent pas… J’espère qu’ils ne le sauront jamais ! À toi de choisir…

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  83. Artisans de l'ombre Dit :

    84e partie

    Ne pas s’y rendre aurait été de la folie. Kheira se prépare. Sa famille est bien soulagée. En la voyant prête à partir, Aicha soupire.
    - Enfin… Je commençais à me demander si un taleb ne pourrait pas t’aider à oublier !
    Kheira sourit.
    - Si c’est dans ses cordes, de soigner les chagrins d’amour, n’hésite pas à lui demander un remède !
    - C’est le même garçon ?
    - Oui, soupire la jeune femme.
    - Pourquoi ça ne marche pas entre vous ? Qu’est-ce qui vous empêche de vivre votre amour ? demande Sabrina. Est-ce sa famille ?
    - Non, ce n’est pas sa famille, répond Kheira.
    - Il est déjà engagé ailleurs ?
    - On peut dire ça !
    - Alors, il t’a menti, conclut sa mère, très déçue. A-t-il des enfants ?
    - Je crois.
    - Quand avez-vous rompu ?demande-t-elle. Est-ce toi qui l’as voulu ou lui ?
    - Moi. Notre relation est sans espoir.
    - Il n’a pas insisté pour reprendre. T’a-t-il au moins parlé de quitter sa famille pour toi ?
    - Non. Mais je n’aurais pas accepté…Notre relation est… impossible, lâche-t-elle en prenant son sac. Bon, j’y vais !
    - À toute !
    Kheira leur fait un signe de la main et part. Comme Soumia n’habite pas très loin, elle s’y rend à pied. Dix minutes plus tard, elle sonne à sa porte.
    Soumia ouvre et sourit, soulagée. Comme jamais…
    - Entre vite, lui dit-elle. On doit discuter…
    Elles vont à sa chambre et là, elle lui soumet son idée. Qu’elle aille vivre loin de leurs familles, jusqu’à son accouchement.
    - Mais où ? Là où je vivais depuis des années, la dame refuse d’avoir des problèmes, dit Kheira. Elle a vite deviné mon état ! Je n’ai pas où aller…
    - Je vais te débrouiller un appart où vivre en attendant, la rassure Soumia. Mais il ne faudra pas sortir et tout…Si on te reconnaît, c’est fichu !
    - Je ferais tout ce qu’il faut, promet la jeune femme. Après, comment on fera ?
    - On n’a pas trop le choix. Tu iras accoucher à Annaba et tu abandonneras le bébé si tu tiens à éviter le scandale…
    Kheira est sans voix. Elle ne devait pas s’attendre à ce qu’elle lui parle d’abandon. Soumia secoue la tête. Elle ne la comprend pas.
    Qu’espère-t-elle au fond puisque l’enfant est le fruit d’une relation interdite ? Elle sait que sa relation avec son neveu ne mènera nulle part. Alors pourquoi cette surprise, cette hésitation ?

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  84. Artisans de l'ombre Dit :

