Mardi, 19 Juin 2012 09:50
Reflet culturel
Pendant plus de trente années, et immédiatement après l’indépendance, Nadia Aït Si Selmi, cette femme qui avait pris conscience de l’urgence et de l’importance de l’évolution et du réveil de la femme en général et de la femme rurale en particulier, a animé sur les ondes de la Radio nationale Chaîne II une émission intitulée “conseils pour vous mesdames”. Nadia a développé un programme de conseils très pratiques et accessibles, offrant ainsi de nouvelles possibilités d’émancipation pour ces femmes rurales qui n’avaient comme moyens d’ouverture que la seule chaîne. Le pays ne pouvait se reconstruire après une longue et terrible guerre sans, une nouvelle fois, la participation de la femme sur laquelle reposait la cellule familiale face à une ambiance où se façonnaient le nouveau monde et la nouvelle vie qui s’ouvraient à elle. Cette voix qui fusait à la même heure et quotidiennement était non seulement une source d’éducation mais aussi une lueur d’espoir pour toutes ces femmes qui pouvaient posséder ce petit transistor. Son écho arrivait dans les fins fonds du pays. L’émission pédagogique de Nadia n’était pas une simple transmission d’information mais plutôt une véritable formation sociale à domicile. Tous les besoins étaient traités, même ceux d’apparence ordinaire. De la conception égalitaire et égalitariste de la vie dans le couple, à l’entretien d’une grossesse, l’accompagnement du nouveau-né et l’éducation des enfants, l’hygiène corporelle en générale, la recette de cuisine, aux techniques de couture etc. tout passait. Le génie de Nadia, qui n’hésitait pas à consulter les grandes revues et magazines destinés initialement à la femme occidentale, était sa force d’adaptation des contenus qu’elle jugeait utiles de communiquer à la femme rurale algérienne sans heurter ni choquer sa sensibilité. Pour ce faire, il eut fallu toute une démarche d’acclimatation et une attention didactique qu’elle exerçait à la fois sur la forme et le fond des contenus pour endiguer les conseils utiles et nécessaires. Madame Aït Si Selmi a su également redonner vie à la langue rurale, faite de proximité pour exprimer une pensée puisée dans une langue française de portée et aguerrie à la communication moderne.
La maîtrise qu’elle avait de l’une et de l’autre des deux langues, mais surtout sa manière de faire dire des images aux mots, lui étaient essentielles et indispensables en ces temps d’introduction de la société algérienne dans une vie faite d’indépendance et de liberté.
A. A.
kocilnour@yahoo.fr
19 juin 2012
Abdennour Abdesselam