    85e partie

    -Ne me dis pas que tu penses à le garder ! C’est suicidaire ! s’écrie Soumia avant de la prier d’être raisonnable. Pense à tes parents, à ta sœur… à toutes les méchancetés qu’on dira sur toi ! A ton père qui ne mérite pas d’être humilié de la sorte !
    Kheïra ferme les yeux.
    - Je ne sais pas si j’aurais le courage de l’abandonner ! C’est le fruit de notre amour.
    - Cesse de dire des bêtises ! Votre relation est contraire à toute morale, toute religion. Vous avez fait n’importe quoi ! rétorque Soumia, dégoûtée.
    C’est ton neveu ! Zahia te faisait confiance ! Tous, on s’est trompés sur ton compte !
    - C’est arrivé comme ça ! se défend la jeune femme.
    - Il fallait que ce soit mon neveu ! Ce bébé…Il vivra mieux sans vous ! Pense à sa souffrance s’il aura à savoir ! insiste Soumia, dépassée. Il aura honte, il vous en voudra ! Tandis que s’il devient pupille de l’État, il sera adopté par une famille ! Il vivra sereinement son existence !
    - Il passera sa vie à se poser des questions !
    - Si t’es là, pour lui répondre, il sera malheureux, toute sa vie ! Suis mon conseil et ne pense plus à le garder ! C’est pour son bien ! Pour le tien aussi ! Tu ne vas pas te gâcher l’existence !
    Kheïra reconnaît qu’elle a raison. Elle la rassure.
    - Je ne le garderais pas, dit-elle. Trouve-moi seulement où aller, ces prochains mois !
    Soumia appelle son amie. Elle expose le problème de logement d’une parente à son mari.
    - Ses beaux-parents viennent de les mettre à la porte, ment-elle. Je me suis rappelée que ton logement n’est pas encore loué… la cousine doit se trouver où habiter ! Elle est enceinte et sa grossesse se passe mal… S’il est encore inoccupé, loue-le nous à n’importe quel prix !
    - N’importe quel prix ?
    - C’est urgent, insiste Soumia. Elle risque de devenir folle ! La pauvre n’a pas où aller…
    - Bien. Dis leur de préparer leurs affaires ! Mais, avertit l’amie. Il faudra nettoyer avant.
    - Aucun souci.
    Soumia la remercie avant de raccrocher. Kheïra a un petit sourire.
    - Tu sais mentir, lui-dit elle. Chapeau !
    - Crois-tu qu’en sachant la vérité, elle aurait accepté ? réplique Soumia. Non ! Et puis, mes talents ne sont rien comparés aux vôtres ! De vrais comédiens. Allez, rentre chez toi, préparer tes affaires !
    - J’ai tout laissé à Alger !
    - C’est mieux ainsi !
    Soumia lui explique qu’elle l’appellera dans le courant de la matinée et qu’elle se fera passer pour Meriem, la dame chez qui elle loue.
    - Fais semblant de repartir sur Alger et je t’attendrai vers deux heures. Je t’accompagnerai jusqu’à l’appartement !
    Kheïra pense à toutes les fois où Kamel appelait en prétextant une urgence, pour qu’elle sorte le retrouver. Cette fois, ce ne sera pas un rendez-vous caché. Mais pour se cacher de tous, même de lui…

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  85. Artisans de l'ombre Dit :

    86e partie

    -D’accord ! Je prends un taxi, tout de suite ! dit Kheïra au téléphone, se voulant rassurante. Je serai là quand elle se réveillera !
    Elle raccroche, sous le regard inquiet de sa mère. Celle-ci la suit à sa chambre.
    - Qui était-ce ? Qu’est-ce qui se passe ?
    - La dame chez qui je vis, répond-elle en rangeant quelques affaires dans son sac. Elle est à l’hôpital ! C’est sa nièce qui a appelé ! Je pense qu’elle veut fermer les studios !
    - Et où iras-tu ?
    - C’est pourquoi je dois vite partir, répond Kheïra. J’aurais ainsi le temps de trouver où aller !
    Elle prend son sac de voyage et son sac à main. Elle embrasse sa mère et lui dit :
    - Pardonne moi maman !
    - Tu ne vas pas partir sans avoir déjeuné ! Sans avoir dit au revoir à ton père !
    - Tu le feras pour moi, la prie-t-elle.
    Elle se rend à la cuisine où ses sœurs préparent le déjeuner.
    - Mais où pars-tu comme ça ?
    - Je dois retourner à Alger, répond-elle. C’est urgent !
    - C’est ça, ironise Sabrina en faisant la moue.
    - Crois moi ! insiste Kheïra. Si j’avais le choix, je ne partirais pas ! Prenez soin des vieux !
    - Pourquoi tu ne le fais pas toi-même ! lui reproche Lilia. Quand tu viens, c’est pour te reposer ! Tu n’es là pour personne !
    - Lorsque je reviendrai cette fois, promet-elle. Ce sera définitif ! Je n’échapperai plus aux corvées !
    - Des paroles, des paroles…
    - Je jure de revenir pour de bon !
    - Incha Allah !
    Kheïra les embrasse et part. Elle ne veut pas tomber sur son père. Comme entendu avec Soumia, elle la rejoint quelques ruelles plus loin.
    Elles se rendent à l’appartement, situé à la sortie de la ville. L’entrée étant exposée à la rue, elle ne pourra sortir qu’en cas d’urgence.
    - Il va coûter combien ? demande la jeune femme.
    - Safir se charge de la location, répond Soumia. Moi je m’occuperai des achats… Les gens te connaissent ici. Si tu sors, tu risques d’être reconnue !
    - J’aurai besoin d’un portable ! pour appeler ma famille, dit Kheïra. Sinon ils vont se poser des questions !
    - Oui, mais uniquement eux ! Je te l’apporte demain !
    En attendant le lendemain, Kheïra s’évertue à mettre de l’ordre dans l’appartement, à le rendre vivable. Puisqu’elle y passera les plus longs mois de sa vie…

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  86. Artisans de l'ombre Dit :

    87e partie

    Kheïra accouche d’un garçon, à l’hôpital d’Annaba. Soumia, qui s’est préparée à l’évènement, prétextera un rendez-vous, chez un dermatologue, très réputé.
    Safir leur a servi de chauffeur. C’est elle qui l’a soutenue durant cette épreuve. Elle s’est chargée de remettre le nouveau-né à la pouponnière.
    Elle a refusé que Kheïra le voie et ne le prenne dans ses bras. Elle ne veut pas prendre le risque de la voir s’attacher à lui. Elle tient à leur éviter de souffrir davantage.
    Kheïra a vécu coupée du monde, les derniers mois.
    Craignant d’être reconnue, elle s’est contentée de se rendre uniquement au rendez-vous, chez une gynécologue qui l’a suivie jusqu’au jour de son accouchement. Elle a eu la chance. Tout s’est bien passé.
    - Dans quelques semaines, tu seras vite remise sur pied !
    La mission de Soumia ne s’arrête pas le jour de son retour, dans l’appartement. Chaque jour, durant des semaines, elle cuisinera des plats chauds, pour l’aider à récupérer.
    Kheïra parle de tout sauf de ce qu’elle a vécu dernièrement.
    - J’ai hâte de rentrer à la maison, confie-t-elle à Soumia. Je n’en peux plus de la solitude… Comment vont mes parents et mes sœurs ?
    - Figure-toi… tes sœurs ont eu des prétendants, lui apprend Soumia. Zahia m’a dit qu’il se peut qu’elles se marient vite !
    - Je ne voudrais pas rater ça !
    De la tristesse passe dans son regard. Elle a de la peine pour elle. Mais en songeant au drame qu’elle a évité à leurs familles, elle se dit qu’il en est mieux ainsi. C’est un mal, pour leurs biens. Kheïra finira par tourner la page. Elle n’a pas le choix.
    Elle retourne chez ses parents, par un lundi. Un jour où personne ne l’attend. Mais ils sont heureux de la voir.
    - Pourquoi es-tu restée aussi longtemps absente ? lui reproche sa mère.
    - Le travail maman, prétexte-t-elle sans sourire.
    - Tu as reçu du courrier. Ils parlent d’absence…
    - J’ai souffert de migraines, plusieurs jours de suite, répond Kheïra. Je ne pouvais pas me rendre au travail et voilà…
    - Le courrier était dans une deuxième enveloppe, dit Aïcha. C’est la propriétaire des studios qui les avait envoyés. Pourquoi ? Tu ne vis plus chez elle ?
    - Après sa maladie, elle ne voulait pas de locataires, chez elle… Elle n’a plus la force de tout contrôler, explique la jeune femme avant de soupirer. Comme je suis heureuse d’être ici !
    Ses yeux brillent de larmes contenues. Les épreuves passées l’ont mûrie. Toute la famille remarque son changement.
    Si avant, elle était très proche de Zahia et de sa famille, tous s’aperçoivent que c’est à peine si elle discute avec eux, lors de leurs visites.

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  87. Artisans de l'ombre Dit :

    88e partie et fin

    Elle ne part plus chez eux. En l’espace de quelques mois après son retour, ses sœurs convolent en justes noces. Elle reste avec leurs parents, tenant ainsi sa promesse, de s’occuper d’eux.
    Elle a obtenu un poste d’enseignante, au sein même du lycée où travaille Soumia. Celle-ci l’a à l’œil. Le fait de savoir qu’elle ne se rend plus chez Zahia, la rassure et lui permet de dormir tranquille. Parfois elle craint qu’ils ne reprennent leur relation.
    Trois ans après leur rupture, Kamel décide de se marier. Kheïra se rendra à la fête à contrecœur. Elle n’y tardera pas, tenant à rentrer à la maison. Leur père n’est pas venu.
    - Je ne peux pas le laisser seul, prétexte-t-elle à Zahia qui ne comprend pas son changement et pourquoi il n’y a plus de chaleur dans leur relation.
    - On dirait qu’on n’est plus sœurs !
    - Si ! Tu te fais des idées. Je suis seulement prise et je m’occupe des vieux ! J’ai été trop longtemps absente ! Tu comprends ? Je veux me consacrer à nos parents et à mon travail !
    - Mais qu’est-ce qui t’a changé à ce point ?
    - La vie, répond-elle simplement.
    - Tu me manques, insiste Zahia en soupirant. Tes visites, nos discussions… Notre complicité a comme disparu !
    - Wallah que tu te fais des idées ! Je reconnais que je n’ai plus autant le temps qu’avant, dit Kheïra mais sache que je serais toujours là, pour toi !
    - Tes propos ont beau me rassurer, je ne te sens pas aussi proche qu’avant, dit la grande sœur. Même avec mes enfants. Avant toi et Kamel, vous étiez si proches ! Maintenant c’est à peine si tu lui adresses la parole !
    La jeune femme secoue la tête, exaspérée.
    - Ne m’en veux pas ! Dans le fond, je ne suis pas bien ! Je ne me sens bien que lorsque je suis seule, lui confie-t-elle. Je voudrais la paix. Rien que ça !
    - Mais personne ne t’ennuie que je sache !
    Kheïra s’efforce à sourire, à sa sœur.
    - Personne. Juste ma conscience.
    Soumia, assise un peu plus loin, entend tout. Jugeant que Kheïra risquait d’en dire plus qu’il le faut au point de semer le doute puis le trouble dans le mariage de son neveu, intervient.
    - Si tu tiens à partir, autant le faire avant la tombée de la nuit, suggère-t-elle.
    - Oui, j’y vais de ce pas.
    Elle prend congé de la famille, sans même avoir dit au revoir aux mariés.
    Soumia l’accompagne dehors. Safir va à elles.
    - Elle veut rentrer maintenant, lui dit-elle.
    - Ça ne peut pas attendre demain matin ?
    - Non. Si tu ne peux pas la raccompagner, trouve quelqu’un, pour le faire à ta place !
    Safir comprend pourquoi. Il n’insiste pas. Il trouve vite un parent à qui il donne les clefs de sa voiture et lui demande de raccompagner Kheïra à Guelma.
    Même si elle est peinée, elle ne le montre pas. Kamel n’a pas eu un seul regard pour elle. Il a tourné la page, poursuivant son chemin comme s’il n’y a rien eu entre eux.
    Juste une relation interdite où elle a été la seule à souffrir. Une relation qui aurait pu briser deux familles. Kamel et sa femme sont allés vivre à l’autre bout du pays.
    Kamel n’est jamais retourné à Guelma. Aujourd’hui, père de deux enfants, il vit sa vie, loin des siens. Des années ont passé depuis. Kheïra vit encore avec ses vieux parents. L’occasion de refaire sa vie ne s’est pas présentée ou… vit-elle dans le souvenir ? Personne ne le saura…
    Fin

    ADILA KATIA

